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L'église Saint-Hélier est
proche de l'ancien octroi sud de Rennes,
situé au sud de la gare. L'existence du quartier et d'une
ancienne église Saint-Hélier est attestée dès
le XIIIe siècle. On y tisse des toiles de chanvre pour créer
les balles du fret maritime. Ce qui n'est pas contenu dans des tonneaux
l'est en balles. Les toiles de chanvre sont aussi utilisées
à l'époque pour faire des matelas, les voiles des
navires et les vêtements pour les plus pauvres. C’est une
industrie assez prospère. Dans le quartier Saint-Hélier,
elle va dégager les fonds nécessaires à la
construction, aux XVème et XVIème siècles, d'une nouvelle église.
À la Révolution, cette église est affectée
à l'armée. On y établit une poudrière.
Après la signature du Concordat, elle est rendue au culte
catholique en 1803 et devient annexe de l'église Toussaints.
Elle ne devient paroissiale qu'en 1929.
En 1830, on ajoute à l'édifice un petit clocher. Menaçant
ruine, il est abattu à la fin du XIXe siècle. En 1925,
l'architecte Arthur Regnault réalise d'importants travaux
: ajout, en style néogothique, d'un nouveau clocher avec
sa flèche ; agrandissement de l’édifice au sud avec construction
d'un bas-côté ; vitraux
réalisés par l'atelier rennais Rault et l'atelier
rennais Briand.
En 1936, l'enclos et le cimetière (qui borde l'église au
sud) disparaissent dans le cadre de l'aménagement de la rue et de
la construction d'un nouveau parvis. Voir plus bas un dessin
de 1906 réalisé à l'occasion de l'inventaire
où ces éléments disparus sont encore visibles.
L'église Saint-Hélier est en croix latine avec un
vaisseau central et deux bas-côtés. Les parties anciennes
sont en granit, appareillé avec de la pierre de taille. Au XXe siècle,
les ajouts d'Arthur Regnault sont réalisés en béton
armé, couvert d'un parement de moellons simulant la pierre de taille.
Pour le visiteur, l'église présente un double intérêt
: la suite d'arcades gothiques qui délimite la nef et les
vitraux
des années 1920 créés par deux ateliers rennais,
au style totalement différent.
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Vue de la nef et du chur depuis l'entrée.
Les suites d'arcades qui bordent le vaisseau central remontent aux
XVe-XVIe siècles. |
L'église Saint-Hélier vue depuis la rue Saint-Hélier
(au sud-ouest). |
Statue de saint Hélier sur la façade sud-ouest. |
Porte et baie gothiques sur le côté sud-ouest. |
Clocher et flèche en style néogothique dans le
style cornouaillais, détail.
uvre de l'architecte Arthur Regnault en 1925. |
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Éléments Renaissance dans une architecture gothique
(baie des façades sud-ouest). |
Sur le côté nord-ouest de l'église se trouve
l'entrée principale. |
L'église
Saint-Hélier et la loi de 1905 (1/4).
La Séparation de l'Église de l'État,
votée le 9 décembre 1905 par l'Assemblée,
a souvent créé des remous dans les paroisses
de l'Hexagone. L'État prenait possession de tous
les éléments cultuels de France, mais
surtout obligeait le clergé à soumettre
chacune de ses églises à un inventaire
du mobilier et de tous les objets utilisés pour
la liturgie. Prélats et fidèles en furent
scandalisés. Du jamais vu depuis deux mille ans
! Du jamais vu depuis que l'Église était
l'Église ! Soucieux de leurs prérogatives,
de l'honneur de la religion qui a fait la France, les
ecclésiastiques prirent ces incursions et ces
comptages pour une profanation inadmissible, une insulte
à Dieu. Et les paroissiens leur emboîtèrent
le pas : personne ne devait souiller le sol des églises
pour se livrer à cette mascarade impie.
À Rennes,
le préfet d'Ille-et-Vilaine, M. Rault, prévoyait
des barrages devant les portes des édifices religieux.
Il pensa d'abord mener les inventaires à une
date précise pour chacun d'entre eux, puis se
ravisa. C'était trop facile pour les paroissiens
: si tous les Rennais opposés à la loi
se regroupaient à chaque fois devant les portes
de l'édifice concerné, son labeur allait
se multiplier. Il décida donc de réaliser
tous les inventaires en même temps : le vendredi
16 février 1906.
La situation du Préfet était compliquée.
En effet, devant la politique anticléricale du
gouvernement, les villes avaient tendance à élire
des maires catholiques et souvent pratiquants. C'était
le cas à Rennes
où Eugène Pinault, un riche tanneur, par
ailleurs conseiller municipal et ancien député
d'Ille-et-Vilaine, avait été élu
à la mairie en 1900. Une responsabilité
qu'il honorera jusqu'en 1908. L'historien Xavier Ferrieu
l'écrit dans son Histoire de Rennes (Gisserot,
2001) : Pinault avait clairement annoncé
qu'il refusait d'assurer le maintien de l'ordre lors
des inventaires...
Même si le cardinal Labouré, archevêque
de Rennes
avait recommandé aux curés de laisser
les églises ouvertes, le Préfet savait
très bien que les Rennais allaient s'opposer
à la «profanation» des églises
par la fonction publique. Anticipant des échauffourées
et en l'absence de la police, il lui fallait disposer
d'une force armée suffisante.
Le témoin des événements décrit
ainsi la journée du jeudi 15 février :
«De tous les côtés, par tous les
trains, arrivent les gendarmes. Tous ceux du département,
ceux même des départements voisins, jusque
de Lannion, ont été appelés pour
la grande journée. Habitués à protéger
l'ordre, et à poursuivre les coquins et les voleurs,
ils se sentent bien un peu déconcertés
de la triste besogne qu'on leur impose. Pauvres gens
! Ils n'avaient pas rêvé de devenir gendarmes
pour assister au sac des églises, ou à
la violation des propriétés.»
À 18 heures ce même jour, le calme règne
dans Rennes
. Les agents de l'État sont entrés dans
les églises pour repérer les points faibles,
nous dit ce témoin qui ajoute non sans malice
: «Ils savent par où ils pourront tenter
l'effraction.»
---»» Suite 2/4
plus bas.
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LA NEF ET LES
BAS-CÔTÉS DE L'ÉGLISE SAINT-HÉLIER |
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Suite d'arcades gothiques du XVe siècle dans la nef. |
Plan de l'église Saint-Hélier. |
Autel de la Vierge dans le bas-côté sud.
Il ferme la sacristie construite au XVIIe siècle. |
Le Martyre de saint Hélier
à l'Ile de Jersey au VIe siècle.
Vitrail de l'atelier Rault à Rennes, années 1920. |
La châsse de saint Mélaine est préservée
miraculeusement des flammes.
Vitrail de l'atelier Rault à Rennes, années 1920. |
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L'église
Saint-Hélier et la loi de 1905 (2/4).
---»» À 23 heures, les portes des
églises sont gardées par des escouades.
À minuit, la ville est en état de siège.
Pour rentrer chez eux, les habitants dont les maisons
sont proches des édifices cultuels doivent établir
leur identité et se faire accompagner par un
agent de police.
Le témoin poursuit : «Toute la garnison
de Rennes
a été mobilisée : les 14 compagnies
du 41e de ligne, en tenue de campagne, avec deux paquets
de cartouche dans chaque giberne, les artilleurs des
7e et 10e d'artillerie, - les gendarmes, 500, dit-on
-, arrivés de partout. Tout cela pour enfoncer
les portes de six églises, et inspirer une salutaire
terreur à quiconque voudrait bouger.»
Arrive le matin du vendredi 16 février 1906.
Saint-Hélier est une paroisse ouvrière
au sud de la ville. Le Préfet n'est pas inquiet
: les gens seront à leur travail ; de plus, l'église
n'est abordable que d'un seul côté, celui
de la rue, et le cimetière l'en sépare.
La protestation est presque impossible.
Néanmoins, le préfet ne veut prendre aucun
risque : une compagnie du 41e et une batterie du 7e
d'artillerie gardent les abords de l'église depuis
3 heures du matin. L'actuelle rue Saint-Hélier,
principale voie de passage vers la ville à cette
époque, est barrée : les ouvriers qui
se rendent à leur travail ou les voitures qui
viennent de la campagne apporter des denrées
en ville doivent faire un long détour... ou se
faire accompagner sous bonne escorte.
M. Hubert, receveur de l'Enregistrement, est chargé
de l'inventaire. À 7 heures 15, il arrive au
bureau de l'Octroi et en sort un quart d'heure plus
tard en compagnie d'un lieutenant de gendarmerie, d'un
agent de la sûreté et d'un gendarme. Tous
quatre se rendent à l'église. Là,
le chanoine Ruellan, curé de la paroisse, se
tient devant la porte (voir dessin plus
bas) avec ses vicaires et les membres du Conseil
de fabrique.
---»» Suite 3/4
plus bas.
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Statue de sainte Anne et Marie.
Bas-côté sud. |
Statue de la Vierge àl'Enfant, détail.
Autel de la Vierge dans le bas-côté sud. |
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L'Assomption
Vitrail de l'atelier Briand à Rennes, années 1920. |
L'église
Saint-Hélier et la loi de 1905 (3/4).
---»» Le curé lit alors une courte
protestation solennelle :
« Malgré une indisposition que je veux
croire passagère, dit-il, je tiens à protester
moi-même devant vous, au nom de tous les membres
de la Fabrique de la paroisse. Nous protestons de toute
notre énergie contre l'acte que vous allez accomplir.
Il constitue, en effet, la première des mesures
qui doivent aboutir à spolier l'Église
catholique. Nous avons été choisi pour
administrer en bon père de famille les biens
de cette Église.
Nous les avons reçus en dépôt sacré
de notre prédécesseur, avec l'obligation
de les transmettre à ceux qui viendraient après
nous.
Aussi ne céderons-nous qu'à la force,
en laissant à qui de droit la responsabilité
de la violation de notre sanctuaire.
Maintenant, Monsieur, accomplissez votre uvre,
pratiquez la trouée dans la maison de Dieu.»
Toutes les portes étant fermées, M. Hubert
revient à l'Octroi et envoie vers le Préfecture
le lieutenant de gendarmerie de son escorte. Celui-ci
revient vers 9 heures 15, mais rien ne se passe. Le
curé, résigné, rentre au presbytère.
Peu avant 10 heures, M. Deblais, commissaire de police,
va le trouver pour l'informer que l'autorité
va procéder aux sommations légales («Obéissance
à la loi !») et utiliser la force. Le curé
signe la notification et le commissaire sort du presbytère.
---»» Suite 4/4
plus bas.
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L'Assomption, détail.
Vitrail de l'atelier Briand à Rennes, années 1920. |
Chapelle du Calvaire dans le bas-côté
nord ---»»»
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Arcades gothiques des XVe-XVIe siècles et bas-côté
sud. |
Architecture
intérieure.
Les importants remaniements des années 1920 n'ont
pas privé l'église Saint-Hélier
de son principal atout architectural : ses deux rangées
d'arcades qui bordent le vaisseau central. Elles remontent
à l'origine de l'église, c'est-à-dire
aux XVe-XVIe siècles. La photo ci-dessus montre
une très élégante suite d'arcs
brisés aplatis dont les nervures sont partagées
en deux groupes. L'épaisse nervure de l'intrados
rejoint par pénétration les deux piles
qui l'entourent. Les nervures extérieures se
rejoignent, d'une arcade à l'autre, par une liaison
en saillie sur les piles.
La sablière qui reçoit les nervures de
sustentation de la voûte en berceau ne présente
aucun élément digne d'intérêt,
contrairement à celle de l'église Saint-Germain,
située plus au nord à Rennes,
qui est enjolivée de multiples sculptures de
grotesques.
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L'église Saint-Hélier le VENDREDI 16 FÉVRIER
1906 AU MATIN.
Au premier plan, la troupe forme un barrage impressionnant.
Devant la porte nord-ouest, le clergé barre le passage
aux agents de l'État.
Dessin tiré du recueil «À l'assaut de nos
églises» édité en 1906.
L'enclos et le cimetière, visibles sur le dessin, ont disparu
en 1936 lors des aménagements de la voie et de la place. |
Saint-Hélier
et la loi de 1905 (4/4).
---»» Huit soldats de la 8e compagnie d'ouvriers
arrivent avec des haches, des crics et des massues,
prêts au «crochetage». À 10
heures précises, M. Hubert sort de l'Octroi,
passe devant les soldats (qui ont mis baïonnette
au canon) et se dirige vers l'église où
le commissaire de police le rejoint. Ce dernier fait
les trois sommations. Pas de réponse. Les soldats
s'attaquent alors à coups de hache à la
porte du midi. Une petite ouverture est pratiquée.
On peut ainsi y glisser des leviers pour faire sauter
les barres de fer qui bloquent la porte à l'intérieur.
L'église est ouverte. M. Hubert entre et trouve
devant lui le clergé de l'église et les
fabriciens. «Il fait à la hâte un
simulacre d'inventaire, écrit le témoin.
Vingt minutes après tout est terminé.
Il est 11 heures. En un instant, avec une satisfaction
non dissimulée, la troupe rejoint les casernements.»
Les cloches sonnent aussitôt pour appeler les
fidèles à une messe de réparation.
Il faut en effet «demander pardon au divin Maître
de l'outrage qui vient de lui être fait, et prier
pour le salut de la France.»
Source : À l'assaut
de nos églises, récit anonyme d'un
témoin, édité en 1906.
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Le Baptême du Christ. ---»»»
Vitrail de l'atelier Briand à Rennes, années
1920.
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La Nativité.
Vitrail de l'atelier Briand à Rennes, années 1920. |
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LE CHUR
DE L'ÉGLISE SAINT-HÉLIER |
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Le chur de l'église Saint-Hélier se termine par
un chevet plat. |
Jésus et les apôtres, vitrail dans le chur.
Atelier Briand à Rennes, années 1920. |
L'ambon du chur est moderne. |
Signature de l'atelier Rault. |
Signature de l'atelier Briand. |
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Jésus et les apôtres, détail.
Atelier Briand à Rennes, années 1920. |
Orgue de tribune de 1977, dû au facteur Yves Sévère.
Il a été complété en 1988. |
La Nativité, détail.
Atelier Briand à Rennes, années 1920. |
Vue de la nef depuis le chœur. |
Documentation : site de la paroisse (saint-helier.net)
+ site Mérimée sur l'église Saint-Hélier
+ «À l'assaut de nos églises», récit
anonyme d'un témoin, édité en 1906. |
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