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Page créée en déc. 2022
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Un ange assiste la Vierge lors de son Assomption (baie 122)

Les origines de l'église sont obscures et partiellement légendaires. On y trouve le roi mérovingien Chilpéric Ier, saint Landry, saint Germain d'Auxerre, sans pouvoir rien démêler. Sous le règne de Charlemagne, un sanctuaire existait déjà, brûlé par les Normands, et rebâti au début du XIe siècle. Enfin, au XIIe, on entreprit des travaux dont on ignore l'ampleur. A-t-on élevé un édifice entier ? De cette époque, seule la tour romane qui abrite le clocher est parvenue jusqu'à nous.
Au XIIIe siècle, la population du quartier s'accroît. Une nouvelle église, plus vaste, est érigée dans la seconde moitié du siècle. Selon l'histoire traditionnelle de l'église, seuls le chœur, la chapelle de la Vierge dans le bas-côté sud et le portail d'entrée à l'ouest nous en restaient, seuls vestiges du XIIIe siècle. Cependant, l'historienne Agnès Bos, dans Les églises flamboyantes de Paris (2003), remet en cause cette datation. Des documents d'époque portent la trace de très importants travaux entrepris vers le second quart du XIVe siècle. C'est donc cette époque qui doit plutôt être retenue pour l'antériorité du chœur actuel et peut-être aussi de la chapelle de la Vierge.
Hormis la Sainte-Chapelle, Saint-Germain-l'Auxerrois est la seule église médiévale parisienne à posséder un porche. À quoi est due cette particularité ? Voir plus bas.
L'église est à la fois collégiale et paroissiale. Le chapitre de chanoines qui l'administre est présidé par un doyen relevant de l'évêque de Paris. Une partie de l'édifice, dont la chapelle de la Vierge, est attribuée au culte des paroissiens. Ce qui provoque parfois des heurts avec les chanoines.
Aux XVe et XVIe siècles, l'édifice est agrandi ou reconstruit par parties : nef, double-bas-côté nord, déambulatoires nord et sud, chapelles et chevet. Saint-Germain-l'Auxerrois, à côté du Louvre, avait un statut particulier : c'était l'église de la Cour. Sans doute, de beaux vitraux médiévaux historiés garnissaient-ils les baies, mais tout a disparu, à l'exception de ceux du transept. Dans son exigence de lumière, le XVIIIe siècle a fait place nette : les verrières de la nef et du chœur ont reçu du verre blanc. En 1744, le chapitre fut réuni à celui de Notre-Dame et l'église devint simple cure. Curé et marguilliers firent alors modifier le chœur pour le mettre au goût de l'art classique antiquisant. C'est le chœur actuel.
Arrive la Révolution. En 1793, l'église est fermée, puis transformée en magasin à fourrage, ensuite en imprimerie. Finalement, sous le Directoire, elle est abandonnée au culte théophilanthropique qui la rebaptise «temple de la Reconnaissance». En 1802, année d'application du Concordat, elle est rendue au culte catholique.
Après les Trois Glorieuses et le départ de Charles X, l'époque est à l'anticléricalisme et au rejet des légitimistes qui soutiennent le parti du roi en exil et de ses fils. Le 14 février 1831 se tient, à Saint-Germain-l'Auxerrois, une cérémonie en l'honneur du duc Berry (deuxième fils de Charles X), assassiné en 1820. Le lendemain, une foule déchaînée hurle à la provocation et met à sac l'édifice, sous les yeux de quelques soldats de la Garde nationale, qui restent passifs (voir plus bas). Les vitraux du premier niveau sont brisés, les ornements, détruits. Dans la foulée, les grandes verrières de l'abside seront déposées à cause de la présence de lys dans leurs bordures. L'historien Maurice Dumolin signale que, après la mise à sac, les bureaux de la mairie du 4e arrondissement sont installés à l'intérieur, et même une fabrique de ballons.
De 1838 à 1855, l'édifice subit une restauration intensive, dirigée par les architectes Jean-Baptiste Lassus et Victor Baltard. De nouveaux vitraux sont posés, issus de plusieurs ateliers, dont Maréchal de Metz, Thevenot et Lusson. Les grandes baies de la nef et du chœur reçoivent du verre blanc, embelli de formes géométriques, ce qui permet à la lumière de bien éclairer l'église. Le XIXe siècle va enrichir l'église en œuvres d'art : tableaux, peintures murales, sculptures.
Le Louvre hébergeait les artistes qui travaillaient pour la Couronne. Ceux-ci devenaient alors paroissiens de Saint-Germain-l'Auxerrois. Certains d'entre eux y ont leur sépulture : Coypel, Stella, Restout, Boucher, Coysevox, Coustou, etc.
Saint-Germain-l'Auxerrois est l'une des principales églises gothiques de Paris. On y trouve actuellement beaucoup d'œuvres d'art, la plupart du XIXe siècle. Néanmoins, deux œuvres antérieures sont dignes d'intérêt : un retable flamand du début du XVe siècle et un triptyque marial du XVIe siècle. Les amateurs de vitraux pourront admirer les grandes verrières du transept datées du XVIe siècle, créées en partie par l'atelier de Jean Chastellain.
    Page 1 : l'extérieur de l'édifice, la nef et de ses bas-côtés ;
    Page 2 : le transept et les grandes verrières du XVIe siècle ;
    Page 3 : le chœur ; le déambulatoire nord ; le déambulatoire sud ; le chevet.

Le Christ dans «l'Incrédulité de saint Thomas» (baie 120)
Vue d'ensemble de la nef de Saint-Germain l'Auxerrois
Vue d'ensemble de la nef et du chœur de Saint-Germain-l'Auxerrois.
L'observateur attentif remarquera un très léger désaxement du chœur vers le nord.
ARCHITECTURE EXTÉRIEURE DE L'ÉGLISE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS
En face du le Louvre, de gauche à droite : l'ancienne mairie du 1er arrondissement de Paris, le beffroi élevé par Théodore Ballu entre 1858 et 1861 et l'église Saint–Germain l'Auxerrois
En face du Louvre, de gauche à droite : l'ancienne mairie du 1er arrondissement de Paris,
le beffroi, élevé par Théodore Ballu entre 1858 et 1861, et l'église Saint-Germain-l'Auxerrois.
L'archange Saint-Michel trône sur le pignon
L'archange Saint-Michel trône sur le pignon
de l'église. La statue date de 1841.

Architecture extérieure (1/4).
La partie orientale de l'église (donnée ci-contre) ne présente guère d'originalité. Remarquons toutefois l'étonnante frise aux carpes au-dessus des trois baies de la chapelle axiale, visible dans la rue de l'Arbre-sec.
Cette moitié extérieure, qui enveloppe le chœur, est sobre. Un garde-corps uniforme lie dans un même bloc les chapelles qui bordent le déambulatoire. Les grandes fenêtres du second niveau sont peu visibles depuis la rue. Néanmoins, on peut voir, entre le couvrement des chapelles, les arcs-boutants dont les culées sont ornées d'un pinacle à crochets. On obtient un très belle vue plongeante depuis le 3ème étage de la Samaritaine, le grand magasin parisien qui se trouve juste en face.
Le croisillon sud du transept se termine comme une véritable façade. Son élégante élévation est à trois niveaux. La partie basse en est donnée plus bas. Les quatre niches, qui ont perdu leurs statues depuis longtemps, sont coiffées de dais gothiques finement sculptés.
Notons que le côté nord de l'église, au moins pour la nef et le transept, n'est accessible qu'en passant par l'ancienne mairie du 1er arrondissement. C'est par le portail nord que les chanoines jadis entraient dans l'église en venant du quartier canonial. Ce portail est nettement moins travaillé que le portail sud.
Le clocher de Saint-Germain-l'Auxerrois est roman. Ses deux étages, ouverts de baies géminées en plein cintre, sont les seuls vestiges de l'église du XIIe siècle. Le couronnement est moderne. La cloche est datée de 1527. Le clocher se terminait jadis par une flèche ceinturée de clochetons. Elle a été supprimée dans les années 1740 dans le même temps que l'intérieur de l'église, perdant son chapitre de chanoines, était modifié selon les règles du classique antiquisant.
Le grand porche occidental est de loin la partie la plus intéressante de l'architecture extérieure. Il abrite trois portails possédant chacun une archivolte. Ces portails sont datés des années 1220-1230.
---»»» Suite 2/4 plus bas.

Côté sud de l'église avec son clocher dont une partie remonte au XIIe siècle
Côté sud de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois avec son clocher daté du XIIe siècle.

La tourelle octogone, flanquée contre le croisillon sud, abrite l'escalier à vis qui monte vers le chemin de ronde supérieur. Par là, on parvient au clocher.


Le dessin du garde-corps du côté nord (ci-dessus) est plus élégant que celui du côté sud.

L'abside et le côté sud de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois
vus depuis le troisième étage de la Samaritaine.
Le portail gothique du côté sud
Un beau portail gothique termine le bras sud du transept.
Les dais des niches sont particulièrement travaillés.
Le chevet de Saint–Germain l'Auxerrois fait face à la Samaritaine. À droite, une école.
Le chevet de Saint-Germain-l'Auxerrois fait face à la Samaritaine. À droite, une école.
La frise aux carpes se trouve sous le garde-corps de la chapelle axiale.
Paris, 1er arrondissement, rue de l'Arbre-sec.
La façade de l'«école de filles» à côté de l'église Saint–Germain possède un tympan orné d'un décor magnifique
Pour le plaisir des yeux...
La façade de l'«école de filles» à côté de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois possède
un tympan orné d'un magnifique bas-relief que l'on datera du XIXe siècle.

La frise aux carpes.
L'historien des rues de Paris, Jacques Hillairet, note, dans son Dictionnaire historique, que le chevet de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois présente une frise remarquable autour de sa chapelle axiale. Cette chapelle a été financée par un riche drapier, dénommé Jean Tronson, en 1505. La clé de voûte de la chapelle axiale, autrefois appelée chapelle Tronson, représente d'ailleurs les armoiries de sa famille. Le nom de cette chapelle est maintenant chapelle du Tombeau.
Le coin nord de la frise des carpes est donné en gros plan ci-dessous (le coin sud a été partiellement bûché). On voit, de chaque côté de l'écusson, la tête d'une carpe.
De façon très originale, le poisson est sculpté en plusieurs tronçons séparés par des feuillages, ce que la deuxième photo au-dessous montre clairement. Deux carpes y sont sculptées queue à queue. (C'est la frise du mur oriental de la chapelle axiale.)

Jacques Hillairet écrit que cette décoration viendrait d'une demande spécifique de Jean Tronson qui aurait accepté de financer la construction de la chapelle axiale à condition que le sculpteur, Jean Solas, exécutât pour lui des sculptures spécifiques sur la frise extérieure. Son vœu a été exaucé et ne laisse pas d'intriguer les passants. Pourquoi des carpes ? Pourquoi tronçonnées ? Est-ce un jeu de mot sur son nom de famille ? Ou bien le drapier avait-il des poissonniers dans sa parentèle ? Mystère.
Quoi qu'il en soit, si vous passez près de la Samaritaine, rue de l'Arbre-sec, dans le 1er arrondissement de Paris, n'oubliez pas de jeter un œil sur cette étonnante frise du tout début du XVIe siècle (qui aurait d'ailleurs besoin d'une restauration - les deux photographies ont été éclaircies).

Poissons et armoiries dans la frise qui orne le chevet de l'église
Carpes et armoiries dans la frise qui orne l'extérieur de la chapelle axiale de l'église. Ici le coin nord.
Poissons et armoiries dans la frise qui orne le chevet de l'église
Frise au-dessus de la baie centrale de la chapelle axiale de l'église :
deux carpes, sculptées queue à queue, sont découpées en tronçons séparés par des feuillages.
LE CÔTÉ NORD ET LE PORTAIL DES CHANOINES

C'est par ce portail, sur le côté nord, que les chanoines entraient dans l'église depuis l'enclos canonial.
Il donne actuellement dans une cour close, accessible depuis l'ancienne mairie du 1er arrondissement.

La rose nord au-dessus du portail.
LA FAÇADE OCCIDENTALE DE L'ÉGLISE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS
La façade occidentale de l'église Saint-Germain l'Auxerrois
La façade occidentale de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois date de la fin du XVe siècle.

Le porche, au nord et au sud, se termine par deux pavillons qui abritent des petites salles de fonction.
La grande rose a été détruite au XVIIIe siècle pour les besoins de l'orgue de tribune, puis
refaite par les architectes Godde et Lassus lors des restaurations du XIXe siècle.

Architecture extérieure (2/4).
---»»» Excepté le cas un peu particulier de la Sainte-Chapelle, Saint-Germain-l'Auxerrois est la seule église médiévale de Paris à posséder un porche en façade. Si l'on suit Agnès Bos dans son ouvrage Les églises flamboyantes de Paris (Picard, 2003), il y eut un premier porche édifié au XIVe siècle, puis un deuxième, bâti par Jean Gaussel vers 1435-1439 pendant l'occupation anglaise de la capitale. Enfin, un troisième aux alentours de 1490.
Tant à l'extérieur que sous abri, le porche est riche d'une décoration gothique foisonnante à base de feuilles de chou, de pampres, de dragons, de lézards et d'animaux fantastiques. Ces multiples sculptures nous sont parvenues quasiment intactes depuis la fin du XVe siècle. Les niches, groupées ou isolées, abritent toutes des statues modernes à l'exception de celle, bien dégradée, de saint François d'Assise. Celle de sainte Marie l'Égyptienne est une copie moderne de la statue d'origine, préservée maintenant dans la chapelle de la Vierge.
Saint-Germain-l'Auxerrois était l'église de la Cour. À ce titre, on peut s'attendre à trouver des détails remarquables, des richesses décoratives qu'on ne voit guère ailleurs. C'est ce qui se produit dans le dessin des voûtes, sous les dais des niches, et qui est parfaitement visible. On en donne des exemples plus bas. Agnès Bos écrit à ce sujet : «Ces voûtes, sexpartites ou en étoile, ont leurs petites clefs de voûte, en forme de fleur le plus souvent, et retombent sur de minuscules consoles factices elles-mêmes sculptées, en forme d'animal ou de feuillage.» Il y a d'ailleurs aussi des consoles factices en forme de tête humaine.
---»»» Suite 3/4 plus bas.

Sainte Isabelle de France dans le porche
Sainte Isabelle de France dans le porche.
Statue du XIXe siècle.
Socle du XVe siècle.

Un homme dort sur la voussure
de l'arcade nord du porche occidental.
XVe siècle.
Ornementations gothiques du porche de l'église Saint–Germain l'Auxerrois, vue partielle
Ornementations gothiques du porche de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, vue partielle.
Le porche abrite trois portails du XIIIe siècle (années 1220-1230).
Les extrados des arcades du porche sont riches d'une décoration sculptée (feuilles de chou, animaux fantastiques, lézards, loups, dragons, etc.).

Les sculpteurs de la fin du XVe siècle n'ont rien négligé : tous les dais des statues du porche ont des ogives factices.
Ici, le dais de la statue de sainte Clotilde.

Dais de la statue de sainte Bathilde.

Un singe au-dessus d'une voussure dans une arcade du porche ---»»»

«««--- Saint François d'Assise, XVe siècle.
C'est la seule statue d'origine qui se trouve encore sous le porche.
Statue de Charlemagne dans le porche
Statue de Charlemagne dans le porche
XIXe siècle,.
La niche est du XVe siècle.
Les sculpteurs médiévaux n'ont rien négligé : le dais des statues du porche est bâti en voûte ogivale
Les voûtes factices du dais de sainte Radegonde, reine de France.

Architecture extérieure (3/4). ---»» Le garde-corps qui domine le porche, ainsi que la rose, ont été refaits dans la première moitié du XIXe siècle. Au-dessus des portails nord et sud de la façade se trouvent deux petites salles carrés éclairées de deux baies géminées en plein cintre (photo plus haut). Elles renfermaient jadis les archives et le trésor. Maurice Dumolin, dans Les églises de France : Paris et la Seine (1936) rapporte que la salle au sud abritait le triptyque marial maintenant exposé dans le déambulatoire sud.
---»»» Suite 4/4 plus bas.

Statue de Marie l'Égyptienne
Statue de Marie l'Égyptienne.
C'est la copie moderne de la statue
du XVe siècle
qui se trouve
dans la chapelle de la Vierge.
La voûte ogivale de ce dais affiche une console en forme de tête humaine.
La voûte ogivale factice du dais de saint Marcel présente une console en forme de tête humaine.
L'entrée du porche gothique au sud
L'entrée du porche gothique au sud.
La statue sur la gauche (saint François d'Assise) est la seule statue du XVe siècle sous le porche.

Architecture extérieure (4/4). ---»» Agnès Bos souligne l'opposition manifeste entre la décoration luxuriante du porche et la sobriété de l'intérieur de la nef. Pour l'historienne, c'est un choix délibéré. Loin d'en conclure à la présence de plusieurs architectes, elle y voit plus simplement «la volonté de rejeter à l'extérieur de l'édifice l'ornementation purement décorative pour ne garder à l'intérieur que des lignes pures.» C'est souvent le même choix que l'on observe dans d'autres édifices parisiens de la même époque.
Sources : 1) Les églises flamboyantes de Paris d'Agnès Bos, éditions Picard, 2003 ; 2) Les églises de France : Paris et la Seine, article sur l'église par Maurice Dumolin, Librairie Letouzey et Ané, 1936

Vue d'ensemble des voûtes d'ogives devant le portail principal du  porche
Vue d'ensemble des voûtes d'ogives devant le portail principal du porche.
La voûte centrale est ornée du tétramorphe.
Le portail nord du porche occidental
Le portail nord du porche occidental.
La clé de voûte représente, en médaillon, l'Adoration des bergers.

Les portails latéraux nord et sud (1/2).
Le visiteur de l'église peut être intrigué par la physionomie des portails nord et sud de la façade occidentale (le portail nord est donné ci-contre). Il est clair qu'elle ne correspond pas à celle d'origine car l'archivolte n'occupe pas tout l'espace. Dans la photo, sur la gauche, une statue dans sa niche remplit le vide vertical créé par une modification du portail. Que s'est-il passé ?
Dans son ouvrage Les églises flamboyantes de Paris (Picard, 2003), l'historienne Agnès Bos s'est penchée sur la question. On sait que le premier porche date du XIVe siècle et que le deuxième, du XVe siècle, est l'œuvre de Jean Gaussel (vers 1435-1439). Au terme d'une analyse archéologique pointue, Agnès Bos arrive à la conclusion qu'on pourrait avoir là la preuve de la modification partielle du porche à la fin du XVe siècle, lors de sa reconstruction.
Les indices sont multiples. Notons les principaux : derrière la statue se trouve un escalier (muré), remplacé par un escalier à vis (toujours praticable) qui se trouve à droite de la porte dans un mur épaissi pour l'occasion ; de plus, «les arcs-doubleaux séparant les voûtes des pavillons des petites voûtes centrales à liernes et tiercerons, écrit Agnès Bos, sont comme tronqués du côté où ils pénètrent dans la maçonnerie du mur occidental de l'église» Les flèches, dans la photo ci-dessous le montrent clairement.
---»» Suite 2/2 ci-dessous.

La nef de l'église Saint-Germain l'Auxerrois vue depuis la croisée  du transept
Vierge à l'Enfant
sur le trumeau du portail central, détail.
XIXe siècle.
Cette statue a pris la suite d'un saint Germain
(ou d'un Christ-Roi) qui ornait
l'ancien trumeau, détruit en 1710.

Les portails latéraux nord et sud (2/2).
---»» Ainsi, il est fort probable que, en 1488, on ait pris le parti de conserver les pavillons latéraux au-dessus du porche (qui datent des années 1430) afin de ne refaire que la partie centrale. Même si le seul document d'époque qui nous reste de la reconstruction de 1490 précise qu'«il conviendra de faire ledit portail tout de neuf», Agnès Bos n'écarte pas la possibilité que le porche actuel soit le résultat de deux campagnes différentes.

La nef de l'église Saint-Germain l'Auxerrois vue depuis la croisée  du transept
Le porche vu du nord.
Les flèches bleues indiquent la marque
de la troncature des arcades.

Pourquoi un porche à Saint-Germain ? (1/3)
Compte tenu de la rareté du porche médiéval à Paris, la question doit être posée. Dans son ouvrage Les églises flamboyantes de Paris (Picard, 2003), l'historienne Agnès Bos apporte quelques idées de réponse.
D'une manière générale, en citant l'historien Nicolas-Michel Troche du XIXe siècle, elle rappelle qu'il y avait souvent de l'eau sous les porches pour se purifier et que l'endroit était le siège du juge ecclésiastique. C'est là qu'on y pratiquait les exorcismes et où se déroulaient d'«autres cérémonies». Mais Agnès Bos fait remarquer que les archives du chapitre ne mentionnent aucune cérémonie et que le porche était plutôt un lieu de rendez-vous, notamment quand le chapitre décidait d'une convocation à comparaître.
Les petites salles nord et sud au-dessus de ce porche offrent une autre piste. Celle du sud abritait les archives de la paroisse et le trésor de la fabrique. En quelque sorte, le porche est donc un lieu de mémoire ; il est possible que s'y tenaient les réunions de la fabrique. Au nord, la salle n'a pas une destination très claire.
Un autre point doit être pris en compte : la mise en interdit du royaume. Régine Pernoud dans son ouvrage Isambour, la reine captive (Stock, 1987) relate les faits en détails. Rappelons-les brièvement. Le 4 août 1193, le roi Philippe II Auguste, vingt-huit ans, épouse à Amiens la princesse danoise Ingeburg, qui restera dans l'Histoire de France sous le nom d'Isambour. ---»» Suite 2/3.

La Nativité dans la clé de voûte devant le portail nord du  porche
Médaillon en pierre représentant l'Adoration des bergers
dans la clé de voûte devant le portail nord du porche.
La Cène dans la clé de voûte devant le portail sud du  porche
Médaillon représentant la Cène dans la clé de voûte devant le portail sud
du porche. Sculpture en bois provenant de l'intérieur de l'église.
Adam et Ève sont cachés dans la voussure du portail sud du  porche. Ici Ève.
Adam et Ève sont cachés dans
la voussure sculptée du portail
sud du porche. Ici, Ève.
Bas-relief de la Cène dans la clé de voûte devant le  portail sud, détail
Bas-relief de la Cène dans la clé de voûte devant le portail sud, détail.
Les ogives devant le portail principal sont ornées du tétramorphe. Ici l'ange de Mathieu.
Les ogives devant le portail principal sont ornées
du tétramorphe. Ici, l'ange de Mathieu.
Adam et Ève sont cachés dans la voussure du portail  sud du porche. Ici Adam.
Adam et Ève sont cachés dans la voussure
sculptée du portail sud du porche. Ici, Adam.

Pourquoi un porche ? (2/3)
---»» Le couronnement de la reine doit avoir lieu le lendemain, après la nuit de noces. Mais, au matin, revirement total du roi qui ne veut plus approcher de sa jeune épouse et ne plus la voir. Pourquoi ? Cette question reste l'un des grands mystères de l'Histoire de France. Impuissance du roi ? Isambour a prétendu le contraire. C'est parole contre parole, rapportées par des intimes de bonne foi : un casse-tête insoluble. Toujours est-il que Philippe II va exiger qu'Isambour s'enferme dans un couvent. En 1196, il prendra une nouvelle épouse : Agnès de Méranie.
Mais Isambour, qui possède un caractère fort, en appelle au pape. De son côté, son père a le bras long. Le roi Philippe est reconnu bigame, une situation intenable au sein d'une civilisation chrétienne qui ne reconnaît que la monogamie. ---»» 3/3

Pourquoi un porche à Saint-Germain ? (3/3)
---»» Conséquence : le domaine royal est mis en interdit par le pape en janvier 1200. Pour être levé, Philippe doit reprendre Isambour et chasser Agnès.
À cette époque, le domaine royal comprend une bonne partie de la France du Nord, sans la Normandie : Parisis, Laonnais, Orléanais, Gâtinais, Vexin français, vicomté de Bourges, Amiénois, Artois et Vermandois.
Les critères de l'interdit sont draconiens. Les églises sont fermées, les sacrements prohibés, sauf le baptême des nouveau-nés. La communion est réservée aux malades en danger de mort. L'extrême-onction est interdite. Le prêtre peut célébrer la messe le vendredi uniquement ; seul le clerc qui l'assiste sera présent. Il est interdit d'enterrer les morts, ou même de déposer les corps, dans les cimetières parce que leur caractère de lieux consacrés est suspendu.
Certaines activités sont cependant autorisées, mais sous le portique de l'église quand il y en a un, sinon à l'air libre. C'est là qu'un porche prend toute son importance. Les prêtres ont le droit de prêcher le dimanche sous le portique, mais pas de dire la messe. S'ils bénissent, c'est uniquement les besaces des pèlerins, mais hors de l'église. Les confessions ont lieu sous le portique, devant tout le monde, les portes de l'édifice restant fermées. S'il n'y a pas de portique et s'il pleut (ou s'il fait mauvais temps), on ouvre l'une des portes pour entendre les confessions sur le seuil. Les autres fidèles resteront à l'extérieur. Quand les prêtres réciteront les heures canoniques ou liront les évangiles (toujours sous le portique ou à l'air libre), aucun fidèle ne devra les entendre.
À une époque où la religion impactait toutes les activités de la vie, l'interdit créait pour tous une situation très gênante et humiliante. Philippe Auguste réagit avec violence : il sanctionna les prélats trop zélés dans l'application de la sentence et durcit les conditions d'enfermement de la reine Isambour. L'interdit ne plaisantait pas : l'héritier du trône de France, le futur Louis VIII, dut se rendre en Normandie (territoire anglais) pour épouser la future Blanche de Castille ! Au bout de huit mois, le roi Philippe céda et s'engagea à reprendre Isambour...
Que s'est-il passé pendant ces huit mois d'interdit à l'église Saint-Germain-l'Auxerrois ? Nous savons que l'édifice a été reconstruit au cours du XIIIe siècle pour accueillir une population qui s'accroissait, mais quid de l'église antérieure ? Élisabeth Pillet rapporte qu'un portail occidental a été réalisé vers 1220-1230. Mais y avait-il déjà un portail et un porche en 1200 ?
Dans le cas positif, il a dû être très apprécié, autant par les officiants et les paroissiens que par le chapitre canonial (qui existait déjà à cette époque). Son rôle a-t-il imprégné la mémoire collective au point de devenir indispensable et d'être considéré comme partie intégrante de l'église ?
Dans le cas négatif, comme la paroisse était déjà l'une des plus vastes de la capitale, le besoin d'en bâtir un, pour diminuer la gêne d'un éventuel nouvel interdit, a pu s'imposer. À première vue, rien dans les archives de la paroisse ne donne d'information, mais la piste reste ouverte.

Sculpture gothique dans les voussures du porche
Sculpture gothique dans l'extrados des arcades.
Personnages dans les voussures du portail principal
Personnages dans les voussures du portail principal :
Apôtres et Vierges sages.
En haut, saint Jean tient un calice et la palme de martyre.
XIIIe siècle, peu restaurées.
Sculpture gothique dans les voussures du porche
Sculpture gothique dans l'extrados des arcades.
Voussures du portail principal : un démon fait bouillir les méchants
Voussure du portail principal :
deux démons font bouillir des damnés.
XIIIe siècle, peu restaurée.

Voussures du portail central du porche ---»»»
XIIIe siècle, peu restaurées.
À gauche : élus, damnés et anges ;
Au centre : Vierges folles (elles tiennent leurs coupes renversées) ;
À droite : les apôtres et l'instrument
de leur martyre.

«««--- Chouette
Archivolte du portail nord du porche.
XIVe siècle.

La destruction du trumeau au XVIIIe siècle.
Dans son Histoire du vandalisme (1959), l'historien Louis Réau (1881-1961) apporte une explication. Au XVIIIe siècle, la notion de patrimoine à sauvegarder n'existe pas. Le critère de fonctionnalité passe avant le reste. Quand il faut pratiquer un passage dans une église, tant pis pour les statues et les ornements sculptés. Dans ce cadre, Louis Réau rappelle que ce sont avant tout les portails qui ont pâti du vandalisme des chanoines. Les piliers médians, quand il y en avait, divisaient ces portails en deux moitiés. Ils avaient pour fonction de soulager le poids des linteaux, mais, à l'évidence, gênaient le passage des processions.
Réau écrit : «On s'en accommodait fort bien au Moyen Âge, puisque le dais processionnel était à cette époque une pièce d'étoffe souple portée sur des lances qui pouvait en se repliant, passer partout. Mais au XVIIIe siècle, la liturgie, qui passe pourtant pour être conservatrice et en principe immuable, introduisit l'usage de dais volumineux en bougran rigide, imités des ciels de lit à la polonaise, que les tapissiers parisiens avaient mis à la mode à l'occasion du mariage de Louis XV avec Marie Leszczynska.»
Soulignons un léger anachronisme (qui aurait pu être élégamment écarté) : le trumeau de Saint-Germain-l'Auxerrois a été détruit en 1710 qui est l'année de naissance de Louis XV. L'arrivée de Marie Leszczynska en France et sa mode de ciels de lit à la polonaise attendront l'année 1725...

Bas-relief de la Cène dans la clé de voûte devant  le portail sud, détail : Judas
Détail du bas-relief de la Cène dans la clé de voûte devant le portail sud :
Judas est le seul à ne pas regarder le Christ.
Le portail principal du porche occidental de l'église
Portail central du porche occidental de l'église.
XIIIe, XIVe et XVe siècles.
Les statues des ébrasements ont été restaurées et repeintes en 1838.
Au Moyen Âge, le tympan était orné d'un Jugement dernier.

Le portail central.
Selon l'historien Louis Réau dans son Histoire du vandalisme (1959), le trumeau du portail central portait jadis un Christ-Juge qui venait compléter le Jugement dernier du tympan. La présence d'un Christ-Juge se trouve déjà dans la description donnée par Maurice Dumolin en 1936. Toutefois, selon le site de la paroisse, la statue était celle de saint Germain d'Auxerre exposée actuellement dans la chapelle de la Vierge.
Quoi qu'il en soit, en 1710, le chapitre prit la décision de faire élargir le portail pour laisser passer le dais lors des entrées et sorties des processions. Le trumeau a été détruit ; le Jugement dernier cassé, certainement pour accroître la hauteur du passage. Au XVIIIe siècle, ce «vandalisme» religieux était malheureusement fréquent. Les révolutionnaires de 1789 ont emboîté le pas. On pourra se reporter à l'église Saint-Étienne de Beauvais où une porte fut carrément percée dans le chevet, en 1794, pour faciliter le stockage du grain... mutilant le magnifique Arbre de Jessé d'Engrand le Prince, du XVIe siècle.
En 1838, à la suite de la mise à sac de l'église de février 1831, le portail central fut restauré. Sur le trumeau on adossa une Vierge à l'Enfant que les historiens Dumolin et Réau regardent comme une erreur iconographique. En outre, Maurice Dumolin signale (en 1936) que le tympan nu a été couvert, en 1840-1842, d'une peinture de Victor Mottez, mais qu'elle est déjà effacée.
Les voussures de ce portail central, parvenues jusqu'à nous à peu près intactes, sont le complément de l'ancienne scène du Jugement dernier. Le premier cordon accueille les élus et les damnés, ainsi que sept anges qui regardent le tympan. Le second reçoit les Vierges sages et les Vierges folles. Le troisième expose les douze apôtres portant les instruments de leur martyre, à l'exception de saint Jean qui tient une palme et un vase d'où sort un dragon (voir photo à gauche).
Si les statues des ébrasements du portail central (photo ci-dessus) sont en partie anciennes, celles du porche sont des créations du sculpteur Louis Desprez en 1841, à l'exception d'un François d'Assise, aujourd'hui bien dégradé. La statue de sainte Marie l'Égyptienne portant ses trois pains a été conservée dans la chapelle de la Vierge. Une copie a pris place sous le porche.
Source : Les églises de France : Paris et la Seine, article sur l'église par Maurice Dumolin, Librairie Letouzey et Ané, 1936.

Voussures du portail principal du porche

La Saint-Barthélemy, le 24 août 1572.
On a l'habitude de lire que ce sont les cloches de Saint-Germain-l'Auxerrois qui ont donné le signal de la Saint-Barthélemy. Jacques Hillairet, dans son Dictionnaire des rues de Paris (1959), donne une précision utile. Il écrit que le clocher de l'église avait l'habitude de sonner à minuit à la Saint-Barthélemy, ainsi qu'aux fêtes des grands saints patrons.
Le 24 août 1572, les cloches ont donc sonné comme à l'habitude, mais, cette fois, c'était pour appeler les spadassins du roi à massacrer les protestants de la capitale. Il n'y a pas eu de sonnerie de cloches spéciale. Conséquence : aucun huguenot n'a pu être alerté par un son de cloche inhabituel et aucun, pour sauver sa peau, ne s'est enfui de Paris.


L'ancienne mairie du 1er arrondissement date des travaux d'Haussmann sous le Second Empire.

Second Empire : Saint-Germain-l'Auxerrois échappe à la destruction.
Sous le Second Empire, le baron Haussmann, avec l'aval de Napoléon III, entreprit une rénovation drastique des artères de Paris. À cette occasion, des urbanistes proposaient de relier la colonnade du Louvre à la place du Trône. Pour cela, il fallait supprimer ni plus ni moins l'église Saint-Germain-l'Auxerrois qui se trouvait sur la trajectoire ! Lors des travaux, Haussmann se distinguera en amputant deux églises, Saint-Leu-Saint-Gilles et Saint-Laurent, «l'une et l'autre victimes innocentes du percement des boulevards Sébastopol et de Strasbourg», écrit Louis Réau dans son Histoire du vandalisme. En 1858, Saint-Leu-Saint-Gilles perdra son abside bombée, remplacée par un mur plat, tandis que, en 1865, Saint-Laurent sera privée de ses deux premières travées et «dotée d'une façade toute neuve de style néo-gothique qui n'est qu'un pastiche banal de l'architecture du XVe siècle», écrit l'historien avec sa verve habituelle.
Pour Saint-Germain-l'Auxerrois, heureusement, le baron Haussmann avait des scrupules... car il était protestant et cela se savait. Avec bien d'autres, il partageait la conviction (erronée) que c'était du clocher de cette église qu'était parti le signal du massacre de la Saint-Barthélemy en 1572 (voir ci-dessus). En tant que protestant, détruire l'église aurait pu être aisément interprété par les contempteurs du projet comme une vengeance huguenote perpétuée par-delà les siècles (!)
Pressé de détruire d'un côté et de sauvegarder de l'autre, il fut appuyé dans son refus par le banquier Achille Fould, promu ministre d'État, et notoirement israélite. Pourtant celui-ci s'était fait baptiser. Réau écrit : «Quand Haussmann lui fit part de ses hésitations, Fould s'écria : "Mais moi aussi, je suis protestant !"» De manière un peu rapide, et sans rien préciser de l'opinion de Fould sur l'église en question, l'historien en déduit que l'église a été sauvée «grâce à l'entente d'un luthérien avec un juif converti.» On en conclut que Fould était pour la sauvegarde.
Louis Réau, connu pour attaquer les «vandales» sur tous les fronts, déplore que Haussmann se soit alors livré à un vandalisme à l'envers, un «vandalisme constructeur». Car l'homme de confiance de Napoléon III eut alors une étrange idée. Il résolut de jumeler l'église Saint-Germain-l'Auxerrois avec un bâtiment qui lui servirait de pendant : une mairie s'élèverait à côté et simulerait une église gothique avec une rose sur sa façade, à l'image de celle de la façade de Saint-Germain. C'est l'architecte Hittorf (un Allemand francisé comme lui) qui fut chargé de la construction. Cet édifice, qui était donc la mairie du 1er arrondissement de Paris, est depuis peu consacré aux services à la jeunesse.
Le vandalisme constructeur ne s'arrêta pas là. Louis Réau écrit à propos d'Haussmann : «Pis encore ! Pour donner à l'église et à son pastiche un trait d'union monumental, il chargea les architectes-restaurateurs Lassus, puis Ballu d'intercaler entre les deux un clocher que la malice populaire compara à un huilier flanqué de ses deux burettes.» Le «clocher» (ou beffroi) fut achevé en 1861.
Source : Histoire du vandalisme de Louis Réau, Robert Laffont, collections Bouquins, 1994.

LA NEF DE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS ET SES BAS-CÔTÉS
Vue en grand angle de toute l'élévation sud de l'église Saint–Germain l'Auxerrois
Vue en grand angle de toute l'élévation sud de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois.
Au second plan, derrière les piliers, cachée par une boiserie : la chapelle de la Vierge.
Plan de l'église Saint-Germain l'AuxerroisCliquez ici pour afficher le triptyque marial (page 3)Cliquez ici pour afficher le retable flamandCliquez ici pour afficher la chapelle de la ViergeAfficher la chapelle de Notre-Dame de la Bonne-GardeAfficher la tribune de la reine AmélieAfficher la chapelle des Saints-PatronsAfficher la chapelle Saint-LandryAfficher le pilier non cylindriqueAfficher le transept (page 2)
Plan de l'église Saint-Germain l'Auxerrois.
Chaire à prêcher de François Mercier (1635)
Chaire à prêcher de François Mercier (vers 1685).
Le premier abat-son avait une forme de couronne royale.
Il a été détruit à la Révolution. L'actuel date du XIXe siècle.
TROIS CLÉS DE VOÛTE DU DERNIER QUART DU XVe SIÈCLE DANS LA NEF
Saint Germain d'Auxerre
Saint Germain d'Auxerre
Saint Jacques le Majeur
Saint Jacques le Majeur
Saint Denis
Saint Denis
Bénitier de Louis Lerambert, XVIIe siècle
Bénitier de Louis Lerambert, XVIIe siècle.

La nef et ses bas-côtés (1/2).
La nef et le bas-côté sud ont été reconstruits après la guerre de Cent Ans, vers 1476-1488, sur le modèle du chœur qui, lui, a été conservé.
Pour l'historien, cette reconstruction doit s'analyser dans le cadre du conflit permanent qui opposait la fabrique, chargée de la gestion temporelle de l'église, au chapitre des chanoines, chargé du spirituel. L'existence de la chapelle de la Vierge, où se déroulait l'office des paroissiens (souvent en même temps que celui des chanoines), alimentait cette rivalité.
Les historiens n'ont que peu d'informations sur l'ancienne nef. Pour Agnès Bos, dans Les églises flamboyantes de Paris (Picard, 2003), rien ne prouve qu'il y avait, avant la fin du XVe siècle, des collatéraux au nord bordés de chapelles latérales. C'est un ajout probable lors de la reconstruction.
Après la guerre de Cent Ans, l'essor démographique du royaume obligea les églises à envisager un accroissement de leur superficie. À Saint-Germain-l'Auxerrois, malheureusement, l'édifice était engoncé dans l'enclos canonial, bâti de maisons appartenant au chapitre. Le chœur étant conservé, l'espace était difficile à trouver. À l'ouest, un recul de la façade était inenvisageable : en face se trouvait la maison du doyen du chapitre ! Agnès Bos conclut : «Saint-Germain-l'Auxerrois constitue à ce titre un exemple caractéristique des édifices religieux enserrés dans un tissu urbain dense qui empêche les architectes de donner à leur projet l'ampleur souhaitée.»
L'architecture de la nef est dictée par le souci des marguilliers de copier celle du chœur afin de garantir l'uniformité de l'édifice. «Ad instar cori», ont-ils précisé dans leur requête. La fabrique et les aumônes des fidèles ont assuré le financement des travaux.
L'élévation de la nef est à deux niveaux. Elle est marquée par la présence de grandes baies qui dominent les quatre travées. Recevant du verre translucide ponctué de formes géométriques (photo ci-contre), ces baies laissent passer beaucoup de lumière dans la nef.
On note deux éléments propres à l'église : la grande largeur des arcades et la petitesse de l'espace entre ces arcades et les baies qui les surmontent (voir photo prise en grand angle plus haut). Ces deux éléments sont peu fréquents dans les églises parisiennes de cette époque. ---»» Suite 2/2

Christ en croix contre un pilier du bas-côté sud.
Christ en croix contre un pilier du bas-côté sud.
Artiste inconnu.
Vitrail moderne au second niveau de la nef
Grande verrière au second niveau de la nef.
Le verre blanc des lancettes fait passer beaucoup
de lumière dans la nef.

Le bas-côté sud de la nef borde la chapelle de la Vierge.
Celle-ci se trouve en fait dans l'équivalent du second collatéral au nord.
Au nord, le double bas-côté est simplement bordé des chapelles latérales.

La nef et ses bas-côtés (2/2).
---»» Une simple colonnette monte sans interruption depuis les grandes piles jusqu'à la retombée des voûtes, interrompant le fin cordon qui court sous les fenêtres hautes. L'architecte a clairement privilégié l'aspect vertical de la nef.
Le style architectural est celui de la fin du gothique flamboyant et de son rejet des sophistications. Ce rejet transparaît dans l'uniformité du remplage des grandes baies. On est là devant «l'aboutissement des recherches flamboyantes tendant à l'équilibre et à la sérénité des formes» [Agnès Bos]. La voûte quadripartite possède des clés de voûte typiques du dernier quart du XVe siècle : «amples et souvent finement sculptées» [Agnès Bos] représentant quatre des saints protecteurs de l'église.
On observe la même sobriété au niveau des piles et du type de pénétration des ogives dans les colonnes montantes. Les piles sont cylindriques et très homogènes, à l'exception d'une seule que le visiteur curieux d'archéologie aura à cœur de voir de près : c'est le deuxième pilier qui sépare le premier et le second collatéral, au nord (voir l'encadré plus bas et les flèches jaunes insérées dans trois photos).
Les quatre chapelles latérales nord sont construites sur le même plan. Peu profondes, elles présentent une voûte d'ogives et de sobres petites consoles à leur retombée. Deux chapelles sont données plus bas.
Le bas-côté qui jouxte la chapelle de la Vierge présente un aspect plus ancien avec piles muti-colonnes et chapiteaux floraux.
Source : Les églises flamboyantes de Paris d'Agnès Bos, éditions Picard, 2003.

Le banc d'œuvre a été créé sur le  dessin de Charles Le Brun dans les années 1680
Le banc d'œuvre a été réalisé par François Mercier (dans les années 1680) sur un dessin de Charles Le Brun.
Le pilier «non cylindrique» qui sépare, au nord, le premier bas-côté du second est indiqué par la flèche jaune.
Dans le tympan du banc d'œuvre, deux anges entourent une couronne qui reçoit deux palmes de martyre
Dans le tympan du banc d'œuvre, deux anges entourent une couronne qui reçoit deux palmes de martyre.
Deux chapelles du bas–côté nord. Sur la droite, le retable flamand du début du XVe siècle.
Deux chapelles du bas-côté nord. Sur la droite, le retable flamand du début du XVe siècle.
Christ en croix attribué à Édmée Bouchardon (XVIIIe siècle), détail
Christ en croix, détail.
attribué à Édmé Bouchardon (1698-1762).
XVIIIe siècle.
Banc d'œuvre du XVIIe siècle, détail de l'ornementation
Banc d'œuvre du XVIIe siècle, détail de l'ornementation.
Les chérubins sur le pignon du banc d'œuvre
Les chérubins sur le pignon du banc d'œuvre.
XVIIe siècle.
Vitrail de la baie 23 : Piéta entre deux anges (Joseph Vigné, XIXe siècle)
Baie 23 : Piéta entre deux anges
Atelier Maréchal de Metz, 1838.
Chapelle de la Compassion.

Les vitraux de la nef. Il ne reste rien des vitraux d'origine, que ce soit les grandes verrières du vaisseau central ou les vitraux des chapelles.
Malgré le goût du XVIIIe siècle pour le verre blanc et la clarté, un abbé mentionnait en 1754 un vitrail de la nef illustrant la vie de saint Germain d'Auxerre, tandis qu'un autre vitrail évoquait la Translation du corps de saint Vincent. Vers 1840, les témoins décrivent les grandes fenêtres de la nef comme étant ornées de listels en verre orange avec un soubassement bleu azur en forme de plinthe.
Les grandes verrières actuelles de la nef reçoivent, dans les lancettes et le tympan, des motifs géométriques simples et peu colorés, ce qui apporte beaucoup de lumière.
Quant aux vitraux des chapelles de la nef (et de celles du chœur aussi), pour l'historienne Élisabeth Pillet, ils ont probablement tous été détruits lors de la mise à sac de l'église en 1831. Des témoignages du début du XIXe siècle parlent de verrières à grisaille représentant sainte Geneviève, d'autres de panneaux illustrant la croix et le crucifix. Mais on n'en sait guère plus.
Les vitraux actuels des huit chapelles de la nef sont des créations de l'atelier Maréchal de Metz, en 1837. Signalons qu'une bonne partie de ces vitraux a été financée par l'abbé Demerson, curé de Saint-Germain-l'Auxerrois, qui a puisé dans sa fortune personnelle, dès 1838, pour embellir les baies de son église.
Source : Le vitrail à Paris au XIXe siècle d'Élisabeth Pillet, Corpus Vitrearum, 2010.

Vitrail de la baie 29 : le Baptême du Christ entre deux anges (Joseph Vigné, XIXe siècle)
Baie 29 : Le Baptême du Christ entre deux anges.
Atelier Maréchal de Metz, 1838.
Chapelle nord des Fonts baptismaux.

Baie 29 : Saint Jean-Baptiste entre deux anges (partiel).
Atelier Maréchal de Metz, 1838.

Les vitraux de Maréchal de Metz dans la nef.
Les vitraux de Maréchal de Metz ne comptent pas parmi les plus beaux du XIXe siècle. Ces œuvres s'insèrent dans la grande époque du vitrail archéologique : les peintres verriers réalisent des pastiches, plus ou moins bien réussis, des vitraux des XIIIe et XIVe siècles, s'interdisant ainsi toute nouveauté. Et rendant leur datation difficile aux historiens du vitrail.
En 1958, dans Le vitrail français, l'historien Jean Taralon critique cette mode : «Fermé à des courants artistiques qui auraient conditionné son renouvellement, le vitrail [du XIXe siècle] va s'immobiliser en formules qui seront solidaires de celles employées en architecture, ou se répéteront jusqu'à nous sous la forme de produits commercialisables.»
Blâmant les pastiches, Taralon reconnaît néanmoins une certaine diversité dans la griffe des différents ateliers français du XIXe siècle, ce qui ne veut pas dire beauté et encore moins perfection. Ainsi, la griffe de Lusson et d'Oudinot, est jugée «érudite et sans chaleur» ; celle de Thevenot et de Thibaut, «plus sensible [et] qui sait faire jouer les tons». Enfin, il se montre très critique à l'égard de Maréchal de Metz qui est pour lui à l'opposé de ses confrères. Jean Taralon parle ainsi du «débordement de Maréchal de Metz qui, dans l'effarante cacophonie de couleurs de Saint-Germain-l'Auxerrois, modèle ses figures en les surchargeant de grisaille.» Heureusement, reconnaît-il, cet artiste verrier va bientôt échapper à cette cacophonie et exposer au Salon de 1867 un très beau vitrail à la manière de Sèvres.
Source : Le vitrail français, éditions Mondes, 1958.

Vue d'ensemble du double bas-côté nord
Vue d'ensemble du double bas-côté nord.
Le principe de sobriété a été appliqué : piles uniformes et retombées des voûtes en pénétration sans aucun chapiteau.
L'étrange pilier non cylindrique est indiqué par la flèche jaune.
Pilier carré dans le double bas-côté nord
Pilier non cylindrique (flèche jaune)
dans le double bas-côté nord.

Le pilier non cylindrique de la nef. Sa présence est une énigme. Son plan est rectangulaire, mais il présente, sur deux faces, une série de colonnettes engagées. Il est le seul à posséder une console (florale) à la retombée des voûtes. L'historienne Agnès Bos suggère d'y voir le reste d'un massif de maçonnerie antérieur.

Le retable flamand. C'est une œuvre en bois de l'école flamande, d'origine anversoise, datée du début du XVe siècle. Elle a été offerte en 1839 à l'église Saint-Germain-l'Auxerrois par le comte de Montalivet, ministre de l'Intérieur, qui était un paroissien de l'église.
Le retable se présente sur deux rangées. Sur la rangée inférieure, on voit au centre le Songe de Jessé. Jessé est entouré des prophètes qui ont annoncé la venue du Messie. À gauche du panneau de Jessé : le Mariage de la Vierge et la Nativité. À droite du panneau : l'Adoration des mages et la Présentation de Jésus au temple.
La rangée supérieure est d'une plus vaste envergure. Dans le panneau de gauche : Jésus est chargé de sa croix. Au centre : la Crucifixion et à droite : la Vierge évanouie.
Ce retable présente étrangement deux scènes de la Vierge évanouie, au-dessous de la Crucifixion (scène donnée ci-dessous). L'épisode de l'évanouissement de la Vierge ne figure pas dans les Évangiles canoniques.
Source : panneau affiché dans la chapelle de la Compassion.

Retable flamand : l'évanouissement de la Vierge (début du XVe siècle)
Le retable flamand du début du XVe siècle a été offert à l'église par le comte de Montalivet, ministre de l'Intérieur en 1839
Retable flamand du début du XVe siècle.
Chapelle de la Compassion (bas-côté nord de la nef).

«««--- Retable flamand
L'évanouissement de la Vierge au-dessous de la croix.
Début du XVe siècle.

Retable flamand: Le songe de Jessé (début du XVe siècle)
Retable flamand : le songe de Jessé.
Début du XVe siècle.
Retable flamand : Jésus est chargé de sa croix (début du XVe siècle)
Retable flamand : Jésus est chargé de sa croix.
Début du XVe siècle.
LA CHAPELLE DE LA VIERGE (XIIIe ou XIVe SIÈCLE)
Vue d'ensemble de la chapelle de la Vierge
La chapelle de la Vierge date du XIIIe siècle ou du XIVe siècle selon les historiens.
La dernière travée (où se trouve l'autel) a été reconstruite au XVe siècle.
L'autel, son retable et ses peintures murales sont du XIXe siècle.

La chapelle de la Vierge (1/2).
Autrefois entièrement réservée aux paroissiens, c'était une petite église dans la grande. Ce qui entraînait des conflits entre le chapitre des chanoines et la paroisse : quand le culte était célébré à la fois dans le chœur par les chanoines et dans la chapelle par le curé, les chants des deux cérémonies créaient la confusion.
Longue de quatre travées, elle est insérée dans le second bas-côté sud, bordant les chapelles latérales. La chapelle de la Vierge est datée du XIIIe siècle par l'historien Maurice Dumolin en 1936. Celui-ci ajoute qu'elle n'a pas été touchée lors les réfections du XVe siècle.
En 2003, dans son ouvrage Les églises flamboyantes de Paris, Agnès Bos, utilisant de nouvelles sources, prend le contre-pied de ces dates. Pour l'historienne, la construction des trois premières travées de la chapelle remonte «sans doute» au XIVe siècle. Quant à la travée qui domine l'autel paroissial, enrichie d'une belle voûte à liernes, tiercerons, couronne et clé pendante (voûte donnée plus bas), elle a été reconstruite au tout début du XVIe siècle. En effet, cette voûte, tout comme la forme des piliers de la travée, sont «en rupture avec le reste de la chapelle» [Bos].
Pourquoi, à la fin du XVe siècle, avoir décidé une reconstruction partielle et non pas totale de la chapelle ? La même décision concerne aussi le porche. Agnès Bos répond que, dans un esprit de rivalité avec la prestigieuse abbaye de Saint-Germain-des-Prés, la fabrique et les paroissiens de Saint-Germain-l'Auxerrois auraient tenu à conserver les éléments les plus anciens de leur édifice «comme un témoignage de leur "antiquité"». --»» 2/2

La chapelle de la Vierge (2/2).
---»» Le décor de la travée terminale de la chapelle de la Vierge a été refait en 1847. On y voit une belle composition murale, dans le style italien du Quattrocentro, due à Eugène Amaury-Duval (1808-1885), illustrant l'Assomption (ci-contre) et le Couronnement de la Vierge. Le retable, dessiné par Eugène Viollet-le-Duc (1814-1879), présente un original Arbre de Jessé sculpté dans le bois. Les rois de Juda sont chacun enveloppés dans un sarment de vigne riche de feuilles et de pampres. Le dais qui surmonte l'Arbre abrite une Vierge à l'Enfant attribuée à l'École champenoise du XIVe siècle.
C'est dans cette chapelle que se trouvent les deux plus anciennes statues de l'église : un Saint Germain d'Auxerre du XIIIe siècle et une Sainte Marie l'Égyptienne polychrome du XVe. Sous le porche, on ne voit qu'une copie de cette statue. Marie l'Égyptienne est représentée avec les trois pains que, selon la Légende dorée, elle emporta dans le désert où elle fit pénitence pendant plusieurs années après avoir mené une vie dissolue.
La page consacrée à l'église parisienne de Saint-Merry présente l'histoire de sainte Marie l'Égyptienne illustrée de fresques de Théodore Chassériau (1819-1856).
Les vitraux (qui jurent un peu avec le style de la chapelle) sont des créations de l'atelier Maréchal de Metz de 1837. Ils représentent les rois de Juda. On donne ici les verrières des baies 26 (ci-contre) et 22 (ci-dessous).


«««--- «L'Assomption».
Fresque d'Amaury Duval (1808-1845)
dans la chapelle de la Vierge.


Baie 26 : trois rois de Juda
Salomon, David et Jessé avec Jahel en médaillon.
Atelier Maréchal de Metz, 1837.
Vitrail de la baie 22 dans la chapelle de la Vierge : trois rois de Juda  (Manassès, Ezéchias, Johathan) avec Judith en médaillon
Baie 22 : trois rois de Juda
(Manassès, Ezéchias, Johathan) avec Judith en médaillon.
Atelier Maréchal de Metz, 1837.
L'autel de la chapelle de la Vierge et son ornementation datent du XIXe  siècle
Peintures murales d'Amaury Duval et Arbre de Jessé d'Eugène Viollet-le-Duc
ornent l'autel de la chapelle de la Vierge.
Voûte de la première travée de la chapelle de la Vierge  (au-dessus de l'autel). L'ornementation date du XIXe siècle.
Voûte de la première travée de la chapelle de la Vierge.
L'ornementation date du XIXe siècle.
Statue de saint Germain d'Auxerre (XIIIe siècle) dans la chapelle de la Vierge, détail
Saint Germain d'Auxerre, détail.
XIIIe siècle.

Sainte Marie l'Égyptienne ---»»»
Fin XVe-début XVIe siècle.
Gros plan plus bas.
Statue de sainte Marie l'Égyptienne (fin XVe-début XVIe siècle)
Peinture murale «Le Couronnement de la Vierge» d'Amaury Duval, détail
«Le Couronnement de la Vierge», détail.
Fresque d'Amaury Duval (1808-1845).
Sainte Marie l'Égyptienne (fin XVe–début XVIe siècle), détail
Sainte Marie l'Égyptienne, détail.
Fin XVe-début XVIe siècle.
Arbre de Jessé dessiné par Eugène Viollet, détail : rois de Juda
Arbre de Jessé, détail :
Rois de Juda parmi les feuilles
de vigne et les pampres.
Vierge à l'Enfant, XIIIe siècle
Vierge à l'Enfant.
Début du XIVe siècle.
Peinture murale «Le Couronnement de la Vierge» d'Amaury Duval, détail
«Le Couronnement de la Vierge», détail.
Amaury Duval (1808-1845).
Arbre de Jessé dessiné par Eugène Viollet, détail : Jessé
Arbre de Jessé dessiné par Eugène Viollet, détail : Jessé.
Pierre tombale de Théophraste Renaudot dans l'allée de la chapelle de la Vierge
Dalle commémorative de Théophraste Renaudot
dans l'allée de la chapelle de la Vierge.

Théophraste Renaudot.
Sous l'Ancien régime, les artistes de la Cour étaient logés au Louvre. À ce titre, certains d'entre eux reposent à Saint-Germain--l'Auxerrois, mais les sépultures ne sont guère visibles. Notons parmi eux les peintres Jacques Stella et Noël Coypel, le sculpteur Antoine Coysevox, les architectes Louis Le Vau, Germain Soufflot, et Jacques-Ange Gabriel.
Celle de Théophraste Renaudot se trouve dans la chapelle de la Vierge. On y lit sur une dalle dans l'allée :

Devant cet autel
Fut inhumé Théophraste Renaudot
Conseiller et médecin
Ordinaire de Louis XIII
Historiographe du roi
Commissaire général
Des pauvres du royaume
Intendant général des
Bureau d'adresse de France
Fondateur de la Gazette
Père du journalisme français
Né à Loudun en 1586
Mort au Louvre
Le samedi 25 octobre 1653

Arbre de Jessé dessiné par Eugène Viollet, détail : le roi Joakim
Arbre de Jessé dessiné par Eugène Viollet-le-Duc, détail : le roi Joakim.
Esther au tympan du vitrail de la baie 20
Esther au tympan du vitrail de la baie 20.
Atelier Maréchal de Metz, 1837.
Chapelle de la Vierge.

29 juillet 1830, mise à sac de l'archevêché de Paris.
Dans son Histoire du vandalisme (parue en 1959), l'historien Louis Réau cite l'archéologue Ferdinand de Guilhermy, témoin des événements : «On déracinait les grilles et les rampes des escaliers, on sapait les murs, écrit de Guilhermy, on crevait les toitures, on précipitait par les fenêtres les marbres, les boiseries, les glaces et le mobilier des appartements.
Une troupe de barbares faisait la chaîne depuis la bibliothèque du palais jusqu'au parapet du quai : les livres et les manuscrits précieux passaient de main en main ; chacun les lacérait à son tour et le dernier les lançait dans la rivière. La Seine charriait ses épaves.
Pour comble d'outrage, une troupe avinée, affublée de vêtements sacerdotaux : chasubles, surplis, étoles, faisait autour de l'enceinte une grotesque procession mêlée au masque du Mardi gras.»
Louis Réau ajoute : «On se serait cru revenu aux pires excès de la Terreur, à l'époque où une racaille "défanatisée" violait les tombes royales de la "ci-devant" basilique de Saint-Denis, et substituait aux processions du clergé tournées en dérision une mascarade sacrilège pour déposer aux pieds des conventuels "les hochets de la superstition"».
À la lecture de la seconde mise à sac de l'archevêché le 15 février 1831, le même jour que celle de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, on peut se demander si de Guilhermy ne confond pas les deux événements.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (1/6).
C'est un épisode peu connu de l'Histoire de Paris, aussi peu que le «tumulte» entre catholiques et huguenots dans l'église Saint-Médard (5e arr.) en 1651. À cette occasion, l'église Saint-Germain, le presbytère du curé et l'archevêché ont été mis à sac par la foule.
Le récit donné ci-après est un résumé de l'article de l'historien Guillaume de Bertier de Sauvigny, paru en 1946 dans la Revue d'Histoire de l'Église de France. L'article lui-même tire son information du rapport d'enquête rédigé par le Parquet de la Seine peu après l'événement.
Le contexte. En 1831, Mgr de Quélen est l'archevêque de Paris. Il est bien connu pour son attachement à la ligne aînée des Bourbons, c'est-à-dire qu'il soutient le jeune duc de Bordeaux (l'«enfant du miracle»), fils du duc de Berry. Ce dernier a été assassiné en 1820 par l'ouvrier fanatique Louvel qui voulait éteindre la lignée des Bourbons. Le duc de Berry était le fils de Charles X ; l'enfant du miracle est le petit-fils du roi. Nous sommes là dans le camp des ultras : ces hommes veulent revenir à une gestion de la France dans le style de l'Ancien régime avec une grande importance donnée à l'Église. Les ultras représentent le parti dit légitimiste.
L'atmosphère parisienne. Depuis la Révolution de fin juillet 1830 («les Trois Glorieuses»), le peuple de la capitale est pris d'une furie anticléricale. Charles X, le roi détrôné, second frère de Louis XVI, voulait restreindre les libertés, notamment celles de la presse, et se montrait très proche du clergé. Pour le peuple parisien, combattre Charles X et les Bourbons, c'est combattre le clergé. Et inversement. Lors des Trois Glorieuses, l'archevêché de Paris a été pillé le 29 juillet (voir à gauche).
Le préambule. Le duc de Berry est assassiné le lundi 14 février 1820 à Paris. Et depuis 1821, l'anniversaire de sa mort est toujours célébré solennellement. Mais, en 1831, Louis-Philippe Ier, c'est-à-dire un Orléans, est sur le trône et les légitimistes comptent maintenant parmi les opposants au régime. Célébrer la mort du duc de Berry est regardé comme une bravade envers le gouvernement...
Les faits. Le 4 février 1831, un personnage, resté inconnu, vient trouver le curé de l'église Saint-Roch et lui demande de célébrer, le lundi 14, un service solennel pour le repos de l'âme du duc de Berry. L'information remonte jusqu'au sommet de l'État. Qui s'en trouve très embarrassé : accepter, c'est risquer l'émeute anti-Bourbons ; refuser, c'est cautionner la haine du meurtrier envers le duc assassiné... On trouve une échappatoire : le ministre des Cultes, Félix Barthe, est député auprès de l'archevêque. À la suite d'un empêchement, la rencontre n'a lieu que le 12. ---»» Suite 2/6 ci-dessous.


Baie 25 : sainte Madeleine dans une chapelle du bas-côté nord (Atelier Maréchal de Metz, 1837).
LA FAÇADE OCCIDENTALE ET SON ORNEMENTATION
Orgue de tribune de Clicquot (1791)
Orgue de tribune.
Il comprend des éléments Cliquot de 1771.
Il a été transféré depuis la Sainte-Chapelle en 1791.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (3/6).
---»» La cérémonie.
Elle a lieu à 11 heures 30, le 14. Il y a là des Saint-Cyriens, Valerius et ses amis, et un grand nombre de carlistes (partisans de la lignée de Charles X), prévenus on ne sait comment. «Une quête est faite au profit des soldats de la garde royale, blessés en juillet 1830 et laissés sans secours», écrit l'historien. Tout se passe bien ; la cérémonie s'achève à 12 heures 30. Avant de sortir, les assistants défilent devant le catafalque dressé pour l'occasion et le bénissent. Valerius a fixé une croix de Saint-Louis sur le drap mortuaire, tandis qu'une couronne d'immortelles jaunes et noires repose dessus.
Un épisode fâcheux survient quand un assistant accroche au drap mortuaire le portrait du duc de Bordeaux (qu'il a tiré d'une lithographie qu'il vient tout juste d'acheter). Il reste encore une trentaine de personnes dans l'église. Le curé accourt et enlève lui-même cette image jugée séditieuse.
Les troubles. La nouvelle se répand vite dans les rues de Paris : le portrait du duc de Bordeaux a été affiché lors d'une commémoration officielle ! La nouvelle grossit, se déforme, s'envenime. Devant l'église, une foule hostile se rassemble déjà. Vers 15 heures, excitée par des républicains, la populace rentre dans le presbytère et le saccage de fond en comble. Rendez-vous est donné par les agitateurs pour le lendemain, mardi 15. À 8 heures du matin, la foule se retrouve et envahit l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, brise et profane tout ce qui lui tombe sous la main. Le saccage est complet. On sait que même les vitraux du premier niveau ont été cassés. La Préfecture de police s'en tirera par une pirouette : la garde nationale, dépassée par le nombre, a «régularisé» le mouvement qu'elle ne pouvait arrêter !
La foule se porte alors vers l'archevêché, alors que la Garde nationale reste passive. «Le palais épiscopal est forcé, écrit de Bertier de Sauvigny, les meubles, les livres, les ornements religieux, sont brisés, déchirés, précipités dans la Seine.» Pis, l'édifice est attaqué : tuiles arrachées, charpente abattue, murs démolis. Mgr de Quélen s'était réfugié dès le 14 dans la maison d'un ami.
Les suites. Le jour même, le gouvernement prend des mesures... contre les victimes ! Les principaux membres du parti carliste sont arrêtés. Car, pour le préfet de police, la cérémonie du 14 est le prélude à une insurrection générale ! Accusation si grotesque que tout le monde sera libéré assez rapidement. En revanche, le préfet se lance dans les perquisitions... et les mandats d'amener. Ordre est lancé d'arrêter le curé de Saint-Germain-l'Auxerrois et l'archevêque lui-même ! Mais ce dernier s'est caché chez un ami. L'interrogatoire pressant auquel furent soumises les religieuses du monastère Notre-Dame de la Charité, asile habituel du prélat, ne donna rien. Le lendemain, le mandat fut retiré, mais le mal était fait : l'archevêque passait, aux yeux du public, pour le grand responsable. Ce que le ministre des Cultes, Félix Barthe, ne démentit jamais. Hyacinthe de Quélen demeura archevêque de Paris de 1821 à 1839. L'historien ne rapporte aucune sanction prise par le Pouvoir contre les casseurs. ---»» Suite 4/6 ci-dessous.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (2/6).
---»» Dans un premier temps, l'archevêque se récrit : impossible d'interdire à des chrétiens de prier pour la mémoire d'un homme mort avec tous les sacrements de l'église ! Puis il se ravise : si, en haut lieu, on craint vraiment des troubles à l'ordre public, le prélat acceptera d'interdire la cérémonie, mais il veut que la requête du ministre soit couchée sur le papier pour détenir un argument à présenter au parti légitimiste. La lettre ministérielle est envoyée et l'archevêque fait interdire la cérémonie. Mais, entre-temps, le ministre Barthe avait appelé le curé de Saint-Roch pour lui demander de ne rien célébrer. Ce que le curé avait accepté. Celui-ci annonça lui-même sa décision en chaire le dimanche 13. Les légitimistes crièrent à l'atteinte à la liberté de conscience. Honte au gouvernement !
Loin de se calmer, l'affaire rebondit. Un dénommé Valerius, bandagiste et caporal dans la Garde nationale, était venu trouver le curé de Saint-Germain-l'Auxerrois, avant le 13, pour lui demander de célébrer, le 14, une messe des morts. Rien de bien méchant puisque, pour ce prélat, la cérémonie principale allait avoir lieu à Saint-Roch. Sa messe étant «annexe», le curé ne prévint pas l'archevêché.
Le 13 au matin, Valerius apprend la suppression de l'office à Saint-Roch. Il fait donc insérer dans la Gazette, journal paraissant le soir, l'annonce que la cérémonie est reportée à Saint-Germain-l'Auxerrois. Le 14 au matin, le curé de Saint-Germain (qui a dû lire la Gazette), s'effraie et veut supprimer la cérémonie. Valerius, venu avec deux autres gardes nationaux, le rassure : on a supprimé l'office à Saint-Roch pour des raisons de «pure convenance» ; de plus, il y en aura d'autres dans Paris... ---»» Suite 3/6 à gauche.

«Nativité de Marie», XIXe siècle
«Nativité de Marie», XIXe siècle.
Bas relief sur la façade de l'église.
Auteur non précisé.
Le roi David trône au-dessus de la tourelle centrale de l'orgue
Le roi David trône sur la tourelle centrale de l'orgue de tribune.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (4/6).
---»» Le journal de Viennet. Jean-Pons-Guillaume Viennet (1777-1868) est aujourd'hui un inconnu. Homme de lettres, académicien, auteur de pièces de théâtre et de poésies, il fut également homme politique et député. Nostalgique de l'Ancien Régime et de sa culture, il fut critique de tous les régimes en place. Le roi Louis-Philippe, qui fut son ami, le fit pair de France.
Le journal de Viennet décrit les événements parisiens survenus lors des trois règnes de la Restauration et de la Monarchie de Juillet. C'est un texte digne d'intérêt parce que leur auteur, d'esprit très diplomate, était bien en cour et fréquentait les hommes du Pouvoir. Le récit des émeutes de 1831, telles que Viennet les décrit à la date du vendredi 18 février, n'est pas de première main puisqu'il n'était pas sur place. En revanche, les conversations qu'il a tenues avec les hommes au Pouvoir sont très instructives.
Viennet rapporte qu'il est convoqué, avec «un certain nombre de députés» chez le Président du Conseil, le ministre Laffitte, la veille de la messe de commémoration, le dimanche 13 février. En entrant, il voit le ministre jouer aux cartes dans son salon, insouciant du tumulte qui pourrait menacer. Passant dans la salle d'à côté, il se joint aux autres députés convoqués. Pour Viennet, le gouvernement est tout à fait conscient du risque qu'il prend à autoriser une manifestation légitimiste. À tel point que le préfet de la Seine, Odilon Barrot, déclare lui-même qu'il lui est «impossible de répondre le lendemain de la sûreté de Paris.» Ce à quoi le toujours bouillant Casimir Périer rétorque qu'un préfet de la Seine impuissant démissionne et laisse la place à un autre (!) Mais le préfet de police Baude se range du côté du préfet de la Seine.
Viennet commente : «je me retirai de ce cénacle avec la certitude que les Baude et les Barrot, révolutionnaires par essence, ne craignaient rien de cette manifestation légitimiste, et qu'ils n'étaient pas fâchés d'en profiter pour donner une leçon au parti de la contre-révolution.»
Le lundi 14, la cérémonie a lieu à Saint-Germain-l'Auxerrois. Viennet situe le sac de l'église le même jour, ce qui est contraire au rapport officiel du préfet de police, qui le place le lendemain mardi. Viennet continue : La vue du portrait du duc de Berry sur le catafalque provoque l'excitation d'individus qui s'étaient introduits dans l'église. «Indignés de ces actes téméraires, écrit-il, ils sortent sur le champ pour les raconter à la foule qui remplissait les abords de l'église. Là se trouvaient des voleurs, des repris de justice, des forçats libérés, avant-garde ordinaire de toutes les émeutes et de toutes les révolutions. Des agents du désordre n'eurent pas de peine à les entraîner. L'église fut envahie, le catafalque renversé, les légitimistes se sauvèrent comme ils purent ; et l'émeute, une fois déchaînée, ne s'arrêta plus qu'après d'horribles excès.»
---»» Suite 5/6 à gauche.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (5/6).
---»» Le journal de Viennet (suite et fin). Un homme remarque les fleurs de lis sur la croix qui surmonte le faîte de l'église. «Ce signe de l'Ancien Régime, dit Viennet, est proscrit, condamné par la sentence populaire.» Alors la foule monte sur le toit, brise les fleurs de lis ; la croix est abattue.
L'excitation gagne toute la capitale. «"À bas les fleurs de lis et les croix !", s'écrit la populace, et en moins de deux heures, poursuit-il, toutes les églises sont dépouillées de cet ornement.»
Après l'église, c'est le tour du palais épiscopal. «Il fut assiégé, démoli, ce ne fut bientôt qu'un monceau de pierres, lit-on sous la plume du narrateur. La bibliothèque fut pillée, dévastée, les livres furent déchirés, jetés à la rivière, et la Seine les roula pêle-mêle dans eaux.» Et il ajoute : «un témoin oculaire, un homme recommandable, m'a positivement assuré que M. Thiers, sous-secrétaire d'État, et M. Baude, préfet de police, étaient présents à ce spectacle, qu'ils étaient restés debout sur le parapet du petit pont qui est derrière l'Hôtel-Dieu, contemplant avec indifférence cette vengeance populaire.» Il est certain que la Garde nationale («fort divisée d'opinions», dit Viennet) n'a rien fait contre les émeutiers. Ceux qu'elle a arrêtés ont été relâchés presque immédiatement.
Les autorités complices. Viennet livre ensuite une information de première main : «La connivence de l'autorité était évidente, écrit-il, et j'en acquis la preuve en arrivant à la Chambre. Je rencontrai M. Laffitte [premier ministre] dans le couloir ; et, avant même que je lui eusse témoigné ma surprise de le voir là, il me parla des événements, et m'annonça en riant le sac de l'archevêché. C'était plus qu'un sourire, je l'affirme sur l'honneur ; et il se frottait les mains en signe de contentement : "Quoi ! lui dis-je, c'est le premier ministre qui me parle ainsi ? - Que voulez-vous que j'y fasse ? me répondit M. Laffitte. Ils ont provoqué le peuple, et ils en sont les victimes." Tout me fut expliqué par ces sinistres paroles. Je lui tournai le dos et j'allai prendre ma place.» ---»» Suite 6/6 à droite.

Statue de saint Pierre dans l'avant–nef
Statue de saint Pierre dans l'avant-nef.
Sculpteur inconnu ou art populaire ?
«Entrée de Marie au temple», XIXe siècle
«Entrée de Marie au temple», XIXe siècle.
Bas-relief sur la façade de l'église.

«Adoration des bergers», XIXe siècle.
Bas-relief sur la façade de l'église.

Vue du positif de l'orgue de tribune.

15 février 1831, mise à sac de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois (6/6).
---»» Plus loin, le narrateur conclut par ses mots : «Tous les incidents de cette première journée attestent que tout était connu d'avance et qu'une partie du ministère était complice de ces actes de vengeance. On a fait le lendemain de belles proclamations, on a pris des mesures pour rétablir l'ordre. C'était le jour même, la veille même qu'on devait les prendre.»
Dans son Histoire du vandalisme, Louis Réau indique que l'église dévastée servit de mairie jusqu'en 1837.
La presse. Compte tenu de la petitesse de la «provocation», il est intéressant de voir comment la presse a rapporté l'événement. De Bertier de Sauvigny cite un extrait du Journal des Débats du 15 février 1831, c'est-à-dire le lendemain de la cérémonie - en prenant soin de préciser que cet organe était «le mieux informé et le plus modéré du temps.»
Le Journal rapporte que le catafalque était orné d'un portrait du duc de Bordeaux, d'un buste du duc de Berry, qu'il était orné de drapeaux blancs (la couleur de la Monarchie) aux quatre coins, que le curé a donné une bénédiction spéciale, etc. !
L'historien cite un extrait du «modéré »Journal des Débats qui mérite d'être rappelé :
«Honte immortelle à ces artisans hypocrites de complots, à ces gagistes d'Holyrood [la résidence de Charles X en Écosse], à ces écrivains sans conscience, façonnés de longue main à la servitude, fauteurs et apologistes déhontés de toutes les vieilles oppressions, prôneurs, dans le bon temps, des lois de sacrilège, de censure et de proscription, qui réclament aujourd'hui la liberté de la presse pour se donner le droit d'outrager avec impunité ce que la France couvre de ses hommages,... la liberté d'enseignement pour pouvoir inoculer à nos enfants le poison de la tyrannie jésuitique, la liberté des associations pour nous enfermer dans le réseau de leurs fanatiques congrégations !... Changer un anniversaire funèbre en sédition, faire d'un catafalque un trône factieux, arborer des drapeaux proscrits où il ne fallait que des linceuls, ce n'est plus là de la douleur ni de la religion, c'est un crime dont il faudra répondre devant la justice !»
Le vandalisme continue. Il est à peu près certain que tous les vitraux du premier niveau de l'église, c'est-à-dire ceux des chapelles de la nef et du chœur, ont été détruits lors de cette explosion anticléricale. Dans Le vitrail à Paris au XIXe siècle (Corpus Vitrearum, 2010), l'historienne Élisabeth Pillet ajoute un élément consternant rapporté, au XIXe siècle, par l'historien Nicolas-Michel Troche : le dimanche qui a suivi la mise à sac de l'église, le vitrier de la Préfecture, accompagné d'ouvriers, est venu démonter les cinq grandes verrières de l'abside parce que les bordures portaient des fleurs de lys ! Résultat : ces verrières ont disparu.
Dans son journal, Viennet précise que le Pouvoir ne trouvant pas l'archevêque, «on se vengea sur les fleurs de lis. Un ordre du gouvernement les fit abattre et gratter sur tous les édifices. La résidence royale n'en fut pas exempte. On les enleva du sceau de l'État. Les légitimistes ne manquèrent pas d'en faire un crime à Louis-Philippe. On cria dans tous les salons du faubourg Saint-Germain qu'il avait répudié les armes de sa Maison.»
Sources : 1) Mgr de Quélen et les incidents de St-Germain-l'Auxerrois en février 1831 de Guillaume de Bertier de Sauvigny, Revue d'Histoire de l'Église de France, tome 32, n°120, 1946 ; 2) Journal de Viennet, pair de France et témoin de trois règnes, éditeur Amiot-Dumont, 1955 ; 3) Le vitrail à Paris au XIXe siècle d'Élisabeth Pillet, Corpus Vitrearum, P.U.R., 2010.

La nef de l'église Saint-Germain l'Auxerrois vue depuis la croisée du transept
La nef de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois vue depuis la croisée du transept.
À l'arrière-plan, on reconnait les statues de saint Pierre, de saint Paul et le bas-relief central de l'Adoration des bergers.
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Documentation : «Paris d'église en église», éditions Massin, 2007
+ «Les églises de France : Paris et la Seine», article sur l'église par Maurice Dumolin, Librairie Letouzey et Ané, 1936
+ «Les églises flamboyantes de Paris» d'Agnès Bos, éditions Picard, 2003
«Saint-Germain l'Auxerrois», dépliant disponible dans l'église
+ «Le vitrail à Paris au XIXe siècle» d'Élisabeth Pillet, Corpus Vitrearum, P.U.R., 2010
+ «Les vitraux de Paris, de la Région Parisienne et du Nord-Pas-de-Calais», Corpus Vitrearum, CNRS, 1978
+ «Vitraux parisiens de la Renaissance», Délégation à l'Action artistique de la Ville de Paris, 1993
+ «Mémoires au sujet des vitraux anciens dans les églises de Paris» de M. Lafaye, 1871
+ «L'Art de Paris» de Jean-Marie Pérouse de Montclos, éditions Place des Victoires, 2008
+ «Dictionnaire des Monuments de Paris», éditions Hervas, 1992
+ «Mgr de Quélen et les incidents de St-Germain-l'Auxerrois en février 1831» de Guillaume de Bertier de Sauvigny, Revue d'Histoire de l'Église de France, 1946
+ «Journal de Viennet, pair de France et témoin de trois règnes», édité par Amiot-Dumont, 1955.
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