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A la belle saison, l'église Saint-Eustache
est l'une des plus visitées de Paris. Sa situation au centre
de la capitale, près du forum des Halles, n'y est pas pour
rien. Si l'aspect extérieur est des plus classiques (quoique
la façade n'ait rien pour séduire), l'architecture
intérieure - au premier regard - est plutôt déroutante.
Viollet-le-Duc, le célèbre architecte-restaurateur
du Second Empire, n'y voyait qu'«un amas confus de débris
empruntés de tous les côtés (...)».
Au XIIIe siècle se tenait à cet endroit une chapelle
dédiée à Sainte-Agnès. Devenue avec
l'usage, Saint-Eustache. Trop petite, elle est remplacée
au XVIe par un vaste édifice de cent mètres de long,
de style gothique flamboyant. Les plans et les principes architecturaux
suivent ceux de Notre-Dame de Paris. La première pierre est
posée en 1532, mais l'église n'est réellement
achevée qu'en 1640. Sa construction a été ralentie
par le manque de financement, la nature du terrain et les guerres
de Religion. A côté du gothique, l'intérieur
offre maints aspects de la Renaissance italienne.
En 1754, Jean Hardouin-Mansart de Jouy donne les plans d'une nouvelle
façade,
qui ne sera malheureusement jamais terminée. A la Révolution,
Saint-Eustache est saccagée, transformée en temple
de l'Agriculture, puis rendue au culte en 1803. Victime d'un incendie
en 1844, l'église est restaurée par Victor Baltar.
Son célèbre orgue
de tribune, dû à Ducroquet, date de 1854.
Saint-Eustache contient un grand nombre de peintures murales du
XIXe siècle et quelques magnifiques uvres
d'art (tableaux et sculptures), comme la statue de la Vierge
à l'Enfant de Pigalle, l'une des plus belles de Paris.
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Aspect général de la nef et du chur.
Le banc d'uvre, à gauche, est du XVIIIe siècle.
La chaire à prêcher, à droite, du XIXe.
Un
point d'architecture.
Le visiteur qui entre dans l'église est tout de suite
saisi par la hauteur des voûtes (33 mètres) et
les imposantes masses verticales qui imprègnent tout
l'édifice.
Le gothique flamboyant se retrouve au niveau des voûtes
d'ogives, embellies de liernes, de tiercerons et de clés
pendantes omniprésentes. Le style Renaissance
s'exprime dans la juxtaposition des ordres antiques, les piliers
qui sont flanqués de pilastres, les arcades en plein
cintre et, bien sûr, dans l'abondante décoration
sur les chapiteaux (séraphins, corbeilles de fleurs,
etc.). Comme le notait Eugène Viollet-le-Duc, la présence
de ces deux styles bien distincts peut donner une sensation
de confusion et de désordre...
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La
verrière. Saint-Eustache bénéficie
d'une très vaste verrière sur trois niveaux
d'élévation. L'église est si haute que
le premier niveau de l'élévation est lui-même
partagé en deux sous-niveaux, matérialisés
par une double rangée de vitraux. Peu de vitraux sont
historiés ou à motifs floraux. La plupart sont
en verre blanc. Si l'on y ajoute la grande double porte du
croisillon sud, toujours ouverte pour éclairer le transept
(en fait le passage est fermé par une paroi en verre),
Saint-Eustache est une église très lumineuse.
Comme le chur est à l'est et qu'il n'y a pas
de bâtiment au sud, le soleil, par beau temps, irradie
toute la nef de ses rayons pendant toute la journée.
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L'église Saint-Eustache vue depuis le sud (sortie du Forum
des Halles). |
La façade, de conception classique (dessin de Jules
Hardouin-Mansart) n'a jamais été achevée. |
Le chevet de l'église.
Là encore, on peut voir une juxtaposition de style gothique
(arcs-boutants) et Renaissance. |
Pignon du croisillon sud.
Le cerf crucifère rappelle la vision
de saint Eustache. |
Portail du croisillon sud. On y retrouve des éléments
Renaissance (rinceaux et coquilles). |
LES CHAPELLES LATÉRALES
DU BAS-CÔTÉ SUD |
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Suite de chapelles dans le bas-côté sud.
Les chapelles ont été peintes entre 1848 et 1870 par
une
trentaine d'artistes (Barrias, Glaize, Pils, Vauchelet, etc.). |
«Le Mariage de la Vierge»
Groupe sculpté de Henri-Joseph de Triquetti
dans la chapelle des Saints-Innocents. |
Chapelle de la Crucifixion, vitrail du XIXe siècle.
(Au premier plan, en noir : le Christ sur la croix)
Cliquez sur le vitrail pour l'afficher en gros plan |
Le retable de la chapelle Sainte-Cécile ou «des Musiciens». |
La chapelle Sainte-Cécile ou «des Musiciens» et
sa
luxuriante décoration du XIXe siècle. |
Statue de sainte Cécile (XIXe siècle)
dans la chapelle Sainte-Cécile ou «des Musiciens».
Saint-Eustache et ses orgues
ont été lieu de création musicale. Franz Liszt
y fit jouer sa Messe de Gran en 1866. Hector Berlioz
y dirigea la première exécution de son Te Deum en 1855. |
«Ecce Homo» d'Antoine Étex (1808-1888)
dans la chapelle des Âmes-du-Purgatoire. |
Chapelle de la Crucifixion. |
Peinture murale du XIXe siècle
dans la chapelle des Âmes-du-Purgatoire.
Le Christ, les bras vers le Ciel, semble demander aux
pénitents du purgatoire de patienter encore un peu... |
LE BANC D'UVRE
ET LA CHAIRE À PRÊCHER |
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« Le Triomphe de sainte Agnès».
«««--- Le banc d'uvre
de Saint-Eustache date de 1720. En forme de portique grec,
il a été exécuté par Pierre Lepautre
(1660-1758) d'après les dessins de Jean-Sylvain Cartault
(1675-1758).
À son pinacle, la statue en bois sculpté entourée
d'anges illustre «Le Triomphe de sainte Agnès».
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La chaire à prêcher vue de l'arrière. |
Sculpture centrale du banc d'uvre. |
La chaire à prêcher a été
sculptée par Victor Pyanet au XIXe siècle sur
un carton de Victor Baltard.
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La cuve de la chaire à prêcher.
Elle est ornée des vertus théologales : Foi, Espérance
et Charité. |
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La croisée du transept.
On voit nettement, au deuxième plan, que le premier niveau
de l'élévation et ses très hautes colonnes
est partagé en deux étages (double rangée de
vitraux) au niveau des chapelles latérales.
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«Sainte Cécile, martyre» (uvre de 1858),
Haut-relief en plâtre dans le croisillon nord. |
Le croisillon nord et sa rose. |
Bénitier monumental en plâtre dans le croisillon sud
:
«Le pape Alexandre II instituant l'usage de l'eau bénite»
uvre d'Eugène Bion (1834).
«««--- Cliquez sur la rose pour l'afficher en gros
plan. |
Statues d'Apôtres (XIXe siècle)
dans le croisillon nord. |
Statue de saint Jean l'Évangéliste
(XVe siècle)
Croisillon sud, sur le trumeau. |
Le transept et ses parties hautes (à droite de la photo, le
croisillon sud).
On notera l'abondance de liernes et de tiercerons sur la voûte,
propre au gothique flamboyant. |
LE CHUR DE SAINT-EUSTACHE |
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Vue générale du chur et des stalles. |
L'abside avec les vitraux d'Antoine Soulignac (1631)
et sa forêt de décorations en gothique flamboyant. |
Décoration de style Renaissance dans le chur et
sur
les piliers de la nef : têtes d'anges, feuillages, etc. |
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La clé pendante du chur au milieu de son décor
flamboyant. |
L'un des neuf vitraux du chur.
Ils sont dus à Antoine Soulignac (1631). |
La nef et ses hauts piliers vus depuis le chur.
La nef est bordée par un double bas-côté. |
LES TABLEAUX CHEFS-D'UVRE
DANS LE VESTIBULE DE L'ÉGLISE |
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«Le Martyre de saint Eustache» de Simon Vouet (1590-1649)
Peinture commandée par Richelieu avec son pendant
«L'Apothéose de saint Eustache» (au musée
de Nantes).
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«L'Adoration des bergers»
de François-Guillaume Ménageot (1744-1816) |
Bas-côté nord
«Saint Jean-Baptiste»
de François Lemoyne (1688-1737)
Jean-Baptiste est représenté ici dans une posture assez
désinvolte, à l'image de Bacchus.
Ce traitement - léger - d'un sujet religieux
annonce l'art de Natoire et de Boucher
au milieu du XVIIIe siècle. |
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«««---
A GAUCHE : «L'Adoration des Mages», copie d'un tableau
de Rubens (photo partielle). |
François-Guillaume
Ménageot. Ce peintre français n'est
pas très connu. Né en 1744, il avait onze ans
de plus qu'Élisabeth Vigée Le Brun avec qui
il entretint une relation amicale. Les deux peintres cultivaient
le même rejet de la personne de Napoléon Ier
(qu'ils n'ont jamais appelé que «le général
Bonaparte») et de son peu d'humanité. On lit
ainsi dans les lettres d'Élisabeth Vigée Le
Brun à la princesse Kourakin le passage suivant à
propos de Ménageot (on est en 1800) : «La première
fois qu'il vint me voir, Ménageot me parla de la révolte
des jeunes gens qui lui avait fait quitter Rome ; il me raconta
aussi qu'à son retour il avait vu Bonaparte à
Lodi, après la grande victoire que venait de remporter
ce général. Bonaparte, en lui montrant le champ
de bataille encore tout couvert de morts, lui dit avec un
grand sang-froid : "Ce serait un beau tableau à
faire". Ménageot avait été indigné
de ce mot. "C'était, ajouta-t-il, un spectacle
affreux, déchirant ; il y avait plusieurs chiens qui
pleuraient auprès du cadavre de leur maître :
ces pauvres chiens me parurent bien plus humains que Bonaparte!"»
Source : «Élisabeth
Vigée Le Brun, Mémoires d'une portraitiste»,
éditions Scala.
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Vue d'ensemble de la chapelle de la Vierge (chapelle axiale dans le
déambulatoire).
Au-dessus de l'autel trône le chef-d'uvre de Jean-Baptiste
Pigalle, sans doute la plus belle Vierge à l'Enfant de Paris.
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Historique.
A sa création, la chapelle de la Vierge resplendissait
d'une riche ornementation en marbre, en boiseries, en tableaux.
Tout cela a été saccagé ou volé
à la Révolution. La chapelle a été
restaurée en 1800 et, peu à peu, réembellie.
En son centre, on y trouve une magnifique sculpture de la
Vierge à l'Enfant due au ciseau de Jean-Baptiste Pigalle
(1714-1785). Le peintre Thomas Couture (1815-1879) l'a enrichie
de trois grandes fresques sur le thème de la Vierge
: «La Vierge triomphante adorée par les Anges»
; «La Vierge étoile des marins» et «La
Vierge consolatrice des affligés».
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Le style de Thomas
Couture est remarquable. Pas de figuratif ni de symbolisme
: le peintre décrit les sentiments (comme l'affliction
dans la fresque de gauche) dans leur réalité
crue (voir la page 2) et les anges presque comme des êtres
humains bien en chair (voir la photo ci-dessous au centre).
La Galerie des vitraux+
donne une image en gros plan du retable et de sa peu commune
série de vases.
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La Vierge à l'Enfant de Jean-Baptiste Pigalle (1714-1785)
ou l'art de ciseler une statue pleine de dynamisme.
Voir la Vierge à l'Enfant de Pigalle à l'église
Saint-Sulpice.
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Les anges «très humains» de Thomas Couture
dans la fresque centrale. |
Chapelle Sainte-Agnès
(sur la droite de la chapelle de la Vierge).
La grille en fer forgé est d'époque Louis XVI.
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Vitrail central (extrait), XIXe siècle.
Cliquez sur l'image pour afficher tous les vitraux de la chapelle
de la Vierge |
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LES CHAPELLES LATÉRALES
DU BAS-CÔTÉ NORD |
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Suite de chapelles latérales dans le bas-côté
nord.
À DROITE, la chapelle Saint-Louis avec son vitrail XIXe siècle
sur l'éducation de Louis IX. ---»»»
Cliquez sur le vitrail pour l'afficher en gros plan dans la galerie
des vitraux+ |
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CI-DESSUS, Chapelle Saint-Vincent-de-Paul.
«La Vie du Christ» de Keith Haring (1958-1990).
On retrouve cette uvre dans la chapelle du milieu dans
la photo en haut à gauche |
«««---
A GAUCHE, Chapelle des Pèlerins-d'Emmaüs.
uvre contemporaine de Raymond Mason (né en 1922)
:
«Le Départ des fruits et légumes au cur
de Paris» |
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LES CHAPELLES DU DÉAMBULATOIRE |
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Déambulatoire nord.
La dernière chapelle visible dans la photo est celle
de la famille Colbert. |
Chapelle familiale des Colbert.
Mausolée de Jean-Baptiste Colbert exécuté
par Antoine Coysevox (1640-1720) d'après les dessins
de Charles Le Brun. |
Colbert était le marguillier
de l'église Saint-Eustache. Ce mausolée
est considéré comme une uvre majeure
dans la statuaire du XVIIe siècle. L'artiste
a utilisé le bronze et le marbre blanc et noir.
Colbert, saisi dans l'attitude d'un priant, est revêtu
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de son manteau de commandeur
de l'ordre du Saint-Esprit. À gauche du sarcophage,
la Fidélité, ciselée par Coysevox
(1640-1720) ; à droite, la Piété
ou l'Abondance due à Jean-Baptiste Tuby (1635-1700).
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La Fidélité (uvre de Coysevox)
dans le mausolée de Jean-Baptiste Colbert. |
Colbert dans l'attitude d'un priant (uvre de Coysevox)
dans le mausolée de Jean-Baptiste Colbert. |
La Piété ou l'Abondance (uvre de Tuby)
dans le mausolée de Jean-Baptiste Colbert. |
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«««--- À GAUCHE
Chapelle de la Famille d'Épernon
«Les Disciples d'Emmaüs»
Tableau de l'école de Rubens.
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À DROITE ---»»»
Chapelle Sainte-Madeleine
«L'Extase de sainte Madeleine»
de Rutilio Manetti (1571-1636)
Le sujet en est la relation mystique
de la sainte avec Dieu.
Sur le même thème, voir
«Sainte Marie-Madeleine en extase»
d'un auteur anonyme
au musée
d'Art Sacré de Dijon
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Vitrail contemporain sur le thème du Souvenir
dans la chapelle des Charcutiers (ou Saint-André).
La corporation des charcutiers («Le Souvenir») a toujours
son centre religieux
dans l'église. Chaque année, une messe est célébrée
au nom de cette corporation.
Cliquez sur le vitrail pour l'afficher en gros plan.
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«Tobie et l'Ange» de Santi di Tito (1536-1603)
dans la chapelle Sainte-Geneviève.
Tobie, en voyage en Médie, est accompagné d'un guide
qui se révèle être l'Archange Gabriel.
Ce tableau se rattache à l'école maniériste. |
La Fidélité (uvre de Coysevox), détail
dans le mausolée de Jean-Baptiste Colbert. |
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Vue d'ensemble de l'orgue de Saint-Eustache,
l'un des plus grands de France.
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Sainte Cécile trône tout en haut du buffet du grand
orgue.
(Carton de Baltard, 1854.) |
Frise décorative en pierre
de la tribune qui accueille l'orgue. |
Les
orgues de Saint-Eustache sont parmi les plus
grandes de France. Dues à Ducroquet (1854),
elles ont été restaurées par le
néerlandais Van Den Heuvel en 1989. La sculpture
sur bois du buffet (sur un carton de Victor Baltard)
est une pure splendeur. La beauté des personnages
et la rose à l'arrière-plan créent
une féérie scénique qu'il faut
apprécier avec une paire de jumelles. Elle rappelle
celle offerte par l'orgue de la cathédrale Saint-Gatien
à Tours.
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Magnifique sculpture sur bois dans la partie haute du buffet (ici
la tourelle gauche). Cliquez sur l'image.
«««--- A GAUCHE, tourelle droite du buffet.
Le roi David joue de la harpe, sculpture due à Eugène
Guillaume (1822-1905)
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Une caractéristique de l'orgue de Saint-Eustache : la console,
indépendante, est installée dans la nef. En dehors des
concerts et des messes, une cage de verre la protège.
«««--- A GAUCHE
Le bas du buffet se marie magnifiquement avec la pierre sculptée
de la tribune. |
Vue de la nef et de l'orgue de tribune depuis le chur. |
Documentation : «Paris d'église
en église» (Massin éditeur), ISBN :978-2-7072-0583-4
+ brochure «Saint-Eustache» disponible dans l'église |
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