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La construction de l'abbatiale Saint-Philibert
à Tournus
s'échelonne de la fin du Xe siècle jusqu'au début
du XIIe. En 949, un concile d'évêques a institué
un pèlerinage à Saint-Philibert. Philibert est un
moine, fondateur de l'abbaye de Jumièges en Normandie. Ses
reliques se trouvent en Bourgogne parce que les moines ont quitté
l'île de Noirmoutier, où elles reposaient, pour fuir
les invasions normandes. Le hasard de leur périple les a
conduits à Tournus,
au bord de la Saône. Le culte de Valérien, martyr local,
en a pris ombrage. Cependant, en 949, les deux communautés
monacales fusionnent. Philibert et Valérien sont les deux
patrons de la nouvelle église.
L'église est consacrée en 1019 une fois réparés
les dommages dus à un incendie en 1007. Au XIe siècle,
d'importants travaux de réfection du chur sont effectués,
ce qui conduit le pape Calixte II à consacrer une nouvelle
fois l'église en 1120. Aux XIVe et XVe siècles, après
le style normand, c'est en style gothique que l'on édifie
trois chapelles au flanc nord de l'édifice. En 1627, Saint-Philibert
devient un collège de chanoines. Néanmoins, l'appellation
d'«abbatiale» subsiste jusqu'en 1785. À la Révolution,
Saint-Philibert devient temple de la Raison. Le Concordat de 1802
en fait une église paroissiale et la rouvre au culte. Aux
XIXe et XXe siècles, les programmes de restauration se succèdent.
Les derniers datent des années 1950. La renommée de
Saint-Philibert est avant tout architecturale : sa voûte romane
n'est pas en berceau longitudinal comme partout ailleurs, mais en
berceaux transversaux.
Ce cas est presque unique : seule l'église rurale du Mont
Saint-Vincent, en Bourgogne, possède une architecture semblable.
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Vue générale de la nef de l'abbatiale saint-Philibert.
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Une allée du cloître.
Accolée à l'église, c'est la seule allée
du cloître qui reste. Elle date du XIe siècle. |

L'allée du cloître et ses magnifiques ouvertures romanes
en plein cintre et à colonnettes. |
LA NEF DE SAINT-PHILIBERT |
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La nef et le bas-côté sud vus du bas-côté nord.
Au fond de l'église, les fenêtres de part et d'autre
de l'orgue
donnent dans la chapelle
Saint-Michel. |

Le grand narthex est divisé en trois vaisseaux. Ses piliers
massifs soutiennent le poids
de la chapelle Saint-Michel
située au-dessus. |

La très célèbre voûte en berceaux transversaux
de Saint-Philibert
et ses arcs à double rouleau et à deux couleurs. |

Croisillon sud et début du déambulatoire. |

Fresque d'évêque sur le mur d'ouest de la nef (début du XIIIe
siècle). |
Architecture.
L'un des problèmes de l'architecture romane est d'assurer
la solidité d'une voûte en berceau, construite
en pierre. A cette fin, la solution traditionnelle est de
bâtir des murs assez épais pour compenser la
poussée oblique d'une voûte longitudinale. Et
de garantir la robustesse de l'ensemble en ne perçant
que des petites ouvertures dans les murs. D'où le manque
de lumière et... le peu d'intérêt porté
aux vitraux.
La solution apportée par les architectes de Tournus
est tout autre. L'abbatiale a été la proie d'un
incendie en 1007. À cette époque, la couverture
de l'édifice ne devait être qu'une charpente
en bois, aisément détruite par le feu. Pour
sa reconstruction, on opta évidemment pour une voûte
en pierre. Mais la bâtir en
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berceau de forme longitudinale
aurait créé une poussée trop importante
sur les hauts piliers. On décida de profiter de la
solidité du narthex, à l'ouest, pour construire
une succession de voûtes transversales, prenant
appui les unes sur les autres, comme les piles d'un pont.
Ce qui permit d'éclairer la nef centrale et les collatéraux
avec de grandes fenêtres. A l'est, en revanche, il fallut
rebâtir le chur avec une coupole adéquate
car le chur primitif, conçu pour une église
avec un toit en charpente, ne convenait pas du tout.
Ce type de voûtement (qui devait prendre plus de temps
à bâtir que la traditionnelle voûte longitudinale)
ne s'est pas répandu. Le seul autre cas connu est celui
de l'église rurale du Mont Saint-Vincent, également
en Bourgogne.
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Bas-côté sud.
Il se termine, au fond, sur la chapelle Saint-Michel,
sa porte et ses fenêtres.
Dans la partie gauche de la photo : la chapelle Notre-Dame la Brune.
Chapelle gothique Notre-Dame la Brune et ses fresques ---»»» |
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Notre-Dame la Brune
Statue en bois de cèdre du XIIe siècle.
En 1793, une habitante l'a cachée chez elle
et ne l'a restituée que sous le Concordat. |
Les vols
de précaution dans les églises.
La France a connu une histoire tumultueuse où
les églises, leurs chefs-d'uvre et leurs trésors
ont été maintes fois menacés. Invasions
normandes, guerre de Cent Ans, guerres de Religion ont connu
leur lot de déprédations et de vols. Plus près
de nous, la Révolution et la Loi de Séparation
de l'Église et de l'État ont conduit aussi les
catholiques pratiquants à craindre pour les biens exposés
dans leur église.
L'abbatiale Saint-Philibert offre le cas d'une paroissienne
zélée (restée inconnue) qui a dérobé
la statue de Notre-Dame la Brune en 1793 pour la soustraire
aux rapines et aux destructions des révolutionnaires.
Elle ne l'a rendue qu'après la signature du Concordat,
quand la sérénité fut revenue dans l'Église
de France.
On pourra se reporter à une histoire similaire survenue
en 1905 à la Grande
Église de Saint-Nicolas-de-Port en Lorraine. La
Loi de Séparation de l'Église et de l'État
et les inventaires qui en découlaient conduisirent
quelques paroissiens, anxieux des confiscations possibles,
à voler douze pièces du trésor parmi
les plus belles. On ne les a retrouvées, intactes,
que vingt-six ans plus tard. Et la vérité sur
l'affaire n'a éclaté que soixante ans après
le vol !
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Le chur de l'abbatiale Saint-Philibert.
Le mobilier du chur a été créé par
l'artiste Goudji en 2000. Dans le médaillon, la colombe en
argent qui domine l'autel (Goudji). |
Prosper
Mérimée à Tournus. En 1846,
sous la Monarchie de Juillet, Prosper Mérimée
est inspecteur général des Monuments historiques.
Il parcourt la France pour relever les monuments importants
qui ont besoin de travaux de restauration. L'écrivain
passe à Tournus en août 1846 et envoie une lettre
d'impression sur l'abbatiale - alors en travaux - à
Ludovic Vitet, président de la commission des Monuments
historiques. On y lit : «Les réparations marchent
avec activité, et m'ont semblé conduites d'une
manière satisfaisante, sauf quelques restaurations
dans le chur ; encore est-ce plutôt le système
de ces réparations que leur exécution qui donne
matière à critique. Vous savez que les colonnes
de l'hémicycle, surtout leurs chapiteaux, étaient
dans le plus triste état. Il y avait, ce me semble,
à choisir entre deux partis. Ou bien de les conserver
(les chapiteaux) tels quels, ou bien d'en faire faire de nouveaux
en plaçant
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les anciens quelque part, comme
pièces de conviction. Au lieu de cela on a relancé
des bouts de pierre, fort adroitement, dans les chapiteaux
susdits ; on les a restaurés comme un reliquaire d'ivoire.
Il y a tel de ces chapiteaux qui a trente- quatre morceaux.
Cela a été exécuté avec beaucoup
d'art ; mais comme pour faire ces raccords il a fallu entamer
les parties antiques, les gratter, etc., il en résulte
qu'on ne peut démontrer l'exactitude de la restauration
et que l'on s'expose aux clabauderies des puristes. A parler
franchement, j'aurais cru ces chapiteaux tout modernes. Cela
prouve l'habileté avec laquelle les pièces ont
été rapportées, mais j'aurais mieux aimé
autre chose.» Source : «La
naissance des Monuments historiques, la correspondance de
Prosper Mérimée avec Ludovic Vitet (1840-1848)»,
CTHS, 1998.
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Élévations romanes dans le sanctuaire. |
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Le chœur et le croisillon sud du transept.
L'orgue de chur est un Cavaillé-Coll de 1864. |

Croisillon nord dans le transept
La petite barrière que l'on voit en bas et au centre
annonce l'entrée de la crypte. |
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LES CHAPELLES
LATÉRALES DANS LA NEF |
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Chapelle des Berzé, fresque du Jugement Dernier après traitement
informatique.
«««--- Vitrail de 1956 : «La Sainte Famille». |

Tableau dans la nef :
«Présentation de Marie au Temple»

Il y a très peu de tableaux exposés dans l'abbatiale
Saint-Philibert. |

Chapelle gothique des «Âmes du Purgatoire». |

Tableau d'un ermite dans la nef. |
Chapelle
des «Âmes du Purgatoire»
Cette chapelle du XVe siècle présente un très
beau retable en bois massif entouré par deux colonnes
torses décorées de pampres (rameaux de vigne
avec feuilles et grappes).
Au premier plan : les fonts baptismaux en marbre noir.
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Coupole de la croisée du transept et ses piliers romans (XIIe siècle). |

Les piliers et les ornementations de la coupole de la croisée du transept.
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Le déambulatoire et ses chapiteaux romans à feuillages variés. |

Déambulatoire, chapelle du curé d'Ars. |

Déambulatoire
Mosaïques de l'époque romane sur le sol. |

Vitrail moderne polychrome de l'abside |

La madone de Csurgó. |
En 2000-2001, des travaux dans
le déambulatoire ont mis à jour des mosaïques
romanes qui étaient recouvertes d'un dallage
depuis le XVIIIe siècle. Ces mosaïques parcouraient
l'abside et représentent le zodiaque.
Elles datent vraisemblablement du XIIe siècle. Une
partie est aménagée pour les visiteurs.
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La Madone
de Csurgó. Cette magnifique madone, exposée
dans une chapelle rayonnante du déambulatoire, est
une uvre offerte en 2009 par la Hongrie. On lit dans
le document de donation (affiché au mur) : «Le
27 septembre 2009, la madone de Csurgó est donnée
à l'abbaye Saint-Philibert et devient sa propriété
et celle des citoyens de la ville de Tournus
avec son piédestal en pierre taillée. Cette
date est celle du centenaire de son auteur : Amerigo Tot,
grand sculpteur hongrois. Le 11 octobre 2009, la statue est
installée à la vue de tous les visiteurs pour
qu'ils reçoivent, en message personnel, le témoignage
de sa beauté et de son énergie. Qu'il suscite
l'amour envers eux-mêmes et les autres. Nous espérons
que leur cur sera touché par le rayonnement de
cette uvre hongroise, afin que l'amour qui est dans
nos curs leur soit manifesté plus clairement
que l'Histoire officielle ne l'a fait jusqu'à maintenant.
Qu'ils sachent que parfois le donateur a plus besoin de donner
que l'autre de recevoir. Au nom de chaque donateur hongrois
: Géza et Kornélia Mészaros»
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Chapelle rayonnante dans le déambulatoire. |

Déambulatoire.
Mosaïques du zodiaque sur le sol (les gémeaux pour juin, le
faucheur pour juillet). |
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Chapiteau dans la croisée du transept. |

Chapiteau dans la croisée du transept :
Un damné est emmené par un démon. |

Chapiteau dans la croisée du transept.
Le thème en est l'agriculture. |
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Chapiteau avec feuilles dans le déambulatoire. |

Chapiteaux et frises dans l'abside. |

Chapiteau à feuilles et à fleurs dans le déambulatoire. |
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L'ORGUE DE TRIBUNE
DE 1629 |
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L'orgue de tribune de 1629
Réalisé par Jehan
d'Herville, avec un buffet de Gaspar Simon, il est installé
en nid d'hirondelle sur le mur de la chapelle Saint-Michel.
L'ensemble est soutenu par un Hercule grimaçant (photo
ci-dessous). Il est orné d'anges sur le retable et
de grotesques.
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L'orgue de tribune, la partie gauche du haut du buffet |

L'orgue de tribune, sculpture d'angelots sur le bas du buffet. |

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Les angelots sur le retable.
«««--- À GAUCHE, Hercule soutient le cul-de-lampe
du buffet. |
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Le chauffoir des moines a été aménagé
en musée lapidaire.
Les statues des deux saint patrons de l'église se dressaient
jadis entre les fenêtres du clocher ---»»»
À gauche, Philibert portant la crosse et bénissant.
À droite, Valérien tenant le livre de la Parole et la
palme du martyre. |

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Chauffoir.
Exposition de chapiteaux sur un mur, dont certains représentent
des têtes démoniaques. |

Ancien chapiteau.
Saint Philibert et sa crosse ---»»» |
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La chapelle Saint-Michel est située au-dessus du narthex. La
partie centrale de la photo correspond à la façade ouest.
Haute de 12,50 m, sa voûte est de forme longitudinale en plein
cintre. Ce voûtement est l'un des plus anciens de Bourgogne.
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Bas-côté sud vu de la chapelle Saint-Michel. |

Sculpture d'un visage
et de feuilles. |

Chapelle Saint-Michel.
L'architecture de ses murs a défié les siècles.
À gauche, au bas de la photo, se trouve une porte. Il faut
imaginer un escalier descendant dans la nef.
Une fenêtre permet d'admirer l'architecture des bas-côtés
de l'église. |

Sculpture de bonhomme.

La qualité des sculptures et de l'ornementation
de la chapelle conduit les historiens à penser
qu'une véritable liturgie de tradition
carolingienne se déroulait en ces lieux. |

Vue de la nef et de l'orgue de tribune depuis le chur.
La chaire à prêcher, sur la gauche, date du XIXe siècle.
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Documentation : «Tournus, abbaye Saint-Philibert»,
Éditions Gaud, en vente dans le narthex |
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