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La richesse de l'histoire de Pont-à-Mousson
justifie pleinement la présence d'un musée dans cette
ville. Une première tentative eut lieu vers 1883, mais elle
n'aboutit pas. La seconde tentative se tint bien plus tard, dans
les années 1970. Un très beau livre sur la ville parut
en 1968. Et un spectacle son et lumière, en 1972,
raviva l'importance de l'Université à l'occasion de
son quatre-centième anniversaire. La décision de créer
un musée fut désormais bien arrimée. L'administration
de la ville et les érudits se mirent au travail. Il fallait
trouver un thème, un lieu, un conservateur et... des collections
que l'on voulait bien sûr le plus riche possible.
Le thème s'appuya sur quatre piliers : l'Université
du XVIe siècle et ses archives, l'imagerie
du XIXe siècle et le papier
mâché, également du XIXe siècle.
Le fil directeur en était naturellement le papier. À
la fin des années 1970, la municipalité acheta l'ancien
hôtel de la Monnaie. Pierre Lallemand fut désigné
comme premier conservateur : il avait déjà commencé
à rassembler les premières collections, aidé
en cela par la Société d'!Histoire de Pont-à-Mousson.
Ces acquisitions prirent du temps. En 1995, la municipalité
redonna vigueur à cette idée de musée et décida
du thème final : Au Fil du Papier. De nouvelles acquisitions,
notamment en papier
mâché, vinrent enrichir les premières. Enfin,
le musée ouvrit ses portes le 16 janvier 1999. Depuis lors,
d'anciennes machines de la société Adt, créatrices
d'objets en papier
mâché au XIXe siècle, ont pu être
récupérées. Plus tard, une salle fut aménagée
en hommage à la société industrielle Pont-A-Mousson
SA qui fit la richesse et la renommée internationale
de la ville.
Le musée de Pont-à-Mousson
est la référence européenne en matière
de papier mâché.
Rien que pour l'extravagance de cette matière - et la richesse
des collections du musée, sa visite s'impose à tous
ceux qui, reliant Nancy
à Metz, s'arrêtent à Pont-à-Mousson.
Comment peut-on s'asseoir sur une chaise en papier mâché?
La réponse est donnée par de multiples panneaux explicatifs
dans les différentes salles qui ne laissent aucun détail
dans l'ombre : fabrication, types d'objets, distribution et aspect
social du papier mâché. On se reportera dans cette
page à l'encadré plus
bas.
Dans les salles de l'Histoire de la ville, on trouve un tableau
illustrant l'apothéose
de saint Pierre Fourier. Ce curé de campagne, formé
à l'Université de Pont-à-Mousson, fut un adversaire
déterminé de la politique de Richelieu. Très
connu en Lorraine, il a marqué l'histoire de son pays. Un
long encadré lui est consacré plus
bas.
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L'une des salles du musée consacrées à l'histoire
de Pont-à-Mousson. |
L'entrée du musée rue Magot de Rogéville. |
La cour intérieure de l'hôtel de la Monnaie. |
L'Hôtel
de la Monnaie. C'est un hôtel de style
Renaissance, bâti en 1591. Il a conservé
l'appellation du bâtiment qui l'a précédé.
Pourtant, rien ne prouve qu'on ait jamais battu monnaie
à Pont-à-Mousson. La propriété
était celle de la famille George des Aulnois.
Elle changea de main à la Révolution.
En 1958, elle fut acquise par la coopérative
agricole du Toulois. Et, en 1978, la ville de Pont-à-Mousson
l'acheta pour abriter le futur musée.
L'hôtel est regardé comme l'une des plus
belles constructions édifiées dans la
ville à l'époque de l'Université.
Elle est construite en pierre et ses pièces sont
spacieuses. Les éléments de sculpture
(portail, cheminée et puits) nous rappellent
qu'il existait à Pont-à-Mousson un atelier
de sculpture. Antoine Grata, maître maçon
du duc Charles III en faisait partie.
Source : panneau affiché
dans le musée.
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Ancienne fontaine ou puits
de style classique dans la cour intérieure
de l'hôtel de la Monnaie. |
SALLES DE L'HISTOIRE
DE LA VILLE |
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«L'Apothéose de saint Pierre Fourier», XVIIe
siècle. |
Pierre
Fourier (1/2) est un saint bien connu en
Lorraine, mais quasiment inconnu ailleurs. Né
à Mirecourt en 1565, il suivit pendant six ans
des études d'humanités gréco-latines
à la Faculté des Arts de l'Université
de Pont-à-Mousson.
C'est là qu'il érigea saint Augustin comme
l'un de ses modèles.
À vingt ans, il rejoignit l'ordre des chanoines
réguliers de Saint-Augustin à l'abbaye
de Chaumousey, près d'Épinal.
Notons que, en 1623, il réformera cet ordre,
bien délité, en instituant la Congrégation
de Notre-Sauveur dont il deviendra le supérieur
pour le duché de Lorraine en 1632.
Ordonné prêtre en 1589, il revint à
l'Université de Pont-à- Mousson, mais
cette fois à la Faculté de théologie
et à celle de droit. (À cette époque,
la théologie recouvrait en fait le droit actuel
car canons de l'Église et lois étaient
totalement imbriqués. Le droit, c'était
l'art de gouverner.)
En 1597, il fut nommé à la pauvre cure
de Mattaincourt dans les Vosges, un village réputé
pour être un foyer protestant. En vingt années
de présence, ce pionnier de la Contre-Réforme
réalisa une uvre importante. Connu pour
sa grande piété, il se voua au service
des pauvres : création d'une caisse mutuelle
pour éviter d'emprunter aux usuriers ; système
de collecte et de distribution de vivres ; soupe populaire.
Fait le plus important : il créa, en 1628, avec
sur Alix Le Clerc la Congrégation Notre-Dame
destinée à l'éducation gratuite
des filles. Pierre Fourier est d'ailleurs l'inventeur
de la salle de classe et du tableau noir... Il appelait
les éducatrices à la plus grande tolérance
envers les élèves protestantes et à
ne jamais heurter leur foi. En tant que curé
de Mattaincourt, il fut aussi l'un des administrateurs
de la petite ville où, par délégation
du duc de Lorraine, il rendait la basse et la moyenne
justice.
La pensée politique de Pierre Fourier est un
élément essentiel de sa vie. Elle le plaça
assez rapidement comme opposant notoire à Richelieu
et à son action politique.
Lors de son second séjour à l'Université
de Pont-à-Mousson, il forgea sa ligne politique
: celle de la toute-puissance de la morale dans l'art
de gouverner. Le prince doit travailler au bien commun
; son objectif, c'est le bonheur de son peuple et son
salut. Conséquences : refus de la guerre, rejet
des hérétiques, éducation de la
jeunesse selon les préceptes du Concile de Trente.
C'est l'exact opposé de la morale de Machiavel
pour qui la politique est une technique dans l'art de
parvenir à ses fins, quels qu'en soient les moyens
(duplicité, mensonges, reniements, etc.).
À partir de la nomination à Mattaincourt,
la vie de Pierre Fourier doit être coupée
en deux périodes. D'abord, une période,
plutôt paisible, de 1597 à 1620 : la Lorraine
est catholique ; l'action du curé reste locale.
Dans la seconde, de 1620 à 1640 (année
de sa mort), tout change et tout s'aggrave. La guerre
de Trente Ans a éclaté en 1618. D'abord
conflit localisé, elle va bientôt s'étendre
et ses ravages vont frapper la Lorraine. Sur le plan
politique, cette guerre se traduisait par une question
cruciale : l'Europe allait-elle retrouver son unité
chrétienne? Ou allait-elle se fractionner définitivement
en nations rivales, guidées par le seul intérêt
de la raison d'État? On sait que la France de
Richelieu, en s'alliant avec les princes protestants
d'Allemagne, choisit la seconde solution. La lutte contre
l'encerclement par la maison des Habsbourg était
jugée vitale pour le royaume. La Lorraine catholique
fit, quant à elle, le choix opposé et
rallia la cause de l'Empire, de la catholicité
et du Concile de Trente. Pierre Fourier, déjà
connu en Lorraine par son uvre pieuse, se décida
alors à l'action politique. Il se fit d'abord
le conseiller du Prince, en l'occurrence le duc Charles
IV de Lorraine, qu'il regardait comme le défenseur
de la cité chrétienne. Puis il intervint
dans les événements politiques et s'entremit
notamment dans les mariages princiers. Il fallait en
effet sauvegarder la continuité de la dynastie
car la Lorraine, selon lui, avait reçu de la
Providence la mission de sauver le catholicisme. --»»
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Habit de chur et son ensemble.
Ornement brodé or et argent, XVIIIe siècle. |
Habit
de chur. Cet ensemble comprend une
chasuble, une étole, un manipule, un carton et
un voile de calice. Il a appartenu au père Jean-François
Lallemand, né en 1718, qui fut le dernier abbé
mitré de Sainte-Marie-Majeure de Pont-à-Mousson.
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Paysage champêtre de Jean-Baptiste Claudot (1733-1805). |
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La Vierge des Échevins
Pierre, XVIe siècle. |
Statue de saint Nicolas, pierre. |
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La
Vierge des Échevins est une
statue de pierre du XVIe siècle. À
l'origine, elle portait une couronne, tenait un
sceptre dans la main droite et se trouvait sur
le lieu de l'ancien Hôtel de Ville. Quand
celui-ci déménagea place Duroc (où
il se trouve toujours), elle resta à sa
place : contre un pilier d'angle des arcades,
à l'entrée de l'actuelle rue Pasteur.
À la Révolution, on voulut la briser,
mais le propriétaire de l'immeuble réussit
à la sauver. Sa couronne fut toutefois
supprimée. Quant au sceptre, il fut remplacé
par une pique, symbole, à l'époque,
des combats pour la liberté.
Les arcades furent démolies en 1835 ; la
statue fut alors entreposée dans la cave
du bâtiment. Quand le bâtiment lui-même
fut détruit, elle gagna le cloître
de l'ancien couvent des Minimes. Aujourd'hui,
on peut admirer cette belle statue Renaissance
au musée.
Source : panneau affiché
dans le musée.
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Saint Ignace de Loyola
Bois doré, XVIIIe siècle.
(Provient d'une chapelle de l'Université) |
Saint Pierre Fourier, bois doré, 18e siècle.
(Provient d'une chapelle de l'Université.) |
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«Extase de saint François»
Huile sur toile, anonyme, 1748 |
Statue de saint Laurent. |
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Pierre
Fourier (2/2).
Après 1630, la France accroît sa pression.
Elle confisque le Barrois et envahit la Lorraine. Nancy
est assiégé. Comme le duc de Lorraine,
Charles IV, n'a pas de descendance mâle, Richelieu
veut enlever la princesse Claude (une héritière
directe de la lignée ducale), lui faire épouser
un prince français et annexer, dans la foulée,
Lorraine et Bar. Seule possibilité pour contrer
ce plan : faire abdiquer le duc Charles au profit de
son frère, le cardinal Nicolas-François,
évêque de Toul, puis, comme celui-ci n'a
reçu ni consécration, ni ordination, le
faire se démettre de ses charges, et, revenu
à l'état laïc, lui faire épouser
le plus vite possible sa cousine Claude ! La célérité
est de mise : il s'agit de sauver l'indépendance
nationale ! Selon les historiens, Pierre Fourier se
montra très actif dans la mise au point de ce
plan qui fut élaboré à Mirecourt
en janvier 1634. Le mariage tant attendu eut lieu à
Lunéville dans la nuit du 17 au 18 février,
au moment où les troupes françaises pénétraient
dans la cité... Mais l'épisode ne s'arrêta
pas là. Les jeunes mariés furent arrêtés
sur ordre de Richelieu et ramenés à Nancy.
Grâce à un déguisement, ils purent
s'échapper de la ville, puis gagner la Comté
(la Franche-Comté d'aujourd'hui), puis la Toscane
et les terres d'Empire. Les liens entre l'Espagne, l'Empire
et la Lorraine s'affichaient au grand jour. Par ce mariage
et par les descendants du couple ducal, l'indépendance
de la Lorraine fut assurée pour un siècle.
C'est dans les années 1633-1634 que Pierre Fourier
connut en Lorraine le faîte de sa popularité.
Il est regardé comme le symbole de la résistance
à Richelieu, comme l'incarnation du sentiment
national. Bien que simple curé de campagne, il
disposait d'un large soutien dans l'opinion, notamment
parmi les franciscains de Nancy.
Leurs prêches veillaient à entretenir l'ardeur
patriotique. Des membres du gouvernement lorrain appuyaient
aussi le petit curé de Mattaincourt. Les historiens
se sont même penchés sur de possibles complicités
au sein du royaume de France. En fait, ceux qui détestaient
Richelieu ne pouvaient que le soutenir : la reine Anne
d'Autriche, qui avait gardé tout son amour pour
l'Espagne, appréciait son action sociale ; Gaston,
frère de Louis XIII et grand comploteur devant
l'Éternel, éprouvait de la sympathie pour
lui (Pierre Fourier avec favorisé son mariage
avec la sur du duc de Lorraine, Charles IV).
Enfin, le parti dévot français, hostile
à la politique du cardinal, ne pouvait que soutenir
son action.
Une fois la France entièrement maîtresse
de la Lorraine, Richelieu ordonna à sa police
de se saisir du curé de Mattaincourt par tous
les moyens. Pierre Fourier dut alors agir comme maints
résistants français sous l'Occupation
: éviter les grandes villes, se cacher dans les
abbayes, les sacristies et tous les endroits qui n'attiraient
pas l'attention, se réfugier dans les villages
où le sentiment national lorrain était
puissant, comme Mirecourt ou Saint-Mihiel.
En 1635, le dernier couperet tomba : le roi de France
exigea un serment de fidélité de tout
lorrain exerçant une fonction d'autorité.
Pierre Fourier était supérieur majeur
de sa congrégation ; il ne pouvait y échapper.
Il préféra s'expatrier et se réfugia,
en 1636, en terre espagnole, à Gray
(aujourd'hui en Franche-Comté). C'est là
qu'il mourut en décembre 1640.
En 1648, les traités de Westphalie marquèrent
la fin de la guerre de Trente Ans. L'historien René
Taveneaux écrit que ces traités représentaient
une grave défaite pour l'Église : «ils
marquent le triomphe de la nation indépendante,
sans fondements moraux ni spirituels et dans laquelle
la religion tend à devenir un instrument dans
la main du prince.» Ce que les siècles
suivants vont amplement confirmer.
Au plan historique, Pierre Fourier est dans le camp
des vaincus puisque la politique de Richelieu a triomphé.
Les historiens de la République ont vu en lui
le tenant d'un «nationalisme de clocher»
borné par les frontières de la petite
Lorraine. Richelieu incarnait la grandeur de la France.
S'opposer à lui, c'était vouloir la rapetisser.
C'est pourquoi son souvenir demeure limité au
territoire lorrain. Ailleurs, il reste un inconnu. Il
n'empêche. Ce saint curé porte haut la
lutte contre l'amoralisme en politique.
Voir la chapelle Saint-Pierre Fourier à l'église
Saint-Martin
de Pont-à-Mousson.
Sources : 1) Saint Pierre Fourier
et son temps, Presses Universitaires de Nancy, 1992,
article de René Taveneaux : Saint Pierre Fourier
et la politique son temps ; 2) panneau affiché
dans le musée.
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Lithographie de Pont-à-Mousson avec l'abbaye des Prémontrés
et le pont Gélot
Atelier Victor Fagonde & Élie Haguenthal, 1850-1881. |
Jean-Baptiste
Claudot. Voilà un artiste bien méconnu
et qui réalise pourtant de fort belles toiles
! Peintre lorrain né à Badonviller en
1733, il est mort à Nancy
en 1805. Artiste précoce, il est appelé,
à l'âge de vingt ans, à l'Université
de Pont-à-Mousson
comme professeur de dessin et de peinture par les pères
Jésuites. Il est ensuite remarqué par
Girardet, peintre ordinaire du roi Stanislas. Dans les
compositions du maître, il va s'occuper de la
partie décorative. On le voit en même temps
uvrer pour un portrait du roi de Pologne, pour
les décors de l'Hôtel de ville de Nancy,
enfin pour le dessin du mausolée de Stanislas.
Jean-Baptiste Claudot part ensuite à Paris compléter
sa formation auprès du célèbre
peintre paysagiste Joseph Vernet (1714-1789). Le style
de Vernet est recherché dans toute l'Europe.
Ses marines, qui sont réputées, répondent
à peu près toutes au même schéma
: un port, des vaisseaux, de l'architecture (en ruine
ou pas) et des personnages. Ainsi l'exigeaient ses commanditaires.
Il en peindra plus de mille. Le style de Jean-Baptiste
Claudot rappelle de très près celui de
Vernet. Mais le Lorrain situe ses scènes dans
un cadre champêtre, souvent parmi des ruines,
se rapprochant ainsi d'Hubert Robert, né la même
année que lui. Avec un style si proche de Vernet,
il était logique que Claudot fût sollicité
par les cours européennes. Pourtant il préféra
rentrer en Lorraine dès 1769. Sa carrière
fut évidemment moins brillante que celle dont
il aurait pu jouir auprès d'un monarque. Néanmoins,
riche de l'enseignement parisien, il put exceller dans
les tâches qui lui furent confiées. On
le verra ainsi à l'uvre pour des bâtiments
officiels de Nancy
et pour la décoration de nombreuses maisons et
églises de cette même ville.
Source : panneau affiché
dans le musée.
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«Scène pastorale dans un paysage en ruine»»
par Jean-Baptiste Claudot (1733-1805). |
Scène pastorale par Jean-Baptiste Claudot (1733-1805). |
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Paysage champêtre de Jean-Baptiste Claudot (1733-1805),
détail.
Ancien élève de Joseph Vernet, Claudot a représenté
ici un enfant qui désigne quelque chose
du doigt, une posture que l'on voit bien souvent dans les tableaux
de Vernet. |
Lithographie de Pont-à-Mousson avec le pont Gélot et
l'église Saint-Martin.
Atelier Victor Fagonde & Élie Haguenthal, 1850-1881. |
«Pont-à-Mousson», eau-forte de Roger Marage,
1985. |
«««---
À GAUCHE
Paysage romantique avec étang et château
par Jean-Baptiste Claudot (1733-1805). |
|
«Les Prémontrés
et la Moselle», eau-forte de Roger Marage, 1978. |
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Salle de l'Imagerie. |
Image de la série des Grosses Têtes, XIXe siècle. |
L'imagerie.
Cette industrie est née à Pont-à-Mousson
en 1848. Elle utilisait uniquement la lithographie et fut
un rival sérieux aux images d'Épinal. Le premier
atelier fut créé par Élie Haguenthal,
associé à l'artiste Victor Fagonde qui
eut ainsi l'occasion d'exercer tout son talent et de susciter
l'admiration par la finesse de ses dessins.
Les thèmes illustrés sont avant tout ceux de
l'histoire contemporaine : Second Empire, guerre de 1870,
épisodes de la colonisation en Afrique et en Asie.
Des albums de paysages mettaient en avant la géographie
de la France, souvent dans des scènes assez bucoliques.
Des séries enfantines complétaient l'ensemble,
axées sur l'Histoire nationale ou sur des contes moraux.
Source : Guide des collections du musée.
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Une salle du papier mâché avec buffets et fauteuils. |
Le
papier mâché 1/4. C'est
indiscutablement la partie phare du musée. Il
a fallu de longues années pour rassembler les
collections qui sont présentées. L'une
des dernières acquisitions est le magnifique
salon
de la reine Victoria avec canapé et fauteuils
somptueusement décorés.
La technique du papier mâché est très
ancienne. Elle arrive à Pont-à-Mousson
avec la famille Adt en 1872. Cette famille possédait
déjà une première manufacture de
papier mâché en Sarre au début du
XIXe siècle. Elle s'implante en Moselle, à
Forbach, en 1853. Après la défaite de
1871 face à la Prusse, Forbach se retrouve en
zone annexée. Les frères Adt s'installent
alors à Pont-à-Mousson : il y avait l'eau
de la Moselle, indispensable pour cette industrie, et
les fonderies de l'entreprise Pont-A-Mousson SA.
On espérait que les épouses des travailleurs
du fer viendraient se faire embaucher dans la fabrique
de papier mâché qui proposait un travail
nettement plus minutieux... En 1914-18, Pont-à-Mousson,
quasiment ville frontière, est au plus fort des
combats. Les Adt vont perdre la majorité de leur
patrimoine. Au XXe siècle, de nouvelles firmes
sont créées et l'activité se diversifie
(cartonnage, tubes isolants et matériels plastiques
industriels).
Qu'en est-il de la fabrication? Comment peut-on s'asseoir
dans un fauteuil en papier mâché? Cet étrange
matériau est issu à la base de papiers
de récupération, de vieux chiffons, voire
de paille. Le tout est trié, lavé, broyé,
puis mis à tremper dans de l'eau douce, tout
en étant malaxé. Avec une pile hollandaise
(machine de l'industrie papetière), le mélange
est brassé, les fibres sont coupées. Une
dernière machine transforme la pulpe obtenue
en feuilles dont l'eau est éliminée par
aspiration. Cette feuille s'enroule ensuite autour d'un
cylindre, ce qui permet d'obtenir l'épaisseur
de carton désirée. Ce carton est enfin
passé dans un laminoir pour en comprimer les
fibres.
Vient la mise en forme des pièces. Les éléments
sont créés à l'aide de gabarit,
puis assemblés. Pour les pièces plus lourdes,
on procède par estampage du carton dans des moules
chauffés. Les objets sont ensuite laissés
à sécher. Dernière étape
: ces objets peuvent être durcis et rendus imperméables
par trempage dans un bain d'huile cuite. Une fois secs,
ils passent entre les mains des peintres décorateurs.
Détail pratique pour les objets vernis en papier
mâché que le visiteur peut acheter à
la boutique du musée : en vieillissant, le vernis
a tendance à se craqueler (comme sur les tableaux).
Les produits d'entretien (et surtout l'eau) sont à
proscrire. Il faut se contenter de les nettoyer avec
un chiffon sec.
Revenons à ce qui surprend le plus le visiteur
du --»» 2/4
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Partie supérieure d'un guéridon à bascule
ornée d'un décor romantique.
Ateliers Adt, fin du XIXe siècle. |
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Coffre, tables et guéridons à bascule en papier
mâché. |
L'Opéra de Paris.
Vide-poche en papier mâché. |
L'Arc de triomphe.
Vide-poche en papier mâché. |
Le
papier mâché 2/4. --»»
musée : les sièges. En papier mâché,
ils sont aussi solides que ceux en bois ou en fer. En
fait, d'après le Guide des collections du
musée, les pieds, jusqu'à l'assise,
sont souvent en bois noirci. Inutile d'utiliser le papier
mâché pour des formes aussi simples. En
revanche, pour obtenir des pieds aux formes rondes très
chantournées, le papier mâché est
plus rapide et plus économe que le bois ou le
fer. Le papier est tout simplement pressé selon
la forme voulue. Quant à sa résistance,
elle vient de la pression fournie. Le lecteur aura donc
compris que l'intérêt du papier mâché
est la facilité avec laquelle on crée
des formes complexes, formes qui demeurent plus longues
et plus difficiles à obtenir à partir
d'autres matériaux (bois ou fer). Pour terminer
avec les sièges, ajoutons que les dossiers et
les accoudoirs, souvent très élaborés,
relevaient exclusivement de la technique du papier mâché.
Voir plus
bas des photos de chaises et de fauteuils.
Au XIXe siècle, tous les objets imaginables ou
presque ont été reproduits en papier mâché.
La qualité était au rendez-vous. L'entreprise
Adt obtint même un grand prix lors de l'Exposition
universelle de 1889 dans la rubrique de la tabletterie
en papier mâché. Dans la fabrication, les
tabatières, boutons et objets à usage
domestique furent chronologiquement suivis par des objets
industriels : panneaux pour véhicules de transport,
articles pour la chirurgie, la pharmacie et la photographie,
baraquements, maisons démontables, etc. En 1900,
nouveau grand prix récompensant la diversification
dans les isolants électriques car le papier mâché
était un merveilleux isolant. --»»
3/4
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Vases décoratifs, chaise et guéridon à bascule,
ateliers Adt, vers 1880-1890. |
Objets divers en papier mâché.
Ateliers Adt. |
Paravent, table et chaises en papier mâché, ateliers
Adt. |
«Travailleuses», Atelier Adt
Vers 1890-1900. |
Chaise, fauteuil, «travailleuse» et guéridons en
papier mâché. |
Fauteuil du «salon de la reine Victoria» en papier mâché. |
Secrétaire en papier mâché.
Ateliers Adt. |
Fauteuils et canapé du «salon de la reine Victoria».
Ce salon a été acquis pour les collections du
musée en 1995. Le musée a ouvert en 1999. |
Le
papier mâché 3/4. --»»
Pourquoi ce succès du papier mâché
au XIXe siècle? Dans le Guide des collections
du musée, Claudine Cartier, conservateur
en chef à l'inspection générale
des musées, nous livre une analyse sociologique
intéressante de l'objet, analyse que la famille
Adt semblait avoir parfaitement comprise. Les objets
qui ont une utilité évidente sont souvent
d'apparence austère ; à côté
de cela, il y a les objets qui paraissent moins utiles
et qui sont souvent décorés, voire luxueux.
Ces derniers servent évidemment de miroir social.
«Au XIXe siècle, on ne possède plus
un objet parce que l'on appartient à telle ou
telle catégorie sociale, écrit Claudine
Cartier, mais, au contraire, le fait de le posséder
fait entrer dans un certain milieu.» Dans les
années 1820, la petite et moyenne bourgeoisie
se révèle. Les Adt vont surfer sur la
vague et offrir à cette bourgeoisie parisienne
et provinciale le rêve du luxe ou du «faux-luxe
à moindre prix». Exit la préciosité.
Pour être --»»
4/4
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Une salle des objets en papier mâché. |
Le
papier mâché 4/4. --»»
à la mode, il faut posséder des objets
à l'ornementation fine et soignée. Boîtes,
corbeilles, plateaux, vide-poches, buffets, petits meubles,
matériel pour fumeur, tout cela est décoré
de motifs japonisants incrustés de nacre, d'ivoire,
d'étain ou d'argent. Montrer ces objets, c'est
afficher son statut social. Les grands magasins parisiens
seront rapidement aux premières loges pour les
diffuser en France, à l'étranger et dans
les colonies.
Au XXe siècle, la tendance se retourne. La décoration
va se banaliser par l'utilisation de la décalcomanie,
voire carrément disparaître au profit d'objets
purement utilitaires ou publicitaires. L'entreprise
Adt ne réussira pas à se reconvertir,
pour ce qui est des objets du quotidien, vers ce nouveau
matériau que sera le plastique. Celui-ci va pratiquement
assurer la totalité de la fabrication de ces
objets.
Source : Musée au fil
du Papier, Guide des collections, article de Claudine
Cartier : «Le papier mâché, une industrie
du XIXe siècle».
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Buffet des ateliers Adt, vers 1850-1865.
La structure du meuble est en bois.
La somptueuse décoration est en papier mâché. |
Documentation : Musée Au Fil du Papier
(guide des collections vendu à la boutique du musée)
+ Saint Pierre Fourier et son temps, Presses Universitaires
de Nancy, 1992
+ divers panneaux affichés dans le musée. |
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