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Page créée en fév 2017
Jessé dans l'Arbre de Jessé du XIXe siècle

La Réole a une position géographique cruciale le long de la Garonne, ce qui lui voudra d'être assiégée à de nombreuses reprises. C'est aussi une voie de passage pour les voyageurs venant du nord, en particulier les pèlerins partis de Limoges et qui cheminent vers Saint-Jacques de Compostelle. Pour ce qui est du monastère, certaines sources parlent d'un prieuré au VIIIe siècle, mais la critique historique actuelle opte pour l'an 977. De cette année-là date la fondation du prieuré Saint-Pierre et son rattachement à la règle de Saint-Benoît et à Fleury-sur-Loire. C'est une époque où la Gascogne voit se multiplier les abbayes bénédictines et... le relâchement de leurs mœurs. À La Réole, l'abbé de Fleury, Abbon, s'en vint par deux fois sermonner les moines sur leur vie dissolue. La seconde fois, en 1004, ils l'assassinèrent.
L'église actuelle fait suite à une première église priorale, sans doute de la fin du Xe siècle, détruite sur ordre d'Henri II Plantagenêt afin de laisser la place à un futur château fort. L'édifice que l'on voit aujourd'hui date donc de la fin du XIIe siècle et du début du XIIIe. C'est une époque de transition architecturale : le roman va être abandonné peu à peu au profit du gothique. En attendant, Saint-Pierre, comme d'autres bâtiments de l'époque, va recevoir une empreinte mêlant le roman tardif et le premier gothique. À ce titre, c'est un monument de première importance. D'une longueur de 85 mètres, il n'a qu'une nef unique. Son chevet est voûté de pierre, la nef est abritée par une charpente. Vers le milieu du XIIIe siècle, à la suite d'une rébellion contre Simon de Montfort, il perd ses deux travées occidentales qu'il ne retrouvera jamais (voir encadré). Au XIVe, deux croisillons sont rajoutés au nord et au sud. En 1574, les huguenots saccagent l'église et mettent le feu au mobilier en bois, ce qui fait brûler la charpente. Elle sera reconstruite.
En 1680, les Mauristes prennent en charge le prieuré, bien délabré, et l'église. Ils se lancent dans de grands travaux : les bâtiments monastiques sont entièrement reconstruits, tandis qu'une réfection partielle est menée dans l'église, doublée d'un embellissement interne au XVIIIe siècle. À Révolution, les moines sont chassés ; l'église est désaffectée. Rendue au culte au début du XIXe, elle perdra tout son mobilier (surtout au profit de la cathédrale de Bordeaux) et ne sera plus qu'une annexe de l'église paroissiale Saint-Michel. En 1839, cette dernière sera détruite pour faire place à une prison. Saint-Pierre sera alors l'église paroissiale de La Réole. Une série de vitraux viendra l'embellir après 1840.
On donne, en bas de page, des photographies des bâtiments monastiques construits par les Mauristes au XVIIIe siècle. Ils ont tous été récupérés par l'Administration (mairie, gendarmerie et palais de justice).

Saint Abbon dans une verrière du XIXe siècle
Vue d'ensemble de la nef de l'église Saint-Pierre.
Vue d'ensemble de la nef de l'église Saint-Pierre.
Fin du XIIe - début du XIIIe siècle.
La voûte sexpartite de la nef date de la fin du XVIIe siècle, celle du sanctuaire du début du XIIIe.
Paysage de la Réole avec l'église (paysage vu depuis le pont sur la Garonne).
Paysage de la Réole avec l'église (paysage vu depuis le pont sur la Garonne).
Le chevet de l'église Saint-Pierre
Le chevet de l'église Saint-Pierre
(fin du XIIe - début du XIIIe siècle).
Le clocher (XIXe siècle) et le portail nord.
Le clocher (XIXe siècle) et le portail nord.

Le clocher de l'église Saint-Pierre a été construit lors de la reprise en main du monastère par les Mauristes à partir de 1680 (sans la partie terminale). Tout a été reconstruit au XIXe siècle.

Arcature en tiers–point au–dessus des fenêtres de l'abside (fin du XIIe – début du XIIIe siècle).
Arcature en tiers-point au-dessus des fenêtres de l'abside (fin du XIIe - début du XIIIe siècle).
Elle est ornée d'une suite de consoles à masques, souvenir de l'époque romane.
Plan de l'église Saint-Pierre de La Réole.
Plan de l'église Saint-Pierre de La Réole.
Le cloître et la façade occidentale.
Le cloître et la façade occidentale.
La rose, dans le mur, date de l'époque mauriste.
Statue de saint Pierre (moderne) et boiseries du XVIIe siècle en bas–relief sur le portail nord.
Statue de saint Pierre (moderne) et boiseries du XVIIe siècle en bas-relief sur le portail nord.

Le plan de l'église Saint-Pierre. Les élévations nord et sud remontent à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle. À cette date, seul le chevet est voûté de pierre. Les piles de la nef alternent le fort et le faible, ce qui indique le choix d'une voûte sexpartite. (Au début du XIIIe siècle, ce type de voûte commencera à céder la place à la voûte quadripartite.) Les croisillons nord et sud ont vraisemblablement été ajoutés au début XIVe siècle, quand deux cardinaux issus de l'entourage du pape Clément V furent à la tête du prieuré. Après 1680, les Mauristes voûtèrent la nef de pierre selon le plan original d'une voûte sexpartite (complètement passé de mode à cette époque.) et fermèrent la cloison occidentale.
Source : Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, 145e session, article sur l'église Saint-Pierre par Jacques Gardelles.

Le portail nord date du XIVe siècle.
Le portail nord date du XIVe siècle.

Le portail nord date du XIVe siècle. Il a été créé en style flamboyant. Pour l'historien Gabriel Loirette, il ne semble pas qu'il ait jamais été pourvu de statues sur les socles et contre les pieds-droits. La porte est du XVIIe siècle. Sur le trumeau, la statue de saint Pierre est moderne. Ce portail a été détruit par les troupes protestantes de Fabas en 1577.
Source : Congrès archéologique de France tenu à Bordeaux et à Bayonne en 1939, 102e session, article sur l'église Saint-Pierre par Gabriel Loirette.

Les deux travées occidentales disparues. Dans son article sur l'église Saint-Pierre rédigé à l'occasion du Congrès archéologique de 1939, l'historien Gabriel Loirette fait remarquer que la nef est trop large pour sa longueur (38 mètres sur 16 mètres). L'édifice a donc dû posséder deux travées de plus à l'ouest. Quand ces travées ont-elles été détruites? La question, passionnante pour ce qui est de l'histoire de l'édifice, intéresse à la fois historiens et archéologues. Deux solutions se présentent : 1) après 1254 et sur ordre d'Henri III, roi d'Angleterre ; ou 2) en 1577 par les protestants de Jean Geneste de Fabas, l'un des chefs du parti calviniste. L'historien Jacques Gardelles, dans son article sur l'église Saint-Pierre rédigé lors du Congrès archéologique de 1987, écrit que, en 1254, «les bourgeois, alliés aux nobles gascons révoltés contre les excès commis par Simon de Montfort, comte de Leicester et sénéchal du roi d'Angleterre [Henri III], purent s'emparer du château en utilisant les hautes structures de l'église, qui commandaient à l'est l'assiette de la forteresse.» Gabriel Loirette, de son côté, ne parle que d'un bombardement du château depuis le toit de l'église.
Toujours est-il que le roi ordonna de démolir en partie l'édifice menaçant et offrit une compensation pécuniaire (qui d'ailleurs tarda à venir) : c'est la thèse présentée par Jacques Gardelles en 1987. Gabriel Loirette, en 1939, préfère privilégier la destruction par les troupes protestantes du chef calviniste Fabas en 1577. Il s'appuie pour cela sur le fait que le mur occidental (avec sa rose) n'a été élevé qu'au début du XVIIe siècle. En fait, Jacques Gardelles, en 1987, donne la clé de l'énigme grâce à un plan dressé par les moines Mauristes avant l'année 1682, année qui marque le début des travaux de reconstruction. (Pour ce qui est de l'église, cette reconstruction sera d'ailleurs très partielle.) On voit sur ce plan (reproduit en partie ci-contre) que les élévations nord et sud de ces travées disparues sont bel et bien présentes et qu'elles prolongent les murs gouttereaux actuels. Il précise qu'elles étaient assez élevées pour que des bâtiments annexes puissent s'y adosser (ils sont d'ailleurs dessinés sur le plan). On comprend donc que l'ordre de destruction partielle d'Henri III n'a concerné que la charpente qui couvrait la nef disparue. Cette partie sans toit est restée vide et à l'air libre pendant plusieurs siècles : du milieu du XIIIe jusqu'à la fin du XVIIe.
Quant au mur occidental actuel, il était déjà présent à l'arrivée des Mauristes. Toutefois, si l'on en croit le plan, il était percé d'un passage en son centre. Ce passage desservait ce qui est aujourd'hui la travée occidentale, utilisée à l'époque comme caves et greniers. Un mur séparait cette travée du reste de la nef. Les Mauristes auraient donc cassé ce dernier mur pour agrandir la nef (en supprimant caves et greniers) et fermé la paroi occidentale.
Sources : 1) Congrès archéologique de France tenu à Bordeaux et à Bayonne en 1939, 102e session, article sur l'église Saint-Pierre par Gabriel Loirette ; 2) Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, 145e session, article sur l'église Saint-Pierre par Jacques Gardelles.

Le cloître du prieuré Saint-Pierre (début du XVIIIe  siècle).
Le cloître du prieuré Saint-Pierre (début du XVIIIe siècle).
Voir le développement sur le prieuré plus bas.
Plan de l'église dressé par les Mauristes avant 1682.
Plan de l'église dressé par les Mauristes avant 1682.
Les restes du château des Quate-Sos de La Réole.
Les restes du château des Quate-Sos de La Réole.
Au centre, la tour sud-ouest dite «La Thomasse».

Le château des Quate-Sos de la Réole a vraisemblablement été érigé à l'initiative de Richard Cœur de Lion, vers la fin du XIIe siècle. Dominant la Garonne, il possédait quatre tours (appelées les Quatre-Sœurs - Quate-Sos en gascon) et barrait le passage à toute armée qui désirait, venant de l'Est, envahir le Bordelais. Ce château-fort fut une pièce essentielle de la défense de la ville lors des nombreux sièges que la Réole eut à soutenir au cours de son histoire. Les sièges de 1224 et 1253 l'endommagèrent d'ailleurs fortement et il dut être presque complètement reconstruit dans la seconde moitié du XIIIe siècle.
Il est intéressant de connaître ce qu'il se passa lorsque, le 4 janvier 1629, Louis XIII signa la lettre patente qui ordonnait la destruction du château. À cette époque, il était habité par la veuve du maréchal de Roquelaure, ancien gouverneur de la ville, et sa famille. Les soldats qui gardaient la forteresse refusèrent de la rendre. Le duc d'Épernon, chargé d'exécuter la sentence, dut employer la force. Le 13 janvier, le duc fit réunir toutes les troupes disponibles, bien décidé à faire un exemple. On installa deux canons contre le donjon, là où se trouvait le pont-levis ; et l'on sapa les murailles. Les barricades allaient être enfoncées quand, le 30 janvier, deux voûtes d'une tour d'angle sautèrent. Alors les assiégés ouvrirent les portes et se rendirent sans conditions. Tout à sa colère, le duc d'Épernon fit venir une troupe d'archers, commandée par le vice-sénéchal de Guyenne, pour exécuter les prisonniers. Les armes et les munitions furent saisies et les travaux de démolition commencèrent. La dame de Roquelaure essaya bien, peu après, de s'opposer ---»» suite à gauche

---»»» à la suite de la destruction, mais le duc d'Épernon passa outre. Néanmoins, il fallut attendre vingt ans pour que le château soit totalement démantelé. Il ne fut pas rasé, comme tant d'autres, victimes de la vindicte de Richelieu : les deux tours qui font face à la rivière subsistent encore.
Source : Notice historique et statistique de La Réole, suivie de détails historiques sur les diverses communes de l'arrondissement qui renferment des monuments, des antiquités et des curiosités remarquables par M. Ml Dupin - 1839 (disponible sur Gallica.fr)

Le château des Quate-Sos, le côté ouest ---»»»
LA NEF DE L'ÉGLISE SAINT-PIERRE
Vue de la nef et de son côté nord avec l'abside (fin du XIIe  - début du XIIIe siècle)
Vue de la nef et de son côté nord avec l'abside (fin du XIIe - début du XIIIe siècle)
Cette belle architecture d'église accuse donc huit siècles d'existence.
La voûte sexpartite date de l'époque mauriste (fin du XVIIe siècle), sauf celle du chœur qui est du XIIIe.
Vitrail de saint Abbon
Vitrail de saint Abbon
XIXe siècle (après 1840).
Ainsi se présentent les vitraux à grands
personnages qui parcourent la nef.
Vitrail de saint Ferdinand roi, détail.
Vitrail de saint Ferdinand roi, détail.
XIXe siècle (après 1840)
Vitrail de saint Bernard, détail.
Vitrail de saint Bernard, détail.
XIXe siècle (après 1840)

Architecture. Le visiteur ne peut être qu'admiratif devant la remarquable architecture interne de l'église Saint-Pierre. L'édifice est très large pour sa longueur : deux travées ont été supprimées au cours des siècles (voir encadré plus haut). Saint-Pierre s'inscrit dans la transition entre le roman tardif (reconnaissable aux chapiteaux) et le premier gothique du début du XIIIe siècle. L'œil averti reconnaît immédiatement, dans la nef, l'alternance pile forte - pile faible. Le nombre de faisceaux de colonnettes parle de lui-même. Cette alternance correspond aux piliers d'une voûte sexpartite. Au début du XIIIe siècle, seul le chevet est voûté de pierre. Le reste reçoit une simple charpente. Donc l'alternance fort-faible ne sert pas. Au XIVe siècle, on peut donc ajouter deux croisillons au nord et au sud afin de créer un pseudo-transept, sans se soucier du poids qui va venir peser sur les élévations.
Lors des guerres de Religion, les huguenots brûlent la charpente, qui est rebâtie ensuite. Quand les Mauristes prennent en main le monastère (vers 1680), ils décident de voûter la nef. Quelques travaux sont alors nécessaires pour récupérer la fameuse alternance dans toute la nef. Jacques Gardelles fait remarquer que, au XVIIIe siècle, un architecte a peut-être fait disparaître la pile faible de la grande arcade du transept. En effet, un dessin daté de 1841 ne montre qu'une seule grande arcade à l'entrée des croisillons, mais on voit bien «au-dessus du sommet du grand arc unique, le sommet d'une pile faible à chapiteaux nus, telle que celles qui ont été alors mises en place le long de la nef.»
Source : Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, article sur l'église Saint-Pierre par Jacques Gardelles.

Très beau Christ en croix sur l'élévation nord.
Très beau Christ en croix sur l'élévation nord.
Le Christ est entouré de la lance du soldat Longin (qui lui perça le flanc)
et de la pique qui tenait le morceau d'éponge imbibé de vinaigre.
La voûte sexpartite de l'église date de la fin du XVIIe siècle.
La voûte sexpartite de l'église date de la fin du XVIIe siècle.
Celle du chœur est du XIIIe siècle.

L'éponge et le vinaigre. Dans les récits de la Passion, un soldat romain tend au Christ crucifié une éponge imbibée de vinaigre. On présente souvent cet épisode comme une torture supplémentaire infligée au condamné, voire comme un geste visant à abréger ses souffrances. Dans son ouvrage Quand la science explore l'histoire, le médecin légiste Philippe Charlier rappelle (page 99) que le vinaigre doit au contraire être regardé comme une marque de «déférence», plutôt que de «mépris». En effet, le traitement des eaux usées, souillées par des déchets de toute nature, était inconnu dans l'Antiquité. Mettant les pieds dans le plat, Philippe Charlier parle ainsi du «péril fécal», toujours là pour tuer les gens d'une fièvre typhoïde. L'eau était donc impropre à la consommation et l'on utilisait du vinaigre pour essayer de la décontaminer. Source : Quand la science explore l'histoire de Philippe Charlier avec David Alliot, Éditions Tallandier.

«Le Mariage de la Vierge» par Juan de Baldes, 3e quart du XVIIe siècle.
«Le Mariage de la Vierge» par Juan de Baldes, 3e quart du XVIIe siècle.
Statue moderne de don Bosco.
Statue moderne de don Bosco.
«L'Adoration des bergers»
«L'Adoration des bergers»
XVIIe siècle, auteur anonyme.
Vitrail de saint Abbon, détail.
Vitrail de saint Abbon, détail.
(XIXe siècle, après 1840)
Le côté nord de l'église avec le double passage vers la chapelle Notre–Dame (XIVe siècle).
Le côté nord de l'église avec le double passage vers la chapelle Notre-Dame (XIVe siècle).
Chemin de croix (XIXe ou XXe siècle?)
Chemin de croix (XIXe ou XXe siècle?)
Station 1 : Jésus est condamné.
«La Vierge offrant le Rosaire à saint Dominique et sainte Jeanne de Chantal»
«La Vierge offrant le Rosaire à saint Dominique et sainte
Jeanne de Chantal», auteur anonyme, XVIIIe siècle?
La chaire à prêcher : la cuve et ses beaux placages de marbre.
La chaire à prêcher : la cuve et ses beaux placages de marbre.
Vitrail de sainte Catherine d'Alexandrie, détail.
Vitrail de sainte Catherine d'Alexandrie, détail.
XIXe siècle (après 1840).

Les chapiteaux de l'église relèvent de plusieurs époques. Les plus intéressants et les plus beaux sont ceux de la 3e travée (vers le mur occidental). Pour l'historien Jacques Gardelles, les sculptures qu'ils accueillent sont à replacer dans une époque de transition entre le roman tardif et le gothique du début du XIIIe siècle. Il décrit ainsi les chapiteaux dans son article au Congrès archéologique de 1987 : «Tantôt les corbeilles, entourées de feuillages peu différenciés, épais et découpés sur leurs bords, laissent voir à leurs angles des protomes humains ou monstrueux, tantôt le corps du chapiteau est remplacé par une hure énorme, "gros masque" grimaçant ou "glouton", absorbant le fût entier de la colonne.» Les quatre photographies des chapiteaux de la nef qui sont données ici illustrent cette description.
Dans les travées I et II, les corbeilles des chapiteaux sont nues (comme le chapiteau central de la photo ci-dessous). Jacques Gardelles les fait remonter à la fin du XVIIe siècle. Leur intérêt artistique est inexistant.
À l'entrée du chevet, la tradition romane réapparaît timidement tandis que, dans le chevet lui-même, c'est le style gothique septentrional du premier tiers du XIIIe siècle qui est à l'honneur : astragale en larmier surmontée d'une rangée de crochets identiques (voir photo). Mais, au-dessus, les hauts tailloirs (qui sont coiffés d'une tablette rectiligne) n'appartiennent pas vraiment à la même école.
Selon Jacques Gardelles, cette diversité dans les chapiteaux (ceux de la nef étant associés à une longue coursière) font penser que l'ornementation de Saint-Pierre ne se rattache pas seulement au milieu français, champenois ou picard. Il faut au contraire y voir le lieu où s'est élaboré un style gothique méridional avant même son implantation dans le Midi languedocien. C'est une des raisons qui font que l'église Saint-Pierre de La Réole présente un très grand intérêt.
Source : Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, 145e session, article sur l'église Saint-Pierre par Jacques Gardelles.

Chapiteaux du roman tardif dans la nef (aux alentours de 1200).
Chapiteaux du roman tardif dans la nef (aux alentours de 1200).
On voit, à l'extrême-droite, le «"glouton" qui absorbe le fût entier de la colonne» (Jacques Gardelles).
La chaire à prêcher, en bois précieux recouvert de beaux placages
La chaire à prêcher, en bois précieux recouvert de beaux placages
de marbre, vient de l'ancienne église Saint-Michel,
détruite vers 1840 pour construire une prison.
L'archange saint Michel sur l'abat-son de la chaire à prêcher.
L'archange saint Michel sur l'abat-son de la chaire à prêcher.
Chapiteaux du roman tardif dans la troisième travée de la nef.
Chapiteaux du roman tardif dans la troisième travée de la nef.
Chapiteaux du chevet
Chapiteaux du chevet
On retouve le style gothique septentrional du 1er tiers du XIIIe siècle.
Chapiteaux du roman tardif dans la nef
Chapiteaux du roman tardif dans la nef
(Arcade du côté sud).
Chapiteaux du roman tardif sur la façade occidentale nord : dragon,  sirènes et énorme masque.
Chapiteaux du roman tardif sur la façade occidentale nord : dragon, sirènes et énorme masque.
Statue de saint Abbon, abbé de Fleury
Statue de saint Abbon, abbé de Fleury,
martyr à La Réole en 1004.

Saint Abbon. Comme souvent, dans ces temps reculés du Moyen Âge, les moines, oubliant leurs vœux et leurs devoirs, menaient joyeuse vie. Ceux du prieuré Saint-Pierre à La Réole ne faisaient pas exception.
Au Xe siècle, Abbon, le saint abbé de Fleury-sur-Loire, voulait mettre en place la réforme clunisienne dans tous les monastères dépendant de Fleury. Il vint une première fois à La Réole rappeler à l'ordre les religieux gascons. Ce fut peine perdue. Les mauvaises habitudes reprirent de plus belle. Aussi Abbon décida-t-il de revenir en 1004, mais, cette fois, les moines rebelles l'assassinèrent.

L'agneau pascal sur une clé de voûte.
L'agneau pascal sur une clé de voûte.
Les clés de saint Pierre sur une clé de voûte.
Les clés de saint Pierre sur une clé de voûte.
«Saint Abbon et saint Maur»
«Saint Abbon et saint Maur»
Auteur anonyme, XVIIIe siècle?
Vitrail de saint Louis, partiel
Vitrail de saint Louis, partiel
XIXe siècle (après 1840)
Élévation nord avec le croisillon du transept.
Élévation nord avec le croisillon du transept.
«La Cène»
«La Cène»
Auteur anonyme, XVIIIe siècle?
Vitrail de sainte Cécile
Vitrail de sainte Cécile
XIXe siècle (après 1840).
Le côté sud avec le chœur.
Le côté sud avec le chœur.
On n'oubliera pas de jeter un petit coup d'œil sur les chapiteaux (cf encadré plus haut).
LES CROISILLONS DU TRANSEPT ET LEURS DEUX CHAPELLES
Chapelle sud dédiée à Notre-Dame.
Chapelle sud dédiée à Notre-Dame.
L'architecture et l'ornementation de cette chapelle sont nettement
plus élaborées que celles de la chapelle Saint-Maur, au nord.

Les chapelles du transept. Il faut avoir l'œil, une fois dans l'église, sur les deux bras du transept construits au XIVe siècle. Ils présentent une architecture sobre au nord, et plus travaillée au sud. On a en fait sous les yeux deux des tendances artistiques qui se manifestaient, au début du XIVe siècle, dans l'art sacré de la France du Midi et du Sud-Ouest.
Chaque croisillon se compose d'une travée droite quadripartite, enrichie d'une abside à cinq pans abritant une petite chapelle. Au nord (photo ci-dessous), on observe «des colonnettes grêles, de coupe prismatique, séparées par des chapiteaux nus de nervures offrant le même profil très sec» (Congrès archéologique de 1987). Au sud (voir plus haut), dans la chapelle Notre-Dame, l'effort artistique est à souligner : «supports légers, formés de colonnettes liées par un jeu délicat de contre-courbes, chapiteaux élégants au décor de feuilles découpées, fenêtres à réseaux rayonnants, animation générale des parois toute différente de l'austérité de la chapelle nord» (Congrès archéologique de 1987).
Source : Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, 145e session, article sur l'église Saint-Pierre rédigé par Jacques Gardelles.

Chapelle nord dédiée à Saint Maur.
Chapelle nord dédiée à Saint Maur.
Cette chapelle présente une architecture beaucoup plus sobre que la chapelle sud.
À DROITE ---»»»
Partie basse de la rose historiée illustrant la vie de Marie (XIXe siècle, après 1840)
Chapelle sud dédiée à Notre-Dame.
Chapelle sud dédiée à Notre-Dame.
Les chapiteaux de cette chapelle, beaucoup plus travaillée que la chapelle nord,
sont ornés d'élégantes feuilles découpées.
«Saint Jean-Baptiste et l'agneau»
«Saint Jean-Baptiste et l'agneau»
Tableau d'un auteur anonyme, XVIIIe siècle?
«Saint Jacques le Majeur»
«Saint Jacques le Majeur»
Tableau d'un auteur anonyme, XVIIIe siècle?
Rose avec vitrail du XIXe siècle dans le transept sud.
Rose avec vitrail du XIXe siècle dans le transept sud.
Le vitrail illustre des épisodes de la vie de Marie.
Partie basse de la rose historiée illustrant la vie de Marie (XIXe siècle, après 1840)
Détail de la rose historiée dans le croisillon sud du transept
Détail de la rose historiée dans le croisillon sud du transept :
Jésus parmi les docteurs.
«Apparition de la Vierge»
«Apparition de la Vierge»
Auteur anonyme, XVIIe siècle?
Autel de la chapelle Saint-Maur (transept nord).
Autel de la chapelle Saint-Maur (transept nord).
LE CHŒUR DE L'ÉGLISE SAINT-PIERRE DE LA RÉOLE
«L'onction royale» avec saint Sébastien.
«L'onction royale» avec saint Sébastien.
Auteur anonyme, XVIIIe siècle?
La Vierge, détail d'un vitrail du chœur.
La Vierge, détail d'un vitrail du chœur.
Le Christ, détail d'un vitrail du chœur.
Le Christ, détail d'un vitrail du chœur.
Saint Pierre, détail d'un vitrail du chœur.
Saint Pierre, détail d'un vitrail du chœur.
Vue d'ensemble du chœur avec les boiseries et la coursière.
Vue d'ensemble du chœur avec les boiseries et la coursière.
Cette architecture est du tout début du XIIIe siècle. Les chapiteaux relèvent du gothique septentrional de la même époque.
La coursière, qui court au-dessous des baies, a été conçue lors de la création de l'église, mais la balustrade de pierre a été refaite au XIXe siècle.
Vitrail de l'Arbre de Jessé
Vitrail de l'Arbre de Jessé
(XIXe siècle, après 1840).

Les vitraux de l'abside. Dans la nef, les vitraux font apparaître des saints et des saintes de grande taille dans un décor où les figures géométriques et les éléments floraux abondent. Les vitraux de l'abside offrent plus de variétés. Les deux vitraux de l'axe central accueillent le Christ et la Vierge en haut, l'apôtre Pierre et l'archange Michel en bas. Sur les côtés, on note la présence d'un Arbre de Jessé, façon XIIIe siècle, et d'un Arbre des prophètes, Tous les deux sont du même style (voir l'église Saint-André à Joigny qui propose elle aussi un Arbre de Jessé et un Arbre des prophètes - ce dernier sous la forme des litanies de la Vierge). Le reste des baies du chevet de Saint-Pierre est occupé par les évangélistes. Un exemple en est donné ci-contre à droite avec saint Matthieu et saint Luc.
Au niveau du style, les vitraux de Saint-Pierre (en incluant les deux roses) sont très riches en couleurs. Ils sortent vraisemblablement d'un même atelier de peintres verriers (qui est inconnu). Le programme iconographique est assez cohérent. Tout a été mis en place après 1840.

Jessé endormi dans le vitrail de l'Arbre de Jessé
Jessé endormi dans le vitrail de l'Arbre de Jessé
(XIXe siècle, après 1840).

CI-DESSOUS : Le maître-autel du chœur.
Le maître-autel du chœur

Le mobilier de l'église Saint-Pierre. Avant la Révolution, de 1764 à 1781, les Mauristes eurent à cœur d'embellir leur église : autel à la romaine, sculptures en marbre blanc, lutrin, portes en fer, balustrade du sanctuaire, boiseries du chœur, grandes orgues furent créés par d'excellents artistes (dont Blaise Charlut, de La Réole). À cette époque, il y avait quatre autels latéraux dans la nef avec les dorures qui les accompagnaient. Et surtout de remarquables peintures à fresque dues au peintre Beaucourt. Ces peintures (qui ont toutes disparu) ont été achevées en 1779.
La Révolution a laissé cette ornementation intacte. Mais, en 1803, tout fut enlevé pour orner la cathédrale de Bordeaux. L'administration ne fit rien pour s'y opposer «(...) et cette chapelle, que les habitants montraient naguère aux étrangers comme le plus beau monument de la cité, tomba dès lors dans le délabrement le plus complet», écrit M. Dupin, auteur d'une notice historique en 1830. Quant à la chaire à prêcher, elle déménagea dans la chapelle de l'hospice.
Source : Notice historique et statistique de La Réole, suivie de détails historiques sur les diverses communes de l'arrondissement qui renferment des monuments, des antiquités et des curiosités remarquables par M. Ml Dupin - 1839 (disponible sur Gallica.fr)

Saint Matthieu et saint Luc
Saint Matthieu et saint Luc
Vitrail du chœur
(XIXe siècle, après 1840).
Vitrail de l'Arbre des Prophètes, détail
Vitrail de l'Arbre des Prophètes, détail
Le prophète Laban.
La rose de la façade occidentale (cachée par l'orgue de tribune depuis 2015).
La rose de la façade occidentale (cachée par l'orgue de tribune depuis 2015).

La rose de la façade occidentale. Si vous passez dans l'église Saint-Pierre de La Réole, vous ne verrez qu'une toute petite partie de la rose donnée ci-contre. En effet, en 2015, une partie des anciennes orgues, qui avaient été transférées à Bordeaux (soit à la cathédrale Saint-André, soit à l'église Sainte-Croix), ont à nouveau pris place sur la grande tribune restée vide depuis près de deux siècles. Insérées dans un buffet moderne, elles cachent à présent la partie centrale de la façade occidentale. La photo de la rose occidentale ci-contre a été prise en 2014.

Vue de la nef depuis le chœur (avant l'installation du nouvel orgue de tribune en 2015).
Vue de la nef depuis le chœur (avant l'installation du nouvel orgue de tribune en 2015).
La tribune d'orgue en anse de panier a été conçue par Jean Alary en 1766.
RETOUR SUR LE CLOÎTRE ET LES BÂTIMENTS MONASTIQUES

Les bâtiments monastiques de La Réole. Pour ceux qui sont de passage à La Réole et qui ont à cœur de visiter dans la ville les bâtiments qui comptent, l'ancien prieuré du XVIIIe siècle doit venir juste après la visite de l'église Saint-Pierre.
Il ne reste rien du premier monastère, brûlé et pillé au temps des guerres de Religion. Ses ruines servirent ensuite de carrière de pierres aux gouverneurs du château. Les religieux, de leur côté, reprirent leur vie communautaire dans le cadre de l'hôpital de la Madeleine. En 1627, ils adoptèrent la règle de Saint-Maur et lancèrent une reconstruction rapide du monastère, qui fut terminée au bout de deux ans (!). Hélas, ce n'était que des bâtiments de fortune qui furent rapidement ruinés à leur tour. En mars 1703, on passa enfin aux choses sérieuses : le supérieur général de la Congrégation de Saint-Maur donna son agrément pour la reconstruction de l'ensemble. La première pierre fut posée le 1er avril 1704. On commença par l'aile sud-est qui fut achevée en 1708, selon les plans - de style très archaïque - de l'architecte Maurilhe Gassy (photo ci-contre). Une déficience dans la conception obligea à refaire les voûtes du rez-de-chaussée. Selon Christian Taillard dans son rapport au Congrès archéologique de 1987, le manque de fonds interrompit le chantier. La reprise se fit en 1720 et la partie ouest des bâtiments sud fut achevée en 1725. Des vices de construction apparurent encore. Christian Taillard soulève la possibilité de l'incompétence de Maurilhe Gassy (dont on ignore tout), «incapable de trouver une solution adaptée au double problème posé par la hauteur et ---»» suite plus bas

Vue de la partie sud des bâtiments monastiques
La façade sud, que l'on voit à gauche, a été construite par moitié :
En 1708, la partie est (la plus proche sur la photo) était terminée. La seconde a été bâtie de 1720 à 1725.
Les contreforts ont été ajoutés en 1726 pour contenir l'instabilité du soubassement.
Le cloître occidental avec son puits.
Le cloître occidental avec son puits.
Galerie intérieure du cloître.
Galerie intérieure du cloître.
Coupole à côtes sur plan carré conçue par Jean  Alary
Coupole à côtes sur plan carré conçue par Jean Alary
dans la cage de l'escalier d'honneur central. (années 1730)
Coupole de pierre ovoïde conçue par Jean Alary
Coupole de pierre ovoïde conçue par Jean Alary
dans l'escalier d'honneur est (années 1730).
La rampe d'escalier est l'œuvre du maître serrurier Blaise Charlut.
Saint Abbon en extase
Saint Abbon en extase
sur la coupole à côtes sur plan carré
dans la cage de l'escalier d'honneur central.
Galerie intérieure du prieuré.
Galerie intérieure du prieuré.

---»» les poussées des murs et un sous-sol instable.» C'est pourquoi neuf contreforts furent élevés le long de la façade sud (1726).
En fait, dès 1723, Dom Maupel, prieur claustral, avait relancé le chantier. Une fois terminée la grande aile sud face à la Garonne, le projet mauriste consistait à fermer le monastère en édifiant trois corps de logis en arrière de la construction neuve. Dom Maupel s'adressa à un jeune architecte bordelais, Jean Alary. Celui-ci érigea d'abord le bâtiment est, situé entre l'abside de l'église et l'aile sud. Puis il bâtit les corps de logis qui reliaient les divers éléments du monastère (passage de la cuisine au réfectoire, passage liant le bâtiment sud à l'entrée de l'église). Enfin, l'infirmerie intégra l'ensemble claustral. Les derniers éléments furent ajoutés entre 1756 et 1759.
La construction du prieuré s'était donc étalée sur cinquante-cinq ans et sous l'autorité de quinze prieurs. Ce qui s'explique, à l'évidence, par le manque d'enthousiasme de certains d'entre eux, mais surtout, rappelle Christian Taillard, par le manque de ressources.
Les mauristes passèrent ensuite à la décoration de l'église priorale, qui fut la grande affaire de la décennie 1770.
Au-delà de l'œuvre en pierre, il faut avoir un œil, lors de la visite, sur le travail remarquable de Blaise Charlut, maître ferronnier de Bordeaux (rampes d'escalier et portes).
Source : Congrès archéologique de 1987, Bordelais Bazadais, article Les bâtiments monastiques de la Réole rédigé par Christian Taillard.

Escalier d'honneur central de Jean Alary (1731-1733)
Escalier d'honneur central de Jean Alary (1731-1733)

Documentation : Congrès archéologique de France tenu à Bordeaux et à Bayonne en 1939, 102e session, articles sur les édifices de La Réole par Gabriel Loirette
+ Congrès archéologique de France, Bordelais et Bazadais, 1987, 145e session, article sur l'église Saint-Pierre par Jacques Gardelles
+ Notice historique et statistique de La Réole, suivie de détails historiques sur les diverses communes de l'arrondissement qui renferment
des monuments, des antiquités et des curiosités remarquables par M. Ml Dupin - Éditée en 1839 (disponible sur Gallica.fr)
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