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Aspect général de la frégate Berlin (au-dessus et à droite). L'emblème de la ville est représenté sur l'écusson du tableau de poupe.

La très belle poupe du Berlin
(ateliers de Ceuneau Marine)

On sait peu de choses sur la frégate Berlin bien que des archives en aient conservé les plans jusqu'à nous. Le vaisseau a été construit aux Pays-Bas pour le compte du prince Frédéric Guillaume de l'Etat du Brandebourg, dont Berlin était la capitale.

L'aspect général, assez svelte, du navire le fait ressembler à un galion. Les archives mentionnent quelques escarmouches : en 1675, il l'emporta sur la frégate française Royal de Dunkerque et, en 1676, il captura la goélette suédoise Maria.

Le Friesland, le type de vaisseau de ligne hollandais de deuxième rang. Il fut
lancé en 1663 et participa à la deuxième guerre anglo-hollandaise (1665-1667).

Les navires de ligne resteront dans l'Histoire navale comme la grande invention des Anglais au XVIIe siècle. La bataille de Dungeness fut le premier combat naval important de la première guerre anglo-hollandaise (1652-1654). Le combat, comme à l'habitude, se déroula en groupes séparés et les Anglais frôlèrent la catastrophe face à une centaine de vaisseaux hollandais.
Cette défaite servit d'avertissement. Las de l'absence de véritable tactique sur mer, Georges Monk, général dans les armées terrestres et responsable de la flotte, décida d'appliquer sur mer les principes qui lui avaient valu ses succès en Ecosse et en Irlande.

Monk instaura la tactique de la ligne de file: tous les bâtiments devaient s'efforcer de rester en ligne l'un derrière l'autre, dans le sillage du navire de devant et combler les vides créés par une défection éventuelle. De la sorte, chaque vaisseau protège la poupe de celui qui le précède et toute l'artillerie peut être concentrée sur les flancs. La stabilité des vaisseaux en est améliorée. Mais cette tactique exigeait des équipages entraînés, un code des signaux, des marins spécialisés.

Une autre version de la poupe du Berlin (Ceuneau Marine)

Au-dessus : la poupe du Friesland, vaisseau hollandais. Quand ce n'est pas l'emblème de la ville, c'est celui de l'Etat, membre des Provinces-Unies, qui figure sur le tableau de poupe.

A l'extrême gauche : la poupe du Friedrich Wilhelm, frégate allemande construite au XVIIe siècle pour protéger le port d'Emden contre les attaques des vaisseaux français.

La ligne de file fut mise en pratique dès le combat suivant, celui de Portland, le 28 février 1653. Le résultat ne fut pas concluant. Néanmoins, les Anglais l'appliquèrent à nouveau à la bataille suivante, celle de Gabbard Bank, le 12 juin. Cette fois, ce fut un grand succès. Les Hollandais ne parvinrent pas à briser le mur de canons érigé par leur adversaire. La ligne de file allait s'imposer comme la seule tactique navale admissible dans toutes les marines européennes jusqu'au XIXe siècle. Dans la pratique, si les deux adversaires l'appliquaient avec la même rigueur, le combat naval ne pouvait être qu'une partie nulle comme à Ouessant entre Français et Anglais en 1778.
Pour l'heure, l'apparition de la ligne de file modifia la hiérarchisation des navires. Auparavant classés selon le tonnage et la taille, ils allaient l'être désormais selon leur puissance de feu. La ligne de file se veut rigide, elle exige donc des navires aux forces comparables. En effet, un bâtiment moins puissant créerait une faiblesse facilement repérable et attaquable dans la chaîne. Le navire de guerre efficace prit alors le nom de vaisseau de ligne. Il possédait deux ou trois ponts, une cinquantaine de canons au minimum, mais il était lourd, peu maniable et assez lent.

 
Au-dessus : la poupe d'une autre frégate allemande : le Wappen
von Hamburg. Les armes de la ville figurent sur le tableau de poupe

Dès la deuxième moitié du XVIIe siècle, il était clair que le vaisseau de ligne ne pouvait pas remplir toutes les tâches à la mer. Il fallait concevoir une unité rapide, aisément manœuvrable, évidemment moins armée. Ce fut la France qui donna le ton. Colbert chargea les architectes de définir son profil : la frégate était née. Elle fut d'abord caractérisée par l'emploi de petits vaisseaux à deux ponts ou de bâtiments plus modestes, dénommés "frégates légères". A la fin du XVIIe siècle, les frégates ne possédaient que 20 à 40 canons, mais, au siècle suivant, ce nombre passa de 40 à 60. On abandonna le concept de frégate "légère" pour une frégate plus "moderne" dont l'artillerie et les dimensions ne cesseront de croître au cours du siècle.
Les premières frégates furent utilisées pour patrouiller sur les voies navigables. Puis elles escortèrent les bâtiments de charge et assistèrent les navires de ligne. Au XIXe siècle, elles furent les précurseurs des croiseurs d'aujourd'hui, avec des formes plus légères, un déplacement moins élevé, bref un carénage plus fragile. Leur rôle consistait à détruire les navires ennemis endommagés ou, au contraire, à secourir les navires endommagés de leur propre flotte.


Aspect général du Wappen von Hamburg (ateliers de Ceuneau Marine)

Maquette en teck de La Flore,
frégate française de la fin du XVIIIe siècle

La voilure des frégates n'avait rien de révolutionnaire. Le navire possédait trois mâts gréés de trois ou quatre voiles carrées, avec une voile latine ou une brigantine sur l'artimon.
Les frégates se répandirent dans tous les pays européens et en Amérique. Au XVIIe siècle, les Etats allemands en firent construire, parfois par les chantiers navals hollandais. Ce fut le cas du Berlin. Le Friedrich Wilhelm, dont on donne plusieurs représentations, était une puissante frégate de 56 canons sortie des chantiers de Pillau. Elle se consacra à la défense du port d'Emden contre les attaques des vaisseaux français, puis aux voyages au long cours vers l'Afrique.

 
  La proue du Wappen von Hamburg (Ceuneau Marine)

On appelle pavois la partie de la coque qui se prolonge au-dessus du pont et qui sert de garde-corps. On remarque sur le Berlin un pavois très haut, percé, sur chaque côté, de quatre sabords (cinq exactement si l'on rajoute celui disposé sous le pont du gaillard d'arrière). Ces pavois servaient à la protection des matelots et plus particulièrement des canonniers lors des affrontements navals.
Sur la frégate Berlin, le pavois fait partie intégrante du bordé. Sur d'autres navires, le pavois était simplement constitué d'une double rangée de filets entre lesquels on amassait les hamacs. Pendant les combats, la toile des hamacs roulés serrés servait de protection au personnel du pont contre les tirs de mitraille.

L'écusson du Wappen von Hamburg en bois peint

Le pont du Berlin avec sa chaloupe

A côté du tir de mousqueterie, œuvre de fusiliers adverses groupés ou isolés, le principal danger qui guettait les hommes sur le pont était les boulets ennemis.
Il y avait les simples boulets : sphères en fer, parfois en plomb ou en pierre, fondus ou taillés au diamètre de la pièce. Puis, les anges : deux boulets étaient reliés par une chaîne et s'envolaient vers le gréement du bâtiment ennemi. Il y avait aussi des projectiles plus sophistiqués : les grappes de raisin et les boîtes à mitraille. La grappe de raisin était un assemblage de petits boulets de faible diamètre dans un sac de toile ficelé. La boîte à mitraille était un cylindre chargé de balles de fusil pour tuer l'équipage ennemi à courte distance.

Anges, deux boulets reliés par une chaîne

Grappe de raisin

L'histoire des combats navals est emplie de ces matelots ou officiers qui avaient une jambe arrachée par un boulet ou, pis encore, qui étaient décapités par des "anges". La puissance des canons, l'arsenal des projectiles transformaient les affrontements en mer en véritables carnages.
L'amiral Nelson, à Trafalgar, fut mortellement atteint d'une balle tirée par un fusilier français depuis la hune du Redoutable. Le lieutenant amiral général hollandais Michel de Ruyter, quant à lui, fut victime d'un boulet qui l'atteignit grièvement aux jambes, à la bataille d'Agosta en 1676, face à la flotte française commandée par Duquesne. De Ruyter mourut de ses blessures une semaine plus tard.

Boulets

Boîte à mitraille

Poupe de la frégate Wappen von Hamburg en acajou, sculptures en bois de cyprès ciré

 
Berlin (XVIIe siècle)