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Faisant suite à la chapelle d'une
maladrerie, détruite en 1739, l'église Saint-Philippe-du-Roule
est issue de la volonté de Louis XV de redonner un sanctuaire
au faubourg du Roule (village intégré à la
capitale en 1722). Le Roule était devenu un quartier huppé.
L'architecte Jean-François Chalgrin (1739-1811) fut chargé
de sa construction. Elle s'étala de 1774 à 1784. Le
style de l'église, avec des colonnes antiques, rappelait
celui des temples romains. Les deux clochers, prévus au niveau
des chapelles latérales actuelles, n'ont jamais été
construits faute de financement.
A la Révolution, l'édifice est fermé. Il est
rendu au culte en 1795 et redevient paroisse en 1802.
Au XIXe siècle, la population du faubourg s'accroît.
C'est pourquoi, en 1845, l'architecte Etienne-Hippolyte Godde (1781-1869)
agrandit l'église en lui ajoutant un déambulatoire
(flanqué de colonnes antiques) et une chapelle axiale.
Saint-Philippe-du-Roule reprend le plan des basiliques paléochrétiennes
de Rome, un style prisé par les architectes jusqu'à
la fin de la Restauration. Elle est enrichie d'une très belle
décoration XIXe. Sa splendide chapelle axiale (dite de la
Vierge), couverte de peintures et de dorures, pourrait faire honneur
au château de Versailles ou au palais du Louvre.
Les vitraux du premier niveau, en tonalité bleue, sont dus
à Emile Hirsch (1832-1904), ceux de la voûte à
Albert Maignan. |
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Vue d'ensemble de la nef avec ses colonnes cannelées à
chapiteaux doriques.
Dès l'entrée, la Descente de croix peinte sur la voûte
en cul-de-four attire le regard. |
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Allégorie de la Religion sur le fronton. La Religion tient
la Croix et le calice.
Sculpture due à François-Joseph Duret (1732-1816)
«««--- A GAUCHE, la façade et son péristyle
à colonnes doriques
A noter que les deux ailes, à gauche et à droite, s'ouvrent
sur les anciennes chapelles du vestibule. |
Vue de la nef et du bas-côté gauche. Il n'y a pas de
chapelles latérales dans les bas-côtés.
Les vitraux, qui relatent la vie de saint Philippe et de saint Jacques,
sont dus à Emile Hirsch (1832-1904).
A DROITE, vitrail dans le bas-côté droit : «Martyre
de saint Jacques». Cliquez sur l'image pour l'afficher en gros
plan. ---»»» |
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Le vaste déambulatoire rajouté par l'architecte Godde
en 1845 |
Vue du maître-autel et des fonts baptismaux depuis le déambulatoire |
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Chapelle latérale gauche au niveau du déambulatoire.
A part le vitrail, la chapelle latérale droite est totalement
identique. |
Statue de la Vierge à l'Enfant
dans le chur (1862) |
La chaire à prêcher (XVIIIe?) est montée sur cinq
colonnes cannelées. Deux anges soutiennent l'abat-son. |
La voûte en berceau de Saint-Philippe-du-Roule
Simple charpente en bois décorée de rosaces, elle est
peinte dans un ton imitant la pierre.
La voûte est percée de six hautes fenêtres à
lunettes où ont pris place des vitraux de style Art déco. |
L'orgue de tribune, niché sous la voûte,
est un Cavaillé-Coll-Mutin de 1903.
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La Descente de croix de Théodore Chassériau (1819-1856)
peinte sur la voûte en cul-de-four de la nef
Cliquez sur l'image pour l'afficher en gros plan. |
Vitrail de sainte CLotilde dans les fenêtres hautes
Ces vitraux datent de 1894 et sont dus à Albert Maignan.
Cliquez sur l'image pour l'afficher en gros plan. |
Les soldats romains tirent au sort celui qui conservera la tunique
du Crucifié.
Détail de la Descente de croix
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Les membres du Sanhédrin regardent, d'un air arrogant, Joseph
d'Arimathie descendre le corps de Jésus.
Détail de la Descente de croix |
Le Sanhédrin
et la mort de Jésus de Nazareth. Dans l'histoire
occidentale chrétienne, le peuple juif est regardé
comme le peuple déicide, avec le cortège d'exactions
et de massacres dont les chrétiens se sont rendus coupables
- pour punir les juifs d'avoir crucifié le «Sauveur».
Les membres du Sanhédrin peints par Théodore
Chassériau (image du haut à droite) ne font
rien pour dissiper cette vision des choses. Leurs visages
expriment le mépris, l'arrogance. Quant à celui
sur la gauche (agenouillé et à moitié
en prière), il a l'air de se moquer ostensiblement
de ce qu'il voit. Par ses mains jointes, il donne carrément
dans la provocation. Il faut reconnaître que son visage,
extrêmement typé «sémite»,
rappelle les portraits de juifs exhibés au XXe siècle
par la propagande antisémite la plus virulente.
Rappelons d'abord quelques faits historiques.
Au temps de la guerre civile entre César et Pompée,
les Juifs prirent le parti de César. Bien leur en prit
: César, une fois vainqueur, les récompensa.
Rappelons que, dès le IIe siècle avant J.-C.,
à la suite de la répression menée par
les Séleucides, les Juifs avaient commencé à
se disperser dans le monde romain, créant la diaspora.
Ce mouvement avait repris à partir de 63 av. J.-C.
quand Rome arriva en Palestine. Jules César, qui, au
début de sa dictature, eut à combattre l'exclusivisme
religieux du sénat (il autorisa les cultes de Cybèle
et de Mythra), se montra généreux envers les
Juifs. Dérogeant à la sévérité
de la loi de Rome qui limitait le droit d'association, il
fit inscrire les synagogues (en fait, les associations formées
par les Juifs) sur la liste des corporations et collèges
autorisés. «Mieux encore, il habilita le grand
prêtre de Jérusalem à percevoir sur leurs
sociétaires et à se faire transmettre par elles
[les synagogues] la taxe du didrachme annuellement exigible
de chaque juif pour l'entretien du temple de Jérusalem»,
écrit Jérôme Carcopino dans Profils
de conquérants, (chapitres Autour de César).
De fait, en Judée, les Romains, en tant que puissance
occupante, garantissaient au Sanhédrin (assemblée
suprême garante de la Loi Juive) son pouvoir moral et
religieux sur le peuple. Cependant cette assemblée
n'avait pas le pouvoir de condamner à mort. Jésus
de Nazareth, qui se disait Fils de Dieu, représentait
pour elle une menace. Son allégation de quasi-divinité
était un blasphème. Une semaine plus tôt,
Jésus était entré dans Jérusalem
parmi une foule en liesse qui agitait des rameaux : la menace
était réelle. Un peu plus tard, il avait chassé
les marchands du Temple à coups de fouet. Or bien souvent
ces marchands vendaient les objets de sacrifice offerts au
Temple par les fidèles juifs - objets qui étaient
bien sûr récupérés par les prêtres.
Ceux-ci étaient à même
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d'interpréter ce geste
de colère comme une provocation : cet agitateur voulait
leur couper les vivres et casser leur prééminence
sur la société israélite ! Il fallait
se débarrasser de lui.
Le Sanhédrin le fit donc comparaître devant le
procurateur Pilate, détenteur de l'autorité
romaine, en disant en quelque sorte : «Cet individu
menace notre pouvoir. Tuez-le!». Et ceci pour n'importe
quel motif. On sait que Ponce Pilate choisit de se laver les
mains ostensiblement devant la foule pour bien montrer qu'il
refusait de prendre la responsabilité d'une condamnation
qu'il ne comprenait pas. A ses yeux, le dénommé
Jésus de Nazareth n'était qu'un brave homme
qui n'avait fait de mal à personne. Qu'il se dise Fils
de Dieu ou roi des Juifs n'était pas un problème
pour un citoyen de Rome, c'est-à-dire un individu épris
d'une grande tolérance religieuse qui, de plus, vivait
à une époque où ce genre d'«illuminé»
prompt à se proclamer «Fils de Dieu» n'était
pas rare.
En fin de compte, c'est le motif de sédition qui fut
retenu ; Jésus fut condamné à la Crucifixion.
Le Sanhédrin avait réglé ses comptes.
La condamnation à mort de Jésus de Nazareth
doit être regardée comme LE symbole du problème
le plus important de l'espèce humaine : celui de sa
gestion. C'est-à-dire celui du jeu des pouvoirs. Aux
conflits d'orgueil entre individus répondent les conflits
de pouvoir entre groupes d'individus. Qui a le Pouvoir? Qui
décide? Qui est responsable? L'espèce humaine,
depuis son apparition sur terre, est en conflit avec elle-même
uniquement pour savoir comment répondre à ces
trois questions. Dans le cas qui nous occupe, le jeu des pouvoirs
oppose le Conseil suprême juif, garant de la Loi, au
Galiléen et à ses disciples.
Conclusion : à la question «Qui a tué
Jésus?», on ne répondra pas «les
Juifs», mais «le Sanhédrin», c'est-à-dire
ceux qui détiennent le pouvoir et qui refusent de le
lâcher. Ceci par-delà toutes les époques
et toutes les cultures. Soyons abrupt : les Juifs, en tant
que Juifs, n'ont rien à voir dans cette histoire.
On regardera donc les membres du Sanhédrin peints par
Chassériau, non pas comme des Juifs déicides,
moqueurs, vindicatifs, mais comme les détenteurs du
Pouvoir, comme des gens qui se sont donné le droit
de gérer la vie des autres, et qui voient avec soulagement
disparaître un concurrent dangereux, en se disant que
cette exécution servira de leçon à ceux
qui seraient tentés d'imiter son exemple.
Compte tenu de cette analyse, il est regrettable que le peintre
Théodore Chassériau ait cru utile de forcer
le trait sur les faciès.
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Joseph d'Arimathie, aidé de saint Jean, descend de la croix
le corps de Jésus.
Détail de la Descente de croix de Théodore Chassériau |
Les saintes femmes en pleurs. Sur la droite, Marie.
Détail de la Descente de croix de Théodore Chassériau |
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La chapelle de la Vierge et sa série de toiles marouflées
et de peintures murales réalisées par Claudius Jacquand
(1804-1878)
Sur la voûte en cul-de-four : «Le Christ couronnant la
Vierge» par Jacquand. Le Christ est entouré de saint
Philippe et de saint Jacques. |
Vues des toiles marouflées sur le côté droit.
Claudius Jacquand a représenté, au premier
niveau, des scènes de la vie de la
Vierge (en style très narratif). Au deuxième niveau,
les invocations des Litanies.
A DROITE EN HAUT ---»»»
Statue en marbre de la Vierge à l'Enfant dite «Notre-Dame
de toutes-Grâces»,
uvre de Charles-François Lebuf Nanteuil (1792-1865)
Toile de Claudius Jacquand : «La Sainte Famille» dans
les scènes de la vie de la Vierge.
Il faut reconnaître que Joseph et Marie font très «couple
ouvrier XIXe siècle»...
A DROITE CI-CONTRE ---»»»
Le grand et magnifique vitrail horizontal qui éclaire (faiblement)
la chapelle de la Vierge
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«La Sainte Famille» (toile de Claudius Jacquand) |
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Vue générale et côté droit de la chapelle
de la Vierge
L'éclairage électrique étant indispensable, la
chapelle en acquiert une composante jaune un peu poussée. |
La nef vue depuis le maître-autel. |
Documentation : «Paris d'église
en église» (Massin éditeur), ISBN :978-2-7072-0583-4 |
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