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La ville de Chaville, entre Sèvres
et Viroflay,
est l'ancien fief de la famille Le Tellier, dont le marquis de Louvois,
principal ministre de Louis XIV, fut l'illustre représentant.
Les armoiries des Le Tellier sont encore visibles au fronton
de la vieille
église de Vélizy. Elles comprennent trois lézards
(ou tritons) au-dessous de trois étoiles. En 1844, après
la mort sans postérité du dernier marquis de Louvois,
Chaville
reprendra les trois lézards comme symbole héraldique
de la commune.
Historique. Au IXe siècle, l'évêque de Paris,
Inchade (811-832), crée une ferme métairie pour malades
dans ce qui sera le futur quartier d'Ursine à Chaville.
Une chapelle lui est associée. Au XIIIe siècle, la
ferme devient un Hôtel-Dieu dédié à saint
Jean-Baptiste. L'ensemble est détruit par Louvois en 1675.
Auparavant, vers 1200, une église paroissiale est érigée
à Chaville.
Quand les ressources manquent, la cure est rattachée à
celle de Montreuil, près de Versailles.
Mais, en 1603, une fondation créée par Michel Le Tellier,
père du marquis de Louvois, en assure l'indépendance.
Et, en 1626, une nouvelle église se dresse sur les fondations
de l'ancienne. Après plusieurs remaniements, elle sera démolie
en 1966. Le seul vestige qui nous en est parvenu est le Christ
en croix visible dans la nef de l'église actuelle.
Les années 1905-1906 sont celles de l'effervescence pour
l'Église de France. L'atmosphère anticléricale
va de pair, à Chaville,
avec les bouleversements provoqués par la ligne de chemin
de fer Chaville-Vélizy, construite en 1901, et par les nouveaux
lotissements qui peu à peu prennent la place des grandes
propriétés. En octobre 1906 arrive à la cure
Albert Bouret, un prêtre dynamique, âgé
de 39 ans et tout à fait conscient de cet environnement sans
précédent. Il veut une nouvelle église capable
de rassembler une communauté qui s'accroît. Refusant
les terrains de 500 mètres carrés qu'on lui offre,
il achète, en 1909 et 1912, en son nom propre, un terrain
de près de 2 300 mètres carrés en face de la
nouvelle mairie. L'église à bâtir devra pouvoir
accueillir un millier de fidèles. Mais la difficulté
majeure tient au terrain : le calcaire sur lequel doit s'appuyer
le bâtiment est à dix mètres de profondeur.
Il faut donc creuser des puits de fondations croisés pour
soutenir l'édifice. La construction va durer vingt ans. L'architecte
Alphonse de la Richardière dirige les travaux à titre
bénévole. L a première pierre est posée,
en grandes pompes, le 4 juin 1911.
La première guerre mondiale interrompt totalement la construction.
En 1921, une association paroissiale est créée. Elle
se voit remettre les titres de propriété du terrain.
À cette occasion, le père Bouret en cède deux
cents mètres carrés à la commune pour y édifier
un marché.
Qui paie la construction ? Ce sont les dons des Chavillois
et les quêtes réalisées dans les paroisses où
le père Bouret a l'occasion de prêcher pour son église.
Après la guerre, avec l'augmentation du prix des matériaux,
le père multiplie ses interventions à travers l'Île-de-France.
En 1925, il faut lancer un emprunt.
Enfin, en mai 1926, la nouvelle église, dédiée
à Notre-Dame de l'Assomption, est bénie par l'évêque
de Versailles.
En 1931, le clocher est achevé. Les vitraux
vont suivre dans les années suivantes. Au total (édifice,
clocher et vitraux), le coût avoisine les deux millions d'euros.
L'église Notre-Dame de Lourdes soulève l'intérêt
par ses vitraux
des années 1930 qui illustrent le cycle marial. Le peintre
verrier chavillois Albert Gsell y a introduit un style nouveau,
remarqué par les historiens du vitrail contemporains.
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Vue d'ensemble de l'église Notre-Dame de Lourdes.
Le Christ en croix sur l'élévation gauche est le seul
vestige de la précédente église, construite en
1626 et détruite en 1966. |
L'église Notre-Dame de Lourdes sur l'avenue Roger Salengro. |
Le chevet de l'église Notre-Dame de Lourdes. |
La Vierge au pied de la croix, détail du vitrail. |
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Les portails avec archivolte en plein cintre à multiples
voussures
donnent au porche d'entrée de l'église un aspect néo-roman. |
Les
vitraux de Notre-Dame de Lourdes (1/3).
La vitrerie, datée des années
1930, est dédiée à la Vierge Marie.
On la doit à deux peintres verriers : Henri
Ripeau, dont l'atelier était à Versailles,
et Albert Gsell qui avait le sien à Chaville.
La Vie de la Vierge est illustrée par les dix
vitraux-colonnes de la nef dont une partie est donnée
dans cette page. Un complément de cette Vie se
trouve dans les vitraux qui remplissent les trois oculi
au-dessus du chur
(Annonciation,
Visitation
et Nativité).
Dans les vitraux de la nef, le soubassement, comme on
le voit ci-contre à droite, est constitué
d'un motif à rinceaux sur fond bleu, sous un
arc en plein cintre. Il est toujours accompagné
du nom du donateur, ajouté en bas. Ce dernier,
un peu au-dessus de la hauteur des yeux pour être
visible par tous, est en général une famille
de Chaville
ou un prélat de la paroisse. Au-dessus se trouve
la scène figurée, surmontée elle-même
de plusieurs anges voletant sur un fond à dominante
bleue.
Tous ces vitraux doivent être attribués
à Albert Gsell.
Saluant le travail de l'artiste, l'historienne du vitrail
Laurence de Finance, dans l'ouvrage Un patrimoine
de lumière 1830-2000, écrit à
propos des vitraux de Chaville
: «Un renouvellement stylistique est apporté
par Albert Gsell aux verrières mariales de Notre-Dame
de Lourdes à Chaville
(1930-1934) où, face aux oculi
- dont les très beaux dessins préparatoires
sont conservés aux archives paroissiales -, les
compositions des verrières de la nef, étirées
en hauteur, ont nécessité la pose d'un
soubassement décoratif uniforme et un traitement
particulier de mise en plomb et de découpe des
verres de la partie supérieure occupée
par des anges.»
Albert Gsell a également réalisé
la grande verrière du chur
illustrant l'Apparition
de Marie à Bernadette Soubirous. L'autre
grande verrière du chur
est due à l'atelier versaillais d'Henri Ripeau.
C'est en quelque sorte le pendant de la précédente
: l'Apparition
de Marie à Catherine Labouré. Ces
deux verrières sont conçues de façon
similaire : la Vierge est au centre, auréolée
des rayons de la lumière divine, devant la voyante
agenouillée.
L'apparition à Catherine Labouré, novice
chez les Filles de la Charité, dans la chapelle
de la rue du Bac à Paris en 1830, est la première
apparition qui a été officiellement reconnue
par l'Église. Son retentissement, déjà
considérable, a été renforcé
par la création, deux ans plus tard, de la médaille
miraculeuse, gravée «à la demande
de la Vierge». Cinq églises de la Région
Parisienne illustrent cette apparition, celle de Chaville,
datée des années 1930, étant la
plus récente. ---»» Suite 2/3
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Vitrail : L'Assomption de la Vierge.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
Façade de l'ancienne église Saint-Denis à Vélizy. |
Armoiries de Michel Le Tellier au fronton de la vieille église
de Vélizy. |
Vitrail : L'Éducation de la Vierge Marie.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
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Vitrail : Le Mariage de la Vierge.
Attribué à Albert Gsell, Chaville,
1934-1937. |
VISAGES PEINTS PAR ALBERT
GSELL AVEC EFFETS DE RELIEF |
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Vitrail : L'Éducation de la Vierge, détail : sainte
Anne.
Attribué à Albert Gsell.
. |
Vitrail : L'Éducation de la Vierge, détail : Marie,
Attribué à Albert Gsell |
Présentation de Jésus au Temple, détail. |
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Vitrail : La Sainte Famille.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
Vitrail de sainte Thérèse de Lisieux au-dessus
de la porte d'entrée.
«Je veux passer mon Ciel à faire du bien sur la
Terre»
Signature : «Henri Ripeau, maître verrier à
Versailles, 1937». |
Vitrail de sainte Thérèse de Lisieux, détail.
Henri Ripeau,, 1937. |
Le
visage de sainte Thérèse, ci-contre,
est sans doute obtenu par inclusion d'une photographie
dans le verre. Ce procédé, pratiqué
depuis la fin du XIXe siècle, assurait une totale
ressemblance du dessin avec la réalité.
Dans l'ouvrage Un patrimoine de lumière 1830-2000
(éditions du Patrimoine, 2003), l'historienne
Martine Callias Bey révèle que le verre
était imprimé par la photo en positif,
la cuisson assurant la vitrification et la durabilité.
Henri Ripeau aura utilisé une photo en noir et
blanc de la future sainte, qu'il aura ensuite colorée.
Voir à ce sujet la cathédrale
du Havre et la grande église Saint-Nicolas
à Saint-Nicolas de Port.
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L'orgue de tribune. |
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Vitrail : Les Noces de Cana.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
Vitrail : La Vierge au pied de la croix.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
Tableau : L'Annonciation
par le Père Klasen (vers l'an 2000). |
Vitrail : La Fuite en Égypte, détail.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
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Tableau : La Vierge et l'Enfant
par le Père Klasen
Vers l'an 2000. |
Vitrail : La Vierge au pied de la croix
Détail : Marie-Madeleine. |
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Vitrail : Le Couronnement de la Vierge, détail. |
Les
vitraux de N-D de Lourdes (2/3).
Le vitrail
d'Henri Ripeau reprend l'attitude de la Vierge
gravée sur la médaille en 1832.
Laurence de Finance remarque : «Le décor,
l'attitude de la religieuse et l'encadrement,
non figurés sur la médaille, sont
laissés à l'initiative du peintre
verrier qui, situant la scène dans la chapelle
du couvent, donne à Catherine Labouré
l'attitude de Marguerite-Marie au pied du Sacré-Cur.»
Il s'agit de l'apparition (toujours contestée)
du Sacré Cur à Marguerite-Marie
Alacoque au couvent de Paray-le-Monial au XVIIe
siècle.
Ajoutons un détail pictural : parmi les
cinq verrières qui reproduisent cette apparition,
seule celle de Chaville
reprend le décor de l'envers de la médaille
miraculeuse : une croix, la lettre M et les curs
de Marie et de Jésus entourés de
douze étoiles (décor donné
plus
bas).
Au niveau du graphisme des verrières de
la Vie de la Vierge, on remarque que les visages
sont obtenus par de simples coups de crayon pour
définir les yeux, le nez et la bouche (voir
par exemple Les Noces
de Cana ou l'Annonciation).
Dans quelques rares cas, on observe des effets
de relief comme dans l'Éducation
de la Vierge ou la Présentation
de Jésus au Temple.
---»»» Suite 3/3
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Vitrail : Le Couronnement de la Vierge.
Attribué à Albert Gsell
1934-1937. |
LE CHUR DE L'ÉGLISE NOTRE-DAME
DE LOURDES
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Le chur et l'élévation droite de la nef. |
Apparition de la Vierge à Bernadette Soubirous.
Albert Gsell, 1934-1937. |
Apparition de la Vierge à Catherine Labouré.
Henri Ripeau, 1934-1937. |
Jeanne d'Arc offrant la France
à la Vierge Marie.
Henri Ripeau, 1934-1937. |
La signature d'Henri Ripeau
au bas du vitrail de Jeanne d'Arc. |
La Sainte Famille, détail : le visage de la Vierge |
Tableau dans l'abside : le Christ en gloire
par le Père Klasen (vers l'an 2000). |
Saint Louis par Henri Ripeau (1934-1937). |
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Le chur est dominé par les trois oculi
d'Albert Gsell. |
Les
vitraux de Notre-Dame de Lourdes (3/3).
Ce souci artistique donne évidemment
plus de corps aux personnages. On ne sait
s'il s'agit d'une demande spécifique
du donateur, éventuellement associée
à un surcoût.
Henri Ripeau a, quant à lui, créé
deux vitraux-colonnes dans le chur
: Jeanne
d'Arc offrant la France à la Vierge
Marie (ci-contre à gauche) et
Saint
Louis protégeant la veuve et l'orphelin.
Leur style montre une recherche artistique
certaine qui ne transparaît pas dans
les vitraux d'Albert Gsell, au graphisme
nettement plus dépouillé.
Dans l'église, les deux vitraux-colonnes
d'Henri Ripeau portent une signature.
Albert Gsell n'a signé aucune de
ses créations, sans que l'on sache
pourquoi. À propos de ces signatures,
Laurence de Finance signale qu'on a affaire
à un phénomène commun
aux trois départements franciliens
étudiés dans son ouvrage :
il s'agit de signatures exhibition
«écrites lisiblement, souvent
en petites capitales d'imprimerie»
(voir celle d'Henri Ripeau plus
bas à gauche). En effet, les
petits ateliers avaient besoin de se faire
connaître. Elle ajoute : «La
présence de peintres verriers franciliens
moins connus, mais demeurant sur la commune
même ou à proximité,
est souvent un facteur déterminant
pour le commanditaire.» À Chaville,
aucun vitrail n'a été commandé
à l'un des grands ateliers parisiens
comme Champigneulle, Lorin ou Barillet.
Et la plupart des vitraux sont de Gsell,
artiste installé dans la ville même.
Enfin, c'est Henri Ripeau qui a conçu
le vitrail au-dessus de la porte d'entrée.
Il représente sainte
Thérèse de Lisieux associée
à la célèbre légende
: «Je veux passer mon Ciel à
faire du bien sur la Terre». Le visage
de la sainte a peut-être été
obtenu par inclusion d'une photographie
noir et blanc, ensuite colorée (voir
l'encadré plus
haut).
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Apparition de la Vierge à Catherine Labouré,
détail.
Henri Ripeau a repris le décor de l'envers
de la médaille miraculeuse :
Croix, lettre M, curs de Jésus et Marie
entourés de douze étoiles. |
Oculus dans le chevet : Annonciation
Albert Gsell, 1934-1937 |
Oculus dans le chevet : Nativité
Albert Gsell, 1934-1937. |
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Baptistère dans le chur. |
Christ en croix dans le chur. |
Absidiole
gauche dans le chur ---»»» |
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La Sainte Famille.
Sculpture dans l'absidiole droite. |
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Saint
Louis. Le vitrail-colonne d'Henri Ripeau,
donné ci-contre à droite, représente
saint Louis sous un chêne, rendant la justice.
Un noble ou un riche quitte la scène, l'air
déconfit, après la sentence du roi
qui le condamne au profit de la veuve.
Saint Louis est redevenu à la mode dans
les verrières du XIXe siècle, principalement
en Ile-de-France. L'historienne Laurence de Finance
a compté une quarantaine d'édifices
dans les trois départements étudiés
dans l'ouvrage cité en source (Val-de-Marne,
Hauts-de-Seine et Seine-Saint-Denis) avec 51 verrières
portant sur saint Louis. Sur le plan national,
on ne compte qu'environ deux cents édifices
possédant au moins une verrière
du XIXe ou du XXe siècle relative à
saint Louis.
Source : Un patrimoine
de lumière, 1830-2000, éditions
du Patrimoine, 2003.
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Le chur et l'absidiole droite. |
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Saint Louis protégeant la veuve et l'orphelin.
Henri Ripeau, 1934-1937. |
Vitrail d'un oculus
dans une absidiole du chur. |
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Oculus dans le chevet : Visite de Marie à Élisabeth.
Albert Gsell, 1934-1937. |
Jeanne d'Arc offrant la France à la Vierge Marie, détail.
Henri Ripeau, 1934-1937. |
Nef et orgue de tribune vus de derrière l'autel. |
Documentation : Panneaux affichés dans
le narthex
+ «Un patrimoine de lumière, 1830-2000», éditions
du Patrimoine, 2003
+ «Chaville et Viroflay, mille ans d'histoire» de François
Schlumberger, 1997. |
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