|
|
|
LA
CHAPELLE DE LA MÈRE DE DIEU ET SES VITRAUX
|
|
Cette page traite de la chapelle axiale
dite de la Mère de Dieu, bâtie entre 1465 et 1469.
Le financement de la construction a été assuré par le roi Louis
XI en personne, monté sur le trône de France en 1461, à l'âge
de 38 ans.
La principale richesse de cette grande chapelle réside dans ses
neuf verrières, toutes réalisées entre 1467 et 1469 par des
ateliers malheureusement inconnus. Chacune d'elles fait l'objet
ici d'une analyse plus ou moins fouillée, enrichie de nombreuses
photos.
Curiosité particulière des verrières : quatre baies (n°5,
6, 7
et 8) ont un remplage
constitué de trois fleurs de lys. Leurs pétales centraux abritent
des personnages qui méritent d'être regardés de près : ce sont les
pairs de France qui ont assisté au sacre
de Louis XI le 15 août 1461. Voir la présentation
à la baie n°5.
|
|
La chapelle de la Mère de Dieu et ses vitraux du XVe siècle
(années 1467-1469).
La chapelle et ses vitraux sont dus aux libéralités
du roi Louis XI (1461-1483) |
L'entrée de la chapelle de la Mère de Dieu.
La clôture, de style néogothique, a été
réalisée par Boudin, sculpteur à Gisors
(années 1840). |
Piéta du XVIIe siècle. |
L'une des deux plaques funéraires des évêques
d'Évreux inhumés dans la chapelle. |
Bas-relief de la plaque funéraire. |
La
chapelle de la Mère de Dieu (2/2).
---»» Restauration. L'ensemble de
la vitrerie a été restauré par
l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette
en 1895-1899 ; puis une partie l'a été
à nouveau à la fin du XXe siècle.
Certaines verrières, telles qu'on les voit actuellement,
sont jugées bien conservées par les historiens
du Corpus, d'autres, assez corrodées.
Le récit des verrières. Ce récit
est unique dans la cathédrale et les verrières
qui l'illustrent n'ont jamais été bouleversées.
Les cinq baies de l'abside abritent un Arbre
de Jessé entouré de quatre verrières
relatives à la Vie de la Vierge (ce qui inclut
ses parents Anne et Joachim). Les quatre baies des travées
accueillent un cycle développé de la Vie
du Christ (Vie
publique, Passion
et Vie
glorieuse).
Une remise en valeur de l'ensemble de ces baies s'est
terminée en 2001.
Sources : 1) La cathédrale
d'Évreux d'Annick Gosse-Kischinewski et Françoise
Gatouillat, Les Colporteurs, 1997 ; 2) Corpus Vitrearum,
les vitraux de Haute-Normandie, CNRS Éditions,
2000 ; 3) Le vitrail du Triomphe de la Vierge d'Évreux
et Louis XI. Le patronage artistique des Valois dans
la Normandie du XVe siècle, Annales de Normandie,
article de Gary B. Blumenshine, 40e année, n°
3-4, 1990.
|
|
|
La
chapelle de la Mère de Dieu.
Avant l'édifice actuel, la chapelle axiale était
totalement imbriquée dans le déambulatoire
de la cathédrale. La logique veut qu'elle devait
avoir cinq pans comme ses voisines, dont trois pans
vitrés. Sa construction, en 1264, est due à
l'initiative de l'évêque Raoul de Grosparny,
un ami proche du roi Louis IX.
La chapelle fut entièrement reconstruite entre
1465 et 1469 grâce aux libéralités
de Louis XI et sous le bref épiscopat de Jean
Balue (1465-1469). Exemple de la générosité
royale : en août 1465, le roi donna au chapitre
de la cathédrale le droit de prélever
dix deniers tournois sur chaque minot de sel vendu dans
le cadre de la gabelle. Et ceci dans toute la Normandie.
Prévu pour six ans, ce droit sera en fait renouvelé
à trois reprises (1469, 1475 et 1481). Anne de
Beaujeu et le Grand Conseil l'annuleront en septembre
1483, moins d'un mois après la mort du souverain.
La nouvelle chapelle, légèrement plus
large que son arcade d'entrée, est profonde de
trois travées voûtées d'ogives (dont
deux sont vitrées) et se termine par une abside
à cinq pans (voir plan).
Les murs sont ornés de neuf verrières
du XVe siècle, véritable joyau artistique
de la cathédrale d'Évreux. «La discrétion
du roi a voulu que cette chapelle ne soit pas "royale",
écrit l'historienne Annick Gosse-Kischinewski,
mais la signature du souverain s'est inscrite dans la
pierre.» En effet, la fleur de lys est présente
dans le remplage de tous les tympans.
À l'abside, les cinq baies ont chacune trois
lancettes surmontées d'un tympan étroit
où loge une seule fleur de lys. Les baies des
deux travées vitrées sont plus larges.
Avec quatre lancettes chacune, il y a de la place pour
un large tympan et trois fleurs de lys. C'est là
que se niche la commémoration du sacre de Louis
XI à Reims
le 15 août 1483. Les peintres verriers ont représenté,
dans le pétale central des lys, le roi et les
douze pairs de France présents lors du sacre.
Le mobilier. Hormis les deux autels dans l'abside,
la chapelle possède une belle Piéta du
XVIIe siècle (ci-contre), un tableau de Marie-Madeleine
de la fin du XVIIe siècle (ci-dessous) et deux
grandes plaques dressées à la mémoire
des évêques d'Évreux inhumés
dans la chapelle.
Les verrières. Au nombre de neuf, toutes
offertes par Louis XI, leurs différents styles
trahissent la griffe de plusieurs ateliers.
Dans Le Vitrail français, publié
en 1958, Jean Lafond en voit au moins quatre «dont
la manière, précise-t-il, a une forte
saveur étrangère» (voir en baie
4 la petite scène du Couronnement
de la Vierge à laquelle il attribue une évidente
influence allemande). En 1990, Gary B. Blumenshine reprend
cette estimation et ajoute : «Ceci laisse à
penser qu'un groupe important de verriers vint à
Évreux
pour travailler au vitrage de la chapelle de la Vierge.»
Une opinion qui se greffe sur la possibilité
qu'entrevoyait Jean Lafond en 1958 «qu'un grand
atelier se soit formé à Évreux
pendant la restauration de la cathédrale.»
En l'an 2000, dans son recensement des vitraux de Normandie,
le Corpus Vitrearum ne décèle plus
que trois ateliers, mais a l'avantage de préciser
son décompte : l'atelier principal
(un atelier ébroïcien resté inconnu)
qui a couvert six des neuf baies ; un atelier
rouennais (sans davantage de nom) qui a réalisé
des verrières dans d'autres édifices,
notamment l'église Saint-Jean d'Elbeuf. Enfin,
pour la baie
7, le Corpus donne l'atelier qui a réalisé
les vitraux de l'abside de l'église Saint-Taurin
à Évreux
(choix obtenu par comparaison des performances et des
damas).
Trois ans plus tôt, en 1997, l'historienne du
vitrail Françoise Gatouillat donnait une interprétation
plus large. Son étude attentive des styles montre
la marque d'au moins trois peintres verriers...
qui pouvaient très bien travailler dans un même
atelier. Certaines disparités observées
découle du fait que le commanditaire avait sûrement
imposé des délais courts. Le partage des
tâches a conduit à des graphismes différents
: pratique inégale du jaune d'argent ; vêtements
relevant parfois du règne de Charles VII dans
la baie
7 (ce qui indique un peintre d'âge mûr)
; et surtout des dais parfois archaïques, riches,
dessinés avec minutie, contrastant avec d'autres,
plus pauvres, plus secs.
Enfin, Françoise Gatouillat reconnaît que,
même si l'on possède quelques noms de peintre
verriers d'Évreux
et de sa région à cette époque
(Guillaume Bréhal, Louis Coeffart, etc.), rien
ne permet malheureusement d'attribuer tel ou tel nom
à une verrière.
Technique. On remarque un très grand nombre
de pièces montées en chef d'uvre
(i.e. entourées chacune par un circuit de plomb
indépendant du réseau global). C'est une
prouesse qui indique une grande maîtrise de la
découpe du verre et qu'il était indispensable
de savoir réaliser pour accéder au statut
de maître. Le nombre important de ces pièces
en chef d'uvre fait dire à Françoise
Gatouillat que le coût total de ces neuf verrières
a dû être très élevé.
---»» Suite 2/2
plus bas à gauche.
|
|
«Sainte Marie Madeleine au désert»
Huile sur toile, fin XVIIe siècle.
Ce tableau provient du Carmel de Pont-Audemer (1641-1855). |
|
Le chur de la chapelle.
Les historiens pensent, sans certitude que la chapelle de la Mère
de Dieu était autrefois la chapelle privée des évêques
d'Évreux. |
La part
de la gabelle annulée par les Beaujeu en septembre
1483.
Nous avons vu plus haut que, en août 1465, le roi Louis
XI donna au chapitre de la cathédrale d'Évreux
le droit de prélever, dans toute la Normandie, dix
deniers tournois sur chaque minot de sel vendu dans le cadre
de la gabelle. Ce droit fut renouvelé à trois
reprises (1469, 1475 et 1481).
Louis XI s'éteint le 30 août 1483. Anne de Beaujeu
et le Grand Conseil annulent ce droit en septembre 1483, c'est-dire
moins d'un mois après la mort du souverain. Pourquoi
?
Louis XI appréciait beaucoup sa fille Anne. La jeunesse
de son fils Charles (treize ans au décès de
son père) faisait d'elle son héritière,
une volonté que le roi n'a d'ailleurs jamais cachée.
De fait, avec son époux Pierre de Beaujeu, Anne de
France va gérer la France pendant une dizaine d'années.
Aux dires des historiens, les deux époux s'entendaient
bien, Pierre ayant vingt-trois ans de plus que sa femme.
Il était prévu de réunir les États
généraux en février 1484 afin de désigner
officiellement celui ou ceux qui devai(en)t occuper la régence.
Le fougueux duc d'Orléans, cousin de Charles VIII,
revendiquait le Pouvoir. Et certains barons, mécontents
de se voir écartés des affaires du royaume,
en voulaient une part. Aussi les Beaujeu devaient-ils rapidement
saper les oppositions qui ne manqueraient pas de se manifester
lors des États. Pour désamorcer les principaux
sujets de mécontentement, ils enclenchèrent,
dès la mort du roi, une politique d'apaisement envers
les nobles et le peuple. Les nobles qui avaient vu certains
de leurs domaines confisqués par Louis XI les récupérèrent.
Au peuple, soumis à une lourde imposition, il fut remis
une partie de la taille et des impôts.
Dans ces conditions, la suppression de la part de la gabelle
donnée au chapitre d'Évreux est logique : puisque
le montant global des impôts baissait, il fallait mettre
fin à toutes les largesses du feu roi qui ôtaient
des caisses royales une partie des taxes et récupérer
tout l'argent possible.
Cette politique fiscale fut d'ailleurs couronnée de
succès. Lors des États généraux,
les députés louèrent les efforts politiques
et financiers des Beaujeu.
Source : Anne de France, Gouverner
au féminin à la Renaissance d'Aubrée
David-Chapy, Éditions Passé/Composés,
2022.
|
|
Piéta du XVIIe siècle, détail. |
Vierge à l'Enfant du XVe siècle en bois polychrome. |
Piéta du XVIIe siècle, détail. |
Vierge à l'Enfant du XVe siècle, détail. |
Plan de la chapelle de la Mère de Dieu.
Côté
nord de la chapelle avec les deux ---»»»
plaques funéraires des évêques d'Évreux.
Au-dessous : une banquette de pierre court,
au nord et au sud, de l'entrée
de la chapelle jusqu'au chevet. |
|
|
|
BAIE 0 - ARBRE
DE JESSÉ (1467-1469) |
|
Baie 0, verrière de l'ARBRE DE JESSÉ.
Années 1467-1469. |
Baie 0, détail : un roi de Juda et son
chapeau XVe siècle.
Assis sur une branche juste après David,
est-ce le roi SALOMON, son fils ? |
On remarquera
que la «pierre» rouge est reliée
au réseau de plombs.
Elle n'est donc pas montée en chef-d'uvre. |
|
|
Baie
0 - Arbre de Jessé (1/2).
La verrière de cette baie est un Arbre
de Jessé dont la Vierge à l'Enfant
- aboutissement habituel de l'Arbre - occupe une
place prépondérante parmi les ramifications
des rois de Juda.
Réalisée entre 1467 et 1469, offerte
par Louis XI, elle est attribuée par le
Corpus Vitrearum à l'atelier
principal (voir plus
haut).
Le point de départ est un Jessé
assis, endormi, vêtu d'une belle robe damassée.
Les racines de l'Arbre partent de son épaule
droite et s'évasent, à droite et
à gauche, pour recevoir le roi
David jouant de la lyre et les rois de Juda.
Notons que ces rois, quel que soit l'Arbre de
Jessé, ne sont quasiment jamais reconnaissables
sans mention de leurs noms. Peut-on malgré
tout ici faire une exception pour le roi en robe
verte qui se tient juste au-dessus de David ?
Les auteurs d'Arbre de Jessé (en peinture,
en bois ou en verre) font en général
suivre David de son fils Salomon (qui n'est lui-même
pas un roi de Juda). Voir le chef
de ce roi plus bas.
Les chapeaux des rois méritent une remarque.
Ils sont typiques de la seconde moitié
du XVe siècle. Louis XI est souvent coiffé
d'un chapeau semblable dans les représentations
que les peintres font de lui. Il en va de même
pour son père Charles VII.
À ce sujet, l'historien Gary B. Blumenshine
rappelle que, à cette époque, l'iconographie
établissait un parallèle entre les
rois Valois et les rois d'Israël. Il écrit
que, dans cette perspective, «les rois du
vitrail de l'Arbre de Jessé représentent
à la fois les ancêtres du Christ
et la future dynastie que Louis avait l'intention
de fonder à travers Anne [Anne de Beaujeu,
sa première fille], dynastie symbolisée
par les couronnes et chapeaux semblables à
ceux des portraits et bustes des rois Valois et
des ducs de Bourgogne.» De la sorte, se
calquer sur l'Histoire d'Israël est un bon
moyen pour les rois Valois de légitimer
leur dynastie.
Dans la partie basse, deux prophètes tiennent
un phylactère et entourent Jessé.
Celui de gauche, en robe rouge, est probablement
Isaïe.
La Vierge se tient debout sur un croissant de
lune, tandis qu'au sommet trois angelots la couronnent.
Dans la fleur de lys du tympan, deux anges musiciens
et d'autres tenant un phylactère accompagnent
une Trinité souffrante. Cette Trinité
est figurée sous la forme d'un Trône
de Grâce dont les restaurations audacieuses
rendent l'observateur perplexe (voir plus
bas).
La verrière compte de nombreuses pièces
montées en chef-d'uvre (i.e. dont
le cercle de plomb qui entoure le verre n'est
pas relié au réseau de plomb global).
C'est souvent le cas des «pierres précieuses»
qui ornent le couvre-chef des rois et des prophètes
ainsi que la couronne de la Vierge (voir exemple
ci-dessous).
---»» Suite 2/2
plus bas à gauche.
|
|
Baie 0, détail : le roi David avec sa lyre
et son chapeau d'époque Louis XI. |
|
Baie
0 - Arbre de Jessé (2/2).
---»» La verrière a été
restaurée en 1897 par l'atelier ébroïcien
Duhamel-Marette,
puis à nouveau en 1999 par l'atelier Tisserand.
Notons enfin que quelques rois ont une tête refaite
au XIXe siècle.
Sources : 1) Corpus
Vitrearum, les Vitraux
de Haute-Normandie ; 2) Le vitrail du Triomphe de
la Vierge d'Évreux et Louis XI. Le patronage
artistique des Valois dans la Normandie du XVe siècle,
article de Gary B. Blumenshine, Annales de Normandie,
40e année n°3-4, 1990.
|
|
Baie 0, détail : la Vierge à l'Enfant
entourée du roi David et des rois de Juda.
Certaines têtes de rois de Juda ont été
refaites au XIXe siècle. |
Baie 0, détail : La Vierge et l'Enfant. |
La
Trinité souffrante dans la fleur de lys du tympan.
Il faut s'arrêter sur cette étrange Trinité
souffrante dans le pétale central de la fleur
de lys de la baie
0.
Si la partie haute respecte les trois composantes de
la Trinité présentée ici sous la
forme du Trône de Grâce (le Père
céleste, le Christ mort et la colombe du Saint-Esprit),
la partie basse laisse pantois.
Le restaurateur a disposé sa Trinité souffrante
au-dessus d'une demi-forme de jeune femme. Si l'on regarde
le vitrail de loin, on dirait le bassin d'une midinette
à la taille de guêpe et en mini-jupe, dévoilant
ses cuisses roses et ses jambes blanches (que l'on pourrait
imaginer recouvertes de bas).
En fait, le bassin est un élément rapporté,
inséré dans le réseau de plombs
et montrant une main. La découpe audacieuse de
ce bassin féminin fait croire à une chute
de reins très engageante ! Globalement, vu à
distance et compte tenu de la prégnance des jambes,
le pétale du lys est un trompe-l'il : on
y voit une jeune femme.
|
|
|
|
Baie 0, détail : Jessé endormi. |
Baie 0, détail : la robe damassée de Jessé. |
Baie 0, détail : un roi de Juda. |
Baie 0, détail : un prophète (Isaïe ?) à
côté de Jessé.
Les deux pierres précieuses rouge et verte dans
le couvre-chef sont montées en chef-d'uvre. |
Baie 0, détail : le tympan où est incrustée
une fleur de lys.
Des anges musiciens et des anges tenant un phylactère.
accompagnent une Trinité souffrante dans le pétale
central. |
Baie 0, détail : Trinité souffrante dans
la fleur de lys du tympan. |
«««---
Baie 0, détail :
Trinité souffrante dans la fleur du lys du tympan.
Le Père céleste est représenté
avec
la colombe du Saint-Esprit et le Christ mort. |
|
|
Le côté nord de la chapelle de la Mère de Dieu et ses vitraux
des années 1467-1469.
De gauche à droite : les baies 7, 5, 3, 1 et 0. |
BAIE 1 - ÉPISODES
DE LA VIE DE LA VIERGE (1467-1469) |
|
Baie 1, verrière de la Vie de Marie.
Années 1467-1469. |
Baie 1, soubassement, détail : un prophète
avec son chapeau d'époque Louis XI. |
|
Baie
1 - Vie de la Vierge.
Cette verrière illustre les premiers
épisodes de la Vie de la Vierge. Réalisée
entre 1467 et 1469, offerte par Louis XI, elle est attribuée
par le Corpus Vitrearum à l'atelier
principal (voir plus
haut).
Au registre supérieur : Éducation de la
Vierge ; Présentation de la Vierge au Temple
; Mariage de la Vierge. Au registre inférieur
: Annonciation ; Visitation ; Nativité.
Dans le tympan, le pétale central du lys montre
Gédéon agenouillé devant la toison
de laine (ci-contre à droite). L'ange qui se
tient debout derrière lui a été
restauré au XVIe siècle.
Cette verrière est jugée par le Corpus
Vitrearum comme bien conservée ; ses verres
sont peu altérés.
À noter, dans le soubassement, la présence
de prophètes en grisaille relevée de jaune
d'argent.
La verrière a été restaurée
en 1897 par l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
Note : dans la Bible (Livre des Juges),
Gédéon, de la tribu de Manassé, est appelé
par Yahvé pour vaincre les Madianites. Il demande
à Dieu deux preuves qu'il sortira bien vainqueur
de la lutte. À cette fin, il dispose une toison
de laine dans un champ : 1) au premier matin, la toison
doit être couverte de rosée, mais pas le champ
; 2) au second matin, le champ doit être couvert de
rosée, mais pas la toison.
Yahvé s'exécute et Gédéon part au combat...
C'est ce qu'on appelle le miracle de la rosée.
|
|
Baie 1, la Présentation de la Vierge au temple, détail
: Anne et Joachim.
|
Baie 1, la Nativité, détail : Joseph devant
l'Enfant. |
|
Baie 1, tympan, détail : Gédéon
agenouillé
devant la toison de laine. |
Baie 1, l'Annonciation, détail : l'Archange Gabriel.
Pièces montées en chef-d'uvre
dans la bordure du manteau. |
Baie 1, la Nativité, détail : Marie devant
l'Enfant. |
|
Baie 1, le Mariage de la Vierge, détail. |
Baie 1, la Visitation, détail : la Vierge et sa
cousine Élisabeth. |
Baie 1, l'Annonciation, détail
---»»»
La Vierge de l'Annonciation.
Vers 1467-1469.
|
|
|
|
BAIE 2 - L'ENFANCE
DU CHRIST (1467-1469) |
|
Baie 2, verrière de l'Enfance du Christ.
Années 1467-1469. |
Baie 2, la Présentation au temple, détail : les
témoins. |
Baie 2, la Fuite en Égypte, détail : Joseph. |
|
Baie
2 - l'Enfance du Christ.
Disposés dans trois lancettes, les six
panneaux de cette baie illustrent des épisodes
de l'Enfance du Christ.
Réalisée entre 1467 et 1469, offerte
par Louis XI, la verrière est attribuée
par le Corpus Vitrearum à l'atelier
principal (voir plus
haut).
Description des panneaux (qui ne sont pas dans
l'ordre chronologique) :
Registre supérieur : Annonce aux bergers
; Circoncision ; Adoration des mages.
Registre inférieur : Présentation
au Temple ; Fuite en Égypte ; Jésus
parmi les Docteurs de la Loi.
Le soubassement des lancettes est peuplé
de figurines très restaurées parmi
lesquelles les prophètes Abdias et Balaam.
La verrière a été restaurée
en 1897 par l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette.
Elle est jugée bien conservée par
le Corpus Vitrearum.
Dans le tympan, des anges sont accompagnés
d'un écu aux armes de France.
Source : Corpus
Vitrearum, les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
Baie 2, l'Annonce aux bergers, détail :
un berger. |
Baie 2, l'Adoration
des mages, détail :
un mage présente une offrande ---»»»
|
|
|
Baie 2, la Fuite en Égypte, détail. |
|
|
Baie 2, la Présentation au temple, détail. |
Baie 2, le registre inférieur.
La Présentation au Temple ; la Fuite en Égypte
; Jésus parmi les Docteurs de la Loi. |
|
BAIE 3 - VIE DE
LA VIERGE (ANNE ET JOACHIM) (1467-1469) |
|
Baie 3, verrière de la Vie de la Vierge (Anne et Joachim).
Années 1467-1469. |
Baie 3, Annonce à Joachim, détail : Joachim. |
|
Baie
3 - Vie de la Vierge (Anne et Joachim).
La verrière de cette baie illustre les épisodes
bibliques concernant Anne et Joachim, des épisodes
qui vont conduire à la naissance de la Vierge.
Réalisée entre 1467 et 1469, offerte par
Louis XI, la verrière est attribuée par
le Corpus Vitrearum à un atelier rouennais
(voir plus
haut).
Registre
supérieur : Anne et Joachim sont en prière
dans le Temple ; leur offrande est refusée parce
qu'ils n'ont pas d'enfant (extrait ci-contre à
droite) ; Annonces simultanées de deux anges
à Anne et Joachim qu'ils auront bientôt
un enfant.
Registre inférieur : Rencontre
d'Anne et Joachim à la Porte dorée
(où ils réalisent qu'ils ont chacun reçu
l'annonce d'un ange) ; Naissance
de la Vierge ; Marie
Cléophas et Marie Salomé, surs
de la Vierge, avec leurs fils (qui sont tous de futurs
apôtres).
Le soubassement au bas de la lancette centrale contient
la scène de l'approbation par le pape Innocent
III de la règle de l'ordre des franciscains que
lui présente saint François d'Assise.
La scène, donnée plus
bas, est réalisée en grisaille relevée
de jaune d'argent.
Quant au tympan, les vitraux de la fleur de lys illustrent
un miracle qui n'a été interprété
qu'au XXe siècle. C'est le miracle
posthume de saint François : un condamné
à mort implore la Vierge au Monte Inferno, lieu
de sépulture du saint, où était
dressé le gibet.
La verrière a été restaurée
en 1896 par l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette,
puis à nouveau en 2000 par l'atelier Tisserand.
L'ensemble est jugé assez bien conservé
par le Corpus Vitrearum ; les verres sont peu
corrodés.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
Baie 3, détail : leur offrande étant refusée
parce qu'ils n'ont pas d'enfant,
Anne et Joachim sont chassés du temple.
Années 1467-1469.
|
Baie 3, Rencontre à la Porte dorée, détail.
L'arcade de la Porte où le couple se retrouve contient
douze pièces montées en chef-d'uvre. |
Baie 3, les deux surs de la Vierge, détail
: Marie Cléophas et Marie Salomé. |
|
Baie 3, les deux surs de la Vierge, détail : les
fils des deux Marie.
Ils portent tous des auréoles car ils seront tous apôtres. |
Baie 3, registre supérieur (1467-1469).
De gauche à droite : Anne et Joachim sont en prière
au Temple ;
leur offrande est refusée (par le grand-prêtre) parce
qu'ils n'ont pas d'enfant ;
Un ange annonce à Anne et à Joachim, chacun de leur
côté, un futur enfant (Marie). |
Baie 3, tympan, détail : le miracle posthume de
saint François. |
Baie 3, la Naissance de la Vierge, détail. |
|
Baie 3, soubassement, détail :
Saint François d'Assise reçoit du pape Innocent
III l'approbation de sa règle. |
Baie 3, soubassement, détail : deux prophètes |
|
Le côté sud de la chapelle de la Mère de Dieu et ses vitraux
des années 1467-1469.
De gauche à droite : les baies 0,
2, 4, 6
et 8. |
BAIE 4 - LA GLORIFICATION
DE LA VIERGE |
|
Baie 4, verrière de la Glorification de la Vierge.
Années 1467-1469. |
L'homme
aux besicles (1/3).
On ne sait pas qui a inventé les lunettes, plus
exactement les verres correcteurs permettant aux presbytes
de lire les documents. À l'origine, cette découverte
était une aide précieuse pour les moines.
Les besicles ne sont pas exactement des lunettes puisqu'il
n'y a pas de montants pour les faire tenir sur les oreilles.
Néanmoins l'utilisation de ce mot s'est imposée,
même chez les historiens du Moyen Âge.
Les besicles apparaissent au XIIe siècle, vraisemblablement
en Italie. «À Venise, grand centre de production
du verre, les lunettes étaient devenues un objet
d'usage courant dès la fin du XIIIe siècle»,
écrit Chiara Frugoni dans Le Moyen Âge
sur le bout du nez (Les Belles Lettres, 2011).
Chiara Frugoni, historienne reconnue dans le monde des
médiévistes italiens, apporte une distinction
intéressante entre les lentilles grossissantes
et les lunettes. «La lentille grossissante, écrit-elle,
permet au presbyte de voir parce qu'elle augmente
la taille des objets. Les lentilles biconvexes des lunettes,
en revanche, suppléent à la convexité
insuffisante du cristallin des personnes presbytes et
font ainsi voir distinctement les objets dans leur
dimension réelle.»
Ajoutons ici une précision donnée en note
par Gary Blumenshine (voir sources). Selon un
article de l'historien Lynn White Jr. dans l'ouvrage,
paru en 1978, Medieval Religion and Technology,
les lunettes étaient un symbole de perspicacité
et incarnaient, à la fin du Moyen Âge,
l'expansion de l'éthique bourgeoise. Elles avaient
la faveur de la classe commerçante et lettrée.
---»» Suite 2/3
à droite.
|
|
Baie 4, détail : sainte Hélène tenant
la Vraie Croix.
Elle foule aux pieds un démon, comme le fait sainte Marguerite. |
|
Baie
4 - La Glorification de la Vierge (1/2).
Cette verrière, l'une des plus intéressantes
de la chapelle, a été restaurée
en 1896 par l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette.
En 1990, dans les Annales de Normandie, l'historien
Gary B. Blumenshine a largement développé
ses vues sur le contenu, plus ou moins caché,
des scènes représentées.
Réalisée entre 1467 et 1469, la verrière
de la Glorification de la Vierge a été,
comme toutes celles de la chapelle, offerte par Louis
XI. Elle est attribuée par le Corpus Vitrearum
à l'atelier principal (voir plus
haut).
Le registre supérieur est coupé en deux
par un meneau simulé qui joue le rôle de
pilier central. On assiste ainsi à deux scènes
: à gauche, une Dormition
avec les apôtres ; à droite, les Funérailles
de la Vierge à travers les rues de Jérusalem.
Au-dessus de ce registre, en médaillon : le Couronnement
de la Vierge par la Trinité.
Le registre inférieur contient sainte
Hélène, mère de l'empereur
Constantin, tenant la Vraie Croix ; saint
Luc peignant la Vierge à l'Enfant ; la Vierge
recouvrant de son manteau le pape Paul II, le cardinal
Jean Balue, Louis XI et sa suite, une scène appelée
généralement la Vierge au manteau.
Au tympan : Moïse
et le buisson ardent.
Dormition : Tous les apôtres sont revenus
miraculeusement auprès de la Vierge pour sa montée
au ciel annoncée par l'ange de la Seconde Annonciation.
Mais ils sont treize autour du lit ! Voir plus bas le
commentaire sur l'homme
aux besicles et son identité.
Funérailles de la Vierge : l'épisode
est raconté dans la Légende dorée
de Jacques de Voragine. Le Christ, réapparu,
a demandé aux apôtres de porter le cercueil
de sa mère dans la vallée de Josaphat.
Il faut donc traverser Jérusalem. Des Juifs de
la ville, pour qui Jésus est un perturbateur
de l'ordre établi, s'opposent au passage. Le
prince des prêtres, qui les entraîne, s'agrippe
au cercueil, mais ses mains restent collées sur
le bois, puis se détachent des avant-bras, tandis
que les autres Juifs sont aveuglés. Voir la scène
plus
bas.
Contrairement à la même scène traitée
dans un vitrail de Valentin Bousch à la basilique
Saint-Nicolas
à Saint-Nicolas-de-Port, le peintre de l'atelier
principal a respecté le récit de l'évêque
Voragine : aucun soldat ne s'y trouve. Le prince des
prêtres serait le juif Jéphonias.
Selon les pratiques du temps, endossant le rôle
du méchant, il est représenté la
tête en bas.
Comme les verrières de la chapelle ont été
expressément commandées et payées
par Louis XI, l'historien Gary Blumenshine n'hésite
pas à voir dans ces funérailles une analogie
avec la lutte de la monarchie des Valois, et de Louis
XI en particulier, contre ses ennemis. Ainsi les opposants
qui s'agrippent au cercueil de la Vierge, ce sont les
rebelles de la Ligue du Bien Public qui s'attaquent
au pouvoir royal en 1465. Les Juifs aveuglés,
ce sont les nobles complices et traitres. Jéphonias,
le prince des prêtres, représenté
la tête en bas et la langue pendante, tout comme
son voisin qui tire la langue (voir image plus
bas), «ont été peints avec tant
de soin qu'ils pourraient être des portraits contemporains.»
Blumenshine précise qu'il était courant
de renverser de bas en haut les armoiries d'un noble
tombé en disgrâce. De plus, «une
cérémonie de destruction physique et symbolique
avait été instaurée à la
fin du Moyen Âge à l'encontre des nobles
coupables de trahison.»
Gary Blumenshine analyse la cécité qui
frappe les Juifs opposés au passage du cercueil
comme le soutien céleste à l'Église
de France. En effet, une lourde taxe (le dixième)
avait été instaurée par le pape
Paul II en 1467 pour financer la croisade contre les
Turcs. Et Jean Balue, évêque d'Évreux
et ami de Louis XI, comptait parmi les percepteurs de
cette taxe. «La représentation dramatique
de la colère divine contre l'infidèle
[les Juifs], écrit Blumenshine, avait peut-être
pour but de conforter la perception de ce dixième.»
Mais le symbolisme de l'historien va peut-être
un peu loin... ---»» Suite 2/2
plus bas.
|
|
Baie 4, détail de la Dormition. |
L'homme
aux besicles (2/3).
---»» Autre ajout : dès l'Antiquité,
on avait découvert qu'étant convexe le miroir
renvoyait une image agrandie, mais inversée. Il
fallait donc un peu de pratique pour être capable
de lire le texte.
Chiara Frugoni précise : «cela représentait
un exercice somme toute assez facile, autrefois
commun chez les typographes, ou les graveurs qui
le pratiquent encore aujourd'hui.» On sait
que Léonard de Vinci s'amusait à écrire de la
sorte. Ajoutons que la lunette concave, qui corrige
la myopie, apparaîtra à la fin du XVe siècle.
Qui est l'homme aux besicles ?
Dans La Légende dorée, Jacques de Voragine,
reprenant les textes apocryphes, relate que saint
Denis, le disciple de saint Paul, a lui-même écrit
dans son livre sur les Noms de Dieu, qu'il
fut l'un de ceux qui assistèrent à la Dormition,
autrement dit au dernier sommeil de la Sainte
Vierge.
---»» Suite 3/3
à droite.
|
|
|
Baie 4, la Dormition, détail :
Denis l'Aréopagite avec ses besicles. |
L'homme
aux besicles (3/3).
---»» En 1990, constatant qu'il y
a treize apôtres autour de la Vierge
et s'appuyant sur La Légende dorée,
l'historien Gary Blumenshine conclut, d'une savante
analyse, que l'homme aux besicles n'est autre
que saint Denis de Paris, souvent confondu dans
les manuscrits français de la fin du Moyen
Âge avec saint Denis l'Aréopagite.
Ce surnom, nous dit Jacques de Voragine, vient
du faubourg d'Athènes où il demeurait
et où il s'adonnait à la philosophie.
L'apôtre Paul le convertit au christianisme
après avoir rendu la vue à un aveugle,
miracle dûment exigé par le philosophe
athénien pour croire en Jésus-Christ...
Gary Blumenshine donne trois autres arguments
intéressants pour justifier sa conclusion
: 1) le rouleau de parchemin que lit l'homme aux
besicles «indique une référence
à l'Antiquité et un statut presque
apostolique», deux aspects qui collent bien
à l'Aréopagite ; «les lunettes
de caractère bourgeois indiquent peut-être
un intérêt pour l'optique et le symbolisme
de la lumière étroitement lié à l'Aréopagite» ;
enfin, saint Denis de Paris est souvent inclus
dans l'iconographie mariale et monarchique française.
Gary Blumenshine analyse en effet cette verrière
comme une glorification de la monarchie des Valois
et le rôle de protecteur de cette monarchie attribué
à saint Denis.
Les églises d'Alençon
et de Villeneuve-sur-Yonne
possèdent chacune une verrière Renaissance
de la Dormition. Là aussi, on voit, au premier
plan, un homme aux besicles lisant un parchemin.
Sources : 1) Le
Moyen Âge sur le bout du nez de Chiara
Frugoni, éditions Les Belles Lettres, 2011
;
2) Le vitrail du Triomphe de la Vierge d'Évreux
et Louis XI. Le patronage artistique des Valois
dans la Normandie du XVe siècle, Annales
de Normandie, article de Gary B. Blumenshine,
40e année, n° 3-4, 1990.
|
|
|
Baie 4, détail de la Mater omnium : la
Vierge au manteau. |
|
Baie 4, détails de la Mater omnium :
Ci-dessus, le roi Louis XI devant la Vierge couronnée;
«««--- Le pape Paul II et le cardinal Jean
Balue
devant la Vierge couronnée.
Jean Balue a reçu la pourpre cardinalice en 1467. |
|
Baie 4, Dormition et Funérailles de la Vierge dans les rues de
Jérusalem. |
Baie 4, Hélène et la Vraie croix, détail. |
Louis
XI et les Juifs.
La verrière de la Glorification de la Vierge
contient la procession du cercueil de Marie dans les
rues de Jérusalem, une procession à laquelle
s'opposent les Juifs menés, selon La Légende
dorée, par le prince des prêtres. En
1990, dans les Annales de Normandie, l'historien
Gary Blumenshine relie cette Glorification à
la Monarchie des Valois et au prestige personnel de
Louis XI.
Ce faisant, Blumenshine s'élève contre
toute tentative d'associer la punition qui frappe les
Juifs à un quelconque antisémitisme du
roi. Au contraire, il rappelle le rôle de bienfaiteur
tenu par Louis XI auprès des communautés
juives de France.
Ainsi, dans les années 1440, lorsque le roi était
encore prince-dauphin et gérait le Dauphiné,
il «avait rendu aux Juifs leurs droits et avait
protégé activement leurs communautés
urbaines». Une fois sur le trône, ajoute
l'historien, Louis XI a cherché au moins une
fois à emprunter auprès d'un riche juif.
C'est pourquoi il ne faut pas voir dans cette verrière
une quelconque propagande antisémite «ni
habituelle ni utile au roi», même si cette
propagande est implicite dans les textes apocryphes
de la Vie de Jésus et de celle de Marie.
Source : Le vitrail
du Triomphe de la Vierge d'Évreux et Louis XI,
Annales de Normandie, article de Gary B. Blumenshine,
40e année, n° 3-4, 1990.
|
|
Baie 4, saint Luc peignant la Vierge, détail.
|
Baie
4 - La Glorification de la Vierge (2/2).
---»» La partie basse de la verrière
se compose de trois panneaux : sainte
Hélène tenant la Vraie Croix ; saint
Luc peignant la Vierge (avec un extrait ci-dessus) ;
et la Vierge
au manteau, appelée aussi Mater omnium.
Ce sont trois images de dévotion populaire liées
à la tradition artistique de la Maison des Valois,
et plus généralement à leur politique
de l'image dans la France du XVe siècle.
Hélène. Mère de l'empereur
Constantin, c'est la patronne des chevaliers du Saint-Sépulcre
et des confrères de la Sainte-Croix. Restée
dans l'Histoire en tant qu'impératrice ayant
découvert la Vraie Croix à Jérusalem,
sa présence dans la verrière servait indiscutablement
le prestige du roi Valois. Quinze ans plus tôt,
la guerre de Cent Ans s'était achevée
; l'économie et le commerce repartaient, mais
la dynastie valoisienne souffrait toujours d'un problème
de légitimité. C'est au titre de la controversée
loi salique que les Valois avaient hérité
du trône. Exit Isabelle de France ; exit son fils,
Édouard III d'Angleterre. Exit Jeanne, fille
de Louis X le Hutin, premier fils de Philippe le Bel.
En 1328, la couronne était passée à
Philippe VI de Valois, cousin germain de Charles IV
le Bel, mort sans héritier mâle.
Louis XI savait que sa branche manquait d'une assise
solide. «Le fait que la dynastie soit fragile,
écrit Gary Blumenshine, contrariait ses prétentions
à un statut "impérial" en France
en tant qu'héritière de Charlemagne et
successeur des Capétiens.» Le Roi est
Empereur en son Royaume était une maxime
rappelée à dessein dans les procédures
juridiques des Valois.
Par quels symboles relier Hélène à
la couronne de France ?
Premièrement, la sainte tient la Vraie Croix
à laquelle est accrochée la Couronne d'épines,
abritée depuis Louis IX dans la Sainte-Chapelle
de Paris. Deuxièmement, elle terrasse un démon
sous son pied, ce qui rappelle son rôle de thaumaturge,
un rôle qui revient aussi aux rois de France.
Et ce qui rappelle surtout sainte Marguerite (ce point
n'est pas évoqué par Blumenshine).
Sainte Marguerite est souvent représentée
terrassant un dragon ou un démon. Or cette sainte,
avec sainte Catherine et saint Michel archange, constitue
le trio des voix célestes de Jeanne d'Arc qui
lui ont demandé d'aller faire couronner le dauphin
Charles à Reims et de bouter les Anglais hors
de France. Reprendre l'iconographie de sainte Marguerite,
l'une des saintes les plus populaires à la fin
du Moyen Âge, c'est faire allusion à l'intervention
céleste qui a conduit au sacre du père
de Louis XI. Même si Charles VII et son fils ne
s'entendaient pas, on comprend bien qu'il fallait faire
feu de tout bois pour renforcer l'image de la dynastie.
Un petit coup de pouce du Ciel n'était pas à
négliger.
Troisième lien possible : Hélène
était regardée comme une sainte authentiquement
française car ses principales reliques se trouvaient
au monastère bénédictin de Hauvillers
dans le diocèse de Reims,
lieu du sacre des rois de France. Quatrième lien
: la sainte Hélène tombe un 18 août,
trois jours après le 15, jour de l'Assomption
et jour du sacre de Louis XI en 1461.
Enfin, cinquième et dernier lien : Hélène,
en tant que femme, rappelle que l'héritier du
trône, dans les années 1460 est Anne, première
fille de Louis XI, née en 1461. Et ceci malgré
la loi salique ! En effet, «Louis XI avait essayé,
sans succès, écrit Blumenshine, d'assurer
les droits d'Anne par son mariage avec Charles de Bourgogne.»
Selon la loi salique, en l'absence d'héritier
mâle, c'est Charles, frère de Louis XI,
qui monterait sur le trône à la mort du
roi. Ce qui créait un problème fâcheux
car Charles avait pris la tête des rebelles issus
de la noblesse dans la guerre du Bien Public en 1465.
L'affaire se résolut d'elle-même en 1470
par la naissance d'un fils, Charles, le futur Charles
VIII.
Saint Luc peignant la Vierge. Debout, avec ses
longs cheveux d'or et son bandeau orné de pierreries,
la Vierge tenant l'Enfant correspond aux Vierges flamandes
de la première moitié du XVe siècle.
La figure de saint Luc barbu, assis devant son chevalet
est issue des livres d'Heures du même siècle
produits pour la maison royale et la noblesse française.
Le panneau agrège donc deux traditions iconographiques.
Blumenshine signale que cette image de la Vierge à
l'Enfant peinte par saint Luc - un classique des miniatures
- se trouvait en tant que tel dans le livre d'Heures
d'Anne de Beaujeu. Ce livre date de l'année de
son mariage (1475) avec Pierre II de Bourbon et les
miniatures qui l'embellissent sont attribuées
à l'atelier de Fouquet.
Sur le plan des analogies, saint Luc, patron des médecins
est associé au roi qui dispose du pouvoir de
guérison par le toucher des écrouelles.
Est-ce pousser trop loin ? Blumenshine n'hésite
pas et relie ainsi la peinture de la Vierge au roi et
à la Maison des Valois.
La Vierge au manteau ou Mater omnium.
La présence du cardinal Jean Balue derrière
le pape Paul II permet de fixer la période de
création des verrières. En effet, Jean
Balue, ami de Paul II et de Louis XI, a été
nommé évêque d'Évreux en
1467, puis arrêté en 1469 sur l'ordre du
roi pour trahison, et enfermé. On en déduit
que les verrières ont été achevées
avant sa disgrâce.
La mater omnium est regardée comme la
protectrice des Valois, de la couronne de France et
de l'Église universelle. À la fin du Moyen
Âge, elle incarne aussi la protection divine en
période de troubles. L'historien Gary Blumenshine
voit dans cette représentation de la Vierge le
symbole du double pouvoir du souverain, qui est Empereur
en son Royaume. La théorie des deux corps
stipule que le souverain est à la fois une personne
privée et «une puissance publique créée
pour la sécurité de tous», pour
reprendre l'expression du théologien Jean de
Gerson (1363-1429). De fait, Louis XI, durant tout son
règne, n'aura de cesse d'organiser l'Église
de France pour la placer sous son autorité.
Dans ce panneau, le roi et le pape regardent au-dessus
d'eux, vers la Vierge au manteau. Ils contribuent donc
à relier les images iconiques des lancettes basses
au Triomphe de la Vierge de la partie haute. «Il
est tout à fait vraisemblable, écrit Blumenshine,
que cette direction du regard du roi est intentionnelle
dans une verrière dont le "message"
est le "couronnement" céleste comme
terrestre, passé, présent et futur.»
Pour l'historien, au-delà du regard du roi, l'il
du spectateur est porté vers le propre couronnement
du roi illustré dans le tympan des grandes baies
5,
6,
7 et
8.
Et encore au-delà, vers Anne, sa fille et unique
héritière (avant 1470).
Un constat global s'impose : ces nombreuses analogies
soulevées par Gary Blumenshine suscitent un intérêt
certain, mais quel a pu être vraiment le rôle
de ces verrières auprès du peuple si la
chapelle de la Mère de Dieu était la chapelle
privée des évêques d'Évreux,
comme il le laisse lui-même entendre ? Y célébrait-on
des messes ouvertes aux paroissiens ?
Sources : 1) Corpus
Vitrearum, les Vitraux
de Haute-Normandie ; 2) Le vitrail du Triomphe de
la Vierge d'Évreux et Louis XI. Le patronage
artistique des Valois dans la Normandie du XVe siècle,
Annales de Normandie, article de Gary B. Blumenshine,
40e année, n° 3-4, 1990.
|
|
Baie 4, détail
du tympan : Moïse et le buisson ardent ---»»» |
|
|
Baie 4, les Funérailles de la Vierge, détail
:
le prêtre juif Jéphonias qui tentait de
s'opposer
au passage du cercueil de la Vierge a eu ses mains
collées sur le cercueil, puis coupées.
Il est représenté la tête en bas comme symbole
du Mal. |
L'atelier
Duhamel-Marette.
Cet atelier, installé à Évreux,
a restauré tous les vitraux de la chapelle de
la Mère de Dieu dans les années 1895-1899.
Il a connu une forte activité entre 1860 jusqu'à
sa reprise en 1901 par un collaborateur, Maurice Muraire.
Celui-ci tombe au front en 1914, ce qui entraîne
la fermeture de l'atelier.
Les restaurations réalisées par Duhamel-Marette
se trouvent parmi les églises normandes les plus
vitrées : à Nonancourt, à Bernay,
aux Andelys ainsi qu'à l'église Saint-Vincent
à Rouen.
Sur ce plan, l'entreprise joue à égalité
avec l'autre grand atelier rouennais des dernières
décennies du XIXe siècle, celui de Jules
Boulanger.
L'historien du vitrail Michel Hérold fait remarquer
que ce succès arrive un peu tard car la grande
période du renouvellement du vitrail en Normandie,
au XIXe siècle, est déja passée.
C'est ainsi que les verrières de l'église
de Bonsecours à Rouen,
bâtie de 1842 à 1849, sont revenues à
un atelier parisien.
Aux origines de l'entreprise Duhamel-Marette, on trouve
Jean-Gabriel Marette (1808-1870), successeur
de son père et qui hissa le niveau technique
de l'atelier. Mais c'est surtout son gendre Louis-Gustave
Duhamel qui va accroître le développement
et la réputation de l'affaire dont la raison
sociale devient Duhamel-Marette en 1865. Le talentueux
Duhamel possède «une connaissance intime
du vitrail ancien, surtout du XVIe siècle, qui
lui permet de se forger un véritable style échappant
aux stéréotypes en cours», écrit
Michel Hérold.
Assise sur un bon réseau commercial, la production
répond à tous les budgets, mais ses uvres
suivent un style propre à l'atelier. «Les
plus soignées d'entre elles, poursuit Michel
Hérold, se font remarquer par un réel
sens de la mise en scène et par la multiplicité
des personnages, tous très typés.»
L'excellence du dessin est toutefois atténuée
par «une exécution brillante, mais fragile»
[Hérold].
On ne peut que regretter la disparition des sources
de cette entreprise ébroïcienne. Comment
y travaillait-on ? Le processus de création était-il
artisanal ou industriel ? Tout a disparu comme la majorité
des archives. À l'image de bien des ateliers
verriers au XIXe siècle.
Source : Histoires d'objets.
Regards croisées sur le patrimoine mobilier de
l'Eure, éditions SilvanaEditoriale, 2009,
article de Michel Hérold : L'atelier Duhamel-Marette
et le vitrail normand au XIXe siècle.
|
|
Baie 4, détail : le Couronnement de la Vierge. |
|
|
BAIE 5 - VIE PUBLIQUE
ET PASSION DU CHRIST - TYMPAN DU SACRE (1467-1469) |
|
Baie 5, verrière de la Vie publique et de la Passion
du Christ.
Années 1467-1469. |
Baie
5 - Vie publique et Passion du Christ (2/2).
---»» Registre
inférieur : Jésus au jardin des Oliviers
(ci-dessous) ; Jésus renverse les gardes venus
l'arrêter ou Ego
sum (scène rare tirée de l'Évangile
selon Jean) ; le Baiser
de Judas ; la Comparution devant Caïphe.
Tympan : trois Pairs de France assistent au sacre de
Louis XI. Voir les détails plus
bas. Le roi Louis XI et d'autres Pairs du Royaume
sont représentés dans les tympans des
baies 6,
7
et 8.
La verrière de cette baie est jugée corrodée
par le Corpus Vitrearum. Elle a été
restaurée en 1896 par l'atelier Duhamel-Marette
et, à nouveau, en 1999 par l'atelier J.P. Tisserand.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
|
Baie
5 - Vie publique et Passion du Christ (1/2).
Réalisée entre 1467 et 1469, cette verrière a été offerte
par Louis XI. Elle est attribuée par le Corpus Vitrearum
au même atelier rouennais que celui qui a réalisé la
verrière de la baie
3.
Au sein de quatre lancettes, les huit scènes sont représentées
dans des niches d'architecture voûtées
(ce qui est bien visible dans la photo ci-dessous),
sous de hauts dais ornés de statuettes et d'anges musiciens.
Les piliers qui encadrent les niches reçoivent
des apôtres et des saints en grisaille relevée
de jaune d'argent. Ces personnages sont d'un très beau
cachet artistique.
Registre supérieur : Jésus chasse les marchands
du temple et renverse les étals des changeurs (ci-dessous)
[ Rappelons que le Temple avait sa propre monnaie
; pour acheter des offrandes pour le Temple, il fallait
impérativement passer par les changeurs] ; la Cène
; le Repas
chez Simon avec Marie-Madeleine parfumant les pieds
du Christ ; le Lavement des pieds.
---»» Suite 2/2
plus bas à gauche.
|
|
Baie 5, détail : un prophète
dans le pilier d'une niche. |
Baie 5, Jésus chasse les marchands du temple
et renverse les étals des changeurs. |
|
Baie 5, Jésus au jardin des Oliviers.
L'étroitesse de la niche a conduit le peintre à ne pas
représenter un ange montrant au Christ le calice,
symbole de son obéissance au Père. |
Baie 5, Jésus au jardin des Oliviers, détail :
saint Pierre endormi. |
Baie 5, Jésus au jardin des Oliviers, détail :
saint Jean endormi. |
Baie 5, Jésus
au jardin des Oliviers, détail :
Les gardes du grand prêtre suivent Judas. ---»»» |
|
|
Baie 5, Jésus au jardin des Oliviers, détail. |
|
|
Baie 5, la Cène, détail. |
Le
tympan : les pairs de France au sacre de Louis XI le
15 août 1461 (1/2).
Il s'agit ici des tympans des baies 5,
6,
7
et 8
consacrés au sacre de Louis XI.
Il est rare de voir un sacre royal représenté
dans des vitraux, surtout avec les participants (et
pairs de France) éparpillés dans les soufflets
d'une vitrerie en forme de fleur de lys. On ne sait
à qui revient cette idée. Peut-être
au roi lui-même, commanditaire de tous les vitraux
de la chapelle de la Mère de Dieu.
Les pairs de France. Ils sont douze et se partagent
à égalité entre pairs ecclésiastiques
et pairs laïcs. Les historiens datent leur désignation
de l'année 1275. Pairs ecclésiastiques
: l'archevêque de Reims
et les évêques de Langres,
Laon, Beauvais,
Châlons et Noyon. Pairs laïcs : les ducs
de Normandie, de Bourgogne, de Guyenne et les comtes
de Champagne, de Toulouse et de Flandre.
Avec le temps, certaines de ces provinces ont été
absorbées par le Royaume et, au XVe siècle,
ces titres n'ont plus guère de signification.
Des membres des grandes familles royales proches du
roi les remplacèrent pour le sacre, mais en revêtant
les armoiries des pairs d'origine. Celles-ci sont présentes
à la fois sur les costumes et dans les pétales
des fleurs de lys qui entourent les personnages.
---»» Suite 2/2
plus bas.
|
|
|
Baie 5, le Repas chez Simon, détail. |
Baie 5, le Repas chez Simon, détail : Marie-Madeleine.
Les cercles blancs dans le nimbe sont du verre gravé
et non des montures en chef-d'uvre. |
|
Baie 5, registre inférieur (1467-1469).
De gauche à droite : Jésus au jardin des Oliviers ;
la parole de Jésus fait tomber les gardes venus l'arrêter
(Ego sum) ;
le Baiser de Judas ; Comparution devant Caïphe. |
Baie 5, le Baiser de Judas. |
Baie 5, tympan, détail :
un jeune prince représente le duc de Normandie tenant
la cornette royale, autrement dit l'étendard de cavalerie. |
Baie 5, le tympan ---»»»
Trois pairs de France assistent au couronnement
de Louis XI.
Voir les trois autres tympans du couronnement en baies
6,
7
et 8.
|
|
|
Baie 5, le Baiser de Judas, détail. |
Baie
5 - Ego sum.
Cet épisode de la Passion n'est évoqué que dans
l'Évangile selon saint Jean. Et il tient
en une petite phrase. L'extrait de l'Évangile
donné ici (éditions Salvator) est retranscrit
à l'indicatif présent.
La scène se déroule de nuit, au jardin des Oliviers.
Judas conduit les gardes du grand prêtre auxquels
se sont joints des soldats. Ils arrivent avec
des torches et des armes.
Jésus s'avance et leur demande : «Qui cherchez-vous?»
Ils répondent : «Jésus le Nazaréen.»
Jésus leur dit : «C'est moi. Je le suis»
[littéralement : Moi, je suis, - en latin
: Ego Sum]
Notons que l'évangile selon Jean ne mentionne
pas le baiser de Judas. C'est Jésus qui prend
l'initiative de se livrer.
Quand Jésus leur répond : «C'est moi. Je
le suis», ils reculent et tombent à terre.
Alors Jésus leur redemande : «Qui cherchez-vous?»
Ils répondent : «Jésus le Nazaréen.»
Jésus leur répond : «Je vous l'ai dit :
c'est moi, je le suis. Si c'est bien moi que vous
cherchez, ceux-là, laissez-les partir.»
Ainsi s'accomplit la parole qu'il avait dite :
«Je n'ai perdu aucun de ceux que tu m'as
donnés».
Vient ensuite l'épisode où Simon-Pierre coupe
l'oreille droite de Malcus, serviteur du grand
prêtre.
Cette chute des gardes est très rarement représentée
dans les vitraux de la Passion.
|
|
Baie 5, le Christ renverse les gardes d'une parole,
détail. |
Baie 5, soubassement : un prophète. |
|
Baie 5, le Christ renverse les gardes d'une parole.
Dans le soubassement : trois prophètes. |
|
|
BAIE 6 - LA PASSION
DU CHRIST - TYMPAN DU SACRE (1467-1469) |
|
Baie 6, verrière de la Passion du Christ.
Années 1467-1469. |
Baie
6 - La Passion du Christ.
Cette verrière a été réalisée,
comme ses voisines, entre 1467 et 1469, et offerte par
Louis XI à la cathédrale. Elle est attribuée
par le Corpus Vitrearum à l'atelier
principal (voir plus
haut).
Les quatre lancettes affichent huit scènes de
la Passion, toutes présentées dans des
niches d'architecture voûtées. Les niches
sont surmontées de dais complexes où s'étale
toute l'imagination du peintre.
Registre
inférieur : Comparution
devant Pilate ; Flagellation ; Couronnement d'épines
; Portement de croix. L'ensemble du registre inférieur
est donné plus
bas.
Registre supérieur : Crucifixion ; Déposition
de croix ; Déploration ; Mise
au tombeau.
On note encore des pièces montées en chef-d'uvre
et, parmi elles, une rareté : une double mise
en chef-d'uvre dans le manteau de Marie-Madeleine
(panneau de la Mise
au tombeau). Rappelons que la mise en chef d'uvre
consiste à insérer, dans une vitrerie,
un verre cerclé de plomb sans que ce plomb soit
relié au réseau global. C'est une prouesse
technique qui exige une grande maîtrise de la
découpe du verre.
Le tympan
de la baie 6 contient un trio de pairs de France assistant
au sacre
de Louis XI.
Quant au soubassement de la verrière, il est
évidé. On y voit de petites scènes
tirées de l'Ancien Testament, notamment le sacrifice
d'Abraham (donné plus
bas).
En l'an 2000, la verrière de cette baie était
jugée corrodée par le Corpus Vitrearum.
Elle a été restaurée en 1896 par
l'atelier Duhamel-Marette
et, à nouveau, en 1999 par l'atelier J.P. Tisserand.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
Baie
6, la Vierge de la Mise au tombeau a-t-elle trois mains
?
La photo, ci-contre à droite, extraite de la
Mise au tombeau, pourrait prêter à sourire
: la Vierge a-t-elle trois mains ?
En fait, la main la plus basse est celle de l'apôtre
Jean qui soutient la Mère du Christ. La possible
confusion vient du fait que l'artiste a peint les vêtements
de Marie et de Jean selon des bleus très proches
qui conduisent à unifier les deux personnages.
De plus, dans l'extrait de la lancette donné
ci-dessous, on voit que l'auteur du carton n'a pas donné
à l'apôtre un mouvement satisfaisant à
l'il : son bras droit (celui qui soutient la Vierge),
a l'air démesurément long ! De sorte qu'on
a vraiment l'impression que la Vierge a trois mains...
Dans le gros plan ci-contre, on voit néanmoins
que la main de Jean, par ses teintes sombres, a un aspect
plus masculin.
|
|
Baie 6, Mise au tombeau, détail.
La Vierge Marie a-t-elle trois mains ? |
|
Baie 6, la Mise au tombeau, détail. |
Baie 6, Comparution devant Pilate, détail. |
«««---
La composition de la Mise au tombeau souffre d'une maladresse
:
l'apôtre Jean soutient la Vierge dans sa douleur,
mais son bras droit
semble trop long car l'apôtre n'est pas assez proche
de la Vierge.
Si bien qu'on a l'impression que Marie a trois mains ! |
|
«««---Le
manteau de Marie-Madeleine contient une double mise en
chef-d'uvre. |
|
|
Baie 6, Mise au tombeau, détail. |
Baie 6, registre inférieur.
De gauche à droite : Comparution devant Pilate (qui se lave
les mains) ;
Flagellation ; Couronnement d'épines ; Portement de croix.
1467-1469. |
|
Baie 6, tympan : trois pairs de France assistent au couronnement
de Louis XI.
Voir les trois autres tympans du couronnement en baies 5,
7 et 8.
«««--- Baie 6, tympan, détail : Charles Ier
comte de Nevers, tient le rôle du comte de Flandre et porte le heaume
royal. |
Baie 6, soubassement, détails :
le Sacrifice d'Abraham et la Parabole des vignerons homicides. |
Le
tympan : les pairs de France au sacre de Louis XI (2/2).
---»» Lors du sacre, les pairs sont chargés
de porter les insignes royaux, appelés regalia,
gardés en temps ordinaire par les moines de Saint-Denis.
Le sacre lui-même se trouve dans le lys
central de la baie 7 : Louis XI reçoit l'onction
de l'archevêque de Reims
tandis qu'un clerc tient ouvert face à lui un
livre de cérémonie. Il est entouré
de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, qui tient la couronne
fleurdelisée et de l'évêque de Laon
qui tient la Sainte Ampoule.
Sont donnés en gros plan dans cette page :
En baie 5, un jeune
prince blond représente le duc de Normandie.
Il tient la cornette royale, autrement dit l'étendard
de cavalerie ;
En baie 6, Charles
Ier, comte de Nevers, tient le rôle du comte
de Flandre et porte le heaume ;
En baie 7, le duc
de Bourgogne, Philippe le Bon, premier pair laïc,
tient la couronne.
En baie 8, Jean
II, comte de Bourbon-Vendôme, remplace le
comte de Toulouse et porte les éperons.
Source : La
cathédrale d'Évreux d'Annick Gosse-Kischinewski
et Françoise Gatouillat, Les Colporteurs, 1997.
|
|
Soubassements
Les soubassements des verrières de la chapelle
contiennent tous des saynètes. Parfois très
simples : ce sont des prophètes
tenant des phylactères relatifs à leur
enseignement. Ou plus élaborées et affichant
plusieurs personnages : ce sont des épisodes
tirés de la Bible ou de l'histoire du christianisme
(comme l'approbation
par le pape de la règle des Franciscains).
Le soubassement ci-contre montre le Sacrifice d'Abraham
et la Parabole des vigneorns homicides. On donne plus
bas Gédéon
et Tobie.
|
|
|
BAIE 7 - LA VIE
PUBLIQUE DU CHRIST - TYMPAN DU SACRE (1467-1469) |
|
Baie 7, verrière de la Vie publique du Christ.
Années 1467-1469. |
Baie
7 - Vie publique du Christ.
De par son style, le Corpus Vitrearum attribue
cette verrière à l'atelier qui a réalisé
la vitrerie de l'abside de l'église Saint-Taurin
à Évreux, à l'exception toutefois
de la Transfiguration
(attribuée à l'atelier principal
- voir plus
haut).
Offerte par Louis XI, réalisée entre 1467
et 1469, cette verrière contient quatre lancettes
et deux registres. Son tympan affiche trois fleurs de
lys.
Les huit scènes sont incluses dans des niches
surmontées de dais et délimitées
par des colonnes enrichies de statuettes.
Registre inférieur : les
Noces de Cana ; la
Femme adultère ; la Multiplication des pains
; la Résurrection de Lazare.
Registre
supérieur : Jésus
et la Samaritaine ; la Tentation du Christ (voir
Satan plus
bas) ; l'Entrée à Jérusalem
; la Transfiguration.
L'ensemble du registre supérieur est donné
plus
bas.
On remarque de nombreuses pièces montées
en chef-d'uvre.
Le tympan de la baie 7 donne la scène principale
du sacre
de Louis XI. Le soufflet sommital montre le roi
de France recevant l'onction de l'archevêque de
Reims. Dans le soufflet de gauche, le duc de Bourgogne,
Philippe le Bon et premier pair laïc, tient la
couronne. L'évêque de Laon tient la Sainte
Ampoule à droite.
La verrière a été restaurée
en 1895 par l'atelier ébroïcien Duhamel-Marette,
puis en 1998 par l'atelier J.P. Tisserand.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
Baie 7, la Résurrection de Lazare, détail.
Le cartonnier a dessiné deux personnages qui se bouchent
le nez.... |
|
Baie 7, registre supérieur.
De gauche à droite : le Christ et la Samaritaine ; Tentation
du Christ ;
Entrée du Christ à Jérusalem ; Transfiguration.
1467-1469. |
Baie 7, les Noces de Cana, détail.
Les cheveux du Christ ne sont pas relevés au jaune d'argent
contrairement à ceux des mariés. |
Baie 7, la Femme adultère, détail.
Voir le commentaire sur la Femme adultère et sur Jésus
chez Marthe et Marie
à la cathédrale
Saint-Samson de Dol-de-Bretagne. |
Baie 7, la Transfiguration.
Contrairement au reste de la verrière, ce panneau
a été exécuté par l'atelier principal. |
Baie 7, tympan, détail du Sacre de Louis
XI :
le duc de Bourgogne, Philippe le Bon,
premier pair laïc, tient la couronne. |
Baie 7, détail : un homme observe la femme
adultère. |
|
|
Baie 7, Jésus et la Samaritaine.
Le cartonnier a ajouté quatre apôtres à
la scène, or cet épisode
du Nouveau Testament s'est déroulé sans témoins.
|
Baie 7, la Tentation du Christ, détail : Satan. |
|
Baie 7, le tympan.
Deux pairs de Francs assistent au sacre de Louis XI : le duc de
Bourgogne et l'évêque de Laon. |
Baie 7, le tympan, détail : LE SACRE DE LOUIS XI.
Louis XI reçoit l'onction des mains de l'archevêque de
Reims, |
BAIE 8 - LA VIE
GLORIEUSE DU CHRIST - TYMPAN DU SACRE (1467-1469) |
|
Baie 8, verrière de la Vie glorieuse du Christ.
Années 1467-1469. |
Baie
8 - La Vie glorieuse du Christ.
Réalisée entre 1467 et 1469, offerte par
Louis XI, la verrière de cette baie est attribuée
par le Corpus Vitrearum à l'atelier
principal (voir plus
haut).
Disposées sur quatre lancettes, les huit panneaux
de la verrière affichent des épisodes
de la Vie glorieuse du Christ dans des niches d'architecture
voûtées, surmontées pour la moitié
supérieure de hauts dais très variés.
À noter le dais
de la troisième lancette qui arbore trois
statuettes de prophètes colorées.
Registre inférieur : Descente
de Jésus aux limbes ; Repas à Emmaüs
; Apparition à Marie-Madeleine ; Incrédulité
de saint Thomas. Ce dernier panneau a été
restauré.
Registre supérieur : Résurrection ; Ascension
; Pentecôte ; Jugement
dernier.
Tympan
: quatrième et dernière composante du
sacre de Louis XI (les autres composantes sont dans
les tympans des baies 5,
6
et 7).
Au soubassement, présence de saynètes
en grisaille relevée de jaune d'argent : David
et Goliath ; Samson
et le lion ; Gédéon
réconforté par un ange ; Tobie
et l'ange.
Malgré une restauration en 1895 par l'atelier
Duhamel-Marette,
puis une autre en 1997 par l'atelier de J.P. Tisserand,
la verrière est jugée «peu restaurée»
par le Corpus Vitrearum.
En fait, de toutes les verrières de la chapelle,
les panneaux de la baie 8 sont les plus dégradés.
Source : Corpus Vitrearum,
les Vitraux de Haute-Normandie.
|
|
Baie 8, le Repas à Emmaüs, détail. |
|
Baie 8, le Jugement dernier, détail : les âmes sortent des
tombeaux. |
Baie 8, l'Incrédulité de saint Thomas, détail : saint
Thomas.
Visage restauré en 1895. |
Baie 8, Apparition à Marie-Madeleine, détail :
le Christ. |
|
Baie 8, Descente de Jésus aux Limbes, détail : le Christ
et les Justes. |
Baie 8, la Résurrection, détail : un soldat
romain endormi. |
Baie 8, le tympan.
Trois pairs de France assistent au sacre de Louis XI. |
|
Baie 8, l'Incrédulité de saint Thomas, détail.
Le même carton a servi pour le Christ de saint Thomas
et le Christ de l'Apparition à Marie-Madeleine (image
au-dessus).
|
Baie 8, l'Ascension, détail.
Malgré les restaurations, ce panneau est resté
dégradé. |
Baie 8, le tympan, détail : un ange combattant.
Baie 8, tympan.
Détail du sacre de Louis XI ---»»
Jean II, comte de Bourbon-Vendôme,
remplace le comte de Toulouse
et porte les éperons. |
|
|
|
Baie 8, soubassement, détails :
À gauche, Gédéon conforté par un
ange ; à droite, Tobie et l'ange. |
Le dais de la troisième lancette abrite trois prophètes. |
|
Baie 8, soubassement, détails :
À gauche, David et Goliath ; à droite, Samson et le
lion. |
|
Documentation
: Livret et panneaux dans la cathédrale
+ «Congrès archéologique de France, Évrecin,
Lieuvin, Pays d'Ouche», Société française
d'archéologie, Paris 1984
+ «Congrès archéologique de France tenu à
Évreux en 1889», article d'Émile Travers
+ «La cathédrale d'Évreux» d'Annick Gosse-Kischinewski
et Françoise Gatouillat, Les Colporteurs, 1997
+ «Haute-Normandie gothique» d'Yves Bottineau-Fuchs, Éditions
Picard, 2001
+ «Les plus belles cathédrales de France» de l'abbé
J.-J. Bourassé, Alfred Mame et Fils Éditeurs, 1880
+ «L'architecture normande au Moyen Âge», Presses
Universitaires de Caen, éditions Charles Corlet, 1997
+ «Évreux, la légende des pierres» d'Annick
Gosse-Kischinewski, Froment Glatigny Éditeurs, 1988
+ «Corpus Vitrearum, les vitraux de Haute-Normandie»,
CNRS Éditions, 2000
+ «Le vitrail du Triomphe de la Vierge d'Évreux et Louis
XI» de Gary B. Blumenshine, Annales de Normandie, 40e année
n° 3-4, 1990
+ «Le Vitrail Français», éditions
Mondes, 1958
+ «Le Moyen Âge retrouvé» de Louis
Grodecki, Flammarion, 1991, article : Les verrières d'Évreux. |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|