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La cathédrale de Rouen fait partie des
grandes cathédrales de France avec celles d'Amiens,
Paris,
Chartres,
Reims
et Bourges.
Mais celle de Rouen a failli ne pas survivre à la dernière
guerre mondiale. Comme tout grand ensemble architectural presque
millénaire, elle possède deux ou trois points d'attraction
qui méritent vraiment de la connaître.
L'histoire commence dès le IVe siècle avec la construction
d'un groupe cathédral au centre de la cité : c'est
une affirmation politique de l'importance de la nouvelle religion
(d'ordinaire les grands édifices chrétiens étaient
bâtis sur les tombes des martyrs, toujours enterrés
à l'extérieur des villes). À ce groupe cathédral
paléochrétien succède une cathédrale
romane. Sa construction commence dans les années 1020. L'édifice
est consacré en 1063, en présence du duc Guillaume,
le futur Conquérant. Sans doute inspiré par le gothique
naissant de la cathédrale Saint-Denis,
l'archevêque Hugues d'Amiens, vers le milieu du XIIe
siècle, commence la modification de son église métropolitaine
: la tour Saint-Romain
s'élève à partir de 1145. Et L'archevêque
Gautier le Magnifique fait abattre la nef romane en 1185.
Les premières travées gothiques peuvent enfin s'élever.
En 1200, un gigantesque incendie, qui détruit le quartier
et une bonne partie de l'édifice roman, en accélère
la transformation. De plus, le roi Jean sans Terre offre une grosse
somme pour la reconstruction. En 1204, achevant la conquête
de la Normandie, Philippe Auguste peut assister à un Te Deum
dans la nef quasiment achevée. Dans la décennie 1240,
l'essentiel est construit : la nef
avec une élévation sur quatre niveaux ; le chur
avec une élévation à trois niveaux. Suivront
les chapelles
latérales à partir de 1270, la chapelle d'axe
au début du XIVe siècle, la façade occidentale,
le cloître des chanoines, les portails du transept (Libraires
et Calende).
Après la guerre de Cent Ans, le gothique flamboyant subit
un coup de fouet : ultime étage de la tour
Saint-Romain et construction de la tour
de Beurre.
En 1562, la cathédrale subit le sac des huguenots, dommageable
pour le mobilier, mais sans suite pour le gros uvre. Si la Révolution
l'épargne, la seconde guerre mondiale, en revanche, va faire des
ravages (voir l'encadré).
Dans ce site, la cathédrale Notre-Dame de Rouen est présentée
sur quatre pages. L'accent est mis sur les caractéristiques de
l'édifice, celles qui justifient une visite : la magnifique chapelle
axiale dédiée à la Vierge, les vitraux
des XIIIe, XIVe, XVe, XVIe et XXe siècles ; enfin le surprenant
appareil architectural en quillage
dans les collatéraux.
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Vue d'ensemble de la nef de la cathédrale de Rouen
Le visiteur peut voir, dès l'entrée, que l'élévation
de la nef est à quatre niveaux. C'est la marque architecturale des
cathédrales
de l'époque du gothique classique (fin du XIIe siècle). Le
chur ne possède que trois niveaux. |
La façade occidentale, en gothique flamboyant, de la cathédrale
se distingue
par la présence de deux contreforts encadrant le portail central
et de quatre flèches pyramidales qui la surplombent. |
Le chevet de la cathédrale et la tour-lanterne
qui culmine à 151 mètres (plus haute flèche de cathédrale
de France). |
La Vierge dorée
de Nicolas Quesnel, 1541
domine le faîtage en plomb
de la chapelle de la Vierge. |
«««--- À
GAUCHE
Le côté sud du chur est obstrué par
des locaux utilisés par le chapitre
de la cathédrale : sacristie des
chanoines, revestiaire et chartrier. |
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Maquette de la cathédrale, visible dans une chapelle latérale.
Longueur totale : 137 mètres
Hauteur de la flèche (reconstruite au XIXe siècle) : 151 mètres.
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Les trois portails de la façade occidentale. |
Partie centrale de la façade occidentale au-dessus des portails.
À droite, l'élancement de la tour de Beurre.
La partie centrale mêle le foisonnement du gothique flamboyant, notamment
dans les gables, et (ce qui est plus traditionnel), dans les rangées
de statues. |
Rangée de statues sur la façade. |
Un clocheton au sommet de la façade
Il faut y voir une influence anglaise. |
La façade
occidentale de la cathédrale de Rouen n'a
pas l'harmonie de celle de Paris
ou de Reims.
Construite du XIIe au XVIe siècle, elle se distingue
par une irrégularité générale,
issue des changements de plans, des arrêts, des restaurations
et des additions diverses. Un point la différencie
des façades des autres cathédrales : les tours
nord
et sud
ne font pas bloc avec l'ensemble (voir plus
bas). Ce fut vers les années 1180-1190 que
l'on commença la construction des trois portails. Interrompue
par l'incendie de l'an 1200, elle reprit avec force décorations,
colonnettes et statues. Les tympans des portails nord
et sud,
qui illustrent l'histoire de saint Jean-Baptiste et celle
de la lapidation de saint Étienne, sont du troisième
quart du XIIIe siècle. Quant au portail central, il
fut détruit au tout début du XVIe siècle.
Pour des raisons de robustesse de la façade, on décida
de bâtir deux puissants contreforts dans le prolongement
des grandes arcades de la nef. Ces contreforts, de forme pyramidale,
furent amplement décorés : des niches y abritaient
des rangées de statues surmontées de dais et
de clochetons, le tout ciselé dans l'art du gothique
finissant. La récente restauration (terminée
en 2015) met bien en évidence toute cette luxuriance,
bien que la rangée basse des statues ait disparu.
L'Arbre
de Jessé de Pierre des Aubeaux, orne le tympan,
lui-même entouré d'une riche archivolte consacrée
aux prophètes, aux sibylles et aux patriarches. Toutes les
parties hautes de la façade, telles qu'on les voit dans la
photo ci-dessus, datent de la fin du XIVe siècle et du début
du XVe. Exception faite pour le gâble, très élancé,
qui domine le portail principal et qui a le malheur de cacher en
partie la rose flamboyante : il date de 1514. Notons enfin l'un
des signes distinctifs de la façade de la cathédrale
de Rouen : ce sont les quatre clochetons très ajourés,
en forme de pyramide, qui surplombent la partie centrale. On a pu
montrer l'influence anglaise des grandes cathédrales de Wells,
Lichfield et Salisbury dans leur dessin. Ces clochetons furent conçus,
au XIVe siècle, par le maître d'uvre Jean
Périer qui connaissait l'art anglais.
Source : Congrès archéologique
de France, 89e session tenue
à Rouen en 1926, article La cathédrale de
Rouen par Marcel Aubert.
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LE CENTRE DE LA FAÇADE
OCCIDENTALE : LE PORTAIL SAINT-ROMAIN ET L'ARBRE DE JESSÉ |
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Le tympan (avec son Arbre de Jessé) et l'archivolte du portail central
de la cathédrale de Rouen.
À gauche et à droite : les contreforts de la façade
ornés de statues posant sous leur dais.
(Photographie prise après la restauration de la façade qui
s'est terminée en juin 2015.) |
L'Arbre de Jessé sur le tympan du portail central de la façade
occidentale.
Arbre créé par Pierre des Aubeaux au début du
XVIe siècle et mutilé par les Huguenots en 1562.
(Sur la photo, le «point blanc» et le «point noir»
ont été accentués de manière à
faire ressortir les volumes.) |
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Ange tenant un phylactère au sommet de l'archivolte du portail
central.
La luxuriance de la décoration gothique donne une idée
du temps nécessaire
à la restauration de l'édifice et de son coût... |
Sibylle dans la voussure médiane
du portail central.
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Prophète dans la voussure externe
du portail central. |
«««---
À GAUCHE
Les treize voussures du portail central entourant l'Arbre de
Jessé
(début du XVIe siècle).
Pour les trois voussures principales, on a de gauche à
droite :
Patriarches, Sibylles et Prophètes. |
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Scènes bibliques et personnages dans les ébrasements du portail
central. |
LE NORD DE LA FAÇADE
OCCIDENTALE : LE PORTAIL SAINT-JEAN |
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Le portail nord de la façade occidentale, dédié à
saint Jean-Baptiste. |
Le portail Saint-Jean
est remarquable par les voussures de son archivolte. On quitte
ici les séries habituelles de statues de rois ou de
prophètes pour faire place à la dentelle de
pierre - au sens propre. Les quatre voussures de l'archivolte
sont ornées, alternativement, de dessins géométriques
percés à l'archet (suivant l'habitude normande)
et de feuilles découpées et refouillées,
bien détachées de leur fond. La dentelle de
pierre brille ici d'un éclat extraordinaire. De plus,
la base des deux voussures à feuilles, au nord, est
enrichie de bustes d'un style très séduisant.
Le tympan (troisième quart du XIIIe siècle)
illustre des scènes de la vie de saint Jean-Baptiste
: banquet d'Hérode, danse de Salomé, décollation
et offrande du chef de saint Jean de Salomé à
Hérodiade. Le registre supérieur illustre l'ensevelissement
de saint Jean-Baptiste.
Sources : 1) Congrès archéologique
de France, 89e session tenue à Rouen en 1926, article
La cathédrale de Rouen par Marcel Aubert ; 2)
Haute-Normandie gothique par Yves Bottineau-Fuchs,
éditions Picard.
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Le tympan (entre 1250 et 1275) et les magnifiques voussures du portail Saint-Jean. |
Les bustes à la base des voussures nord.
Portail Saint-Jean. |
Le bourreau qui décapite le saint
a un aspect négroïde affirmé. |
Base des colonnettes dans l'ébrasement nord du portail Saint-Jean
(fin du XIIe - début du XIIIe siècle). |
Ébrasement sud du portail Saint-Jean (fin du XIIe - début
du XIIIe siècle). |
LE PORTAIL OCCIDENTAL
NORD SAINT-ÉTIENNE |
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Le
portail Saint-Étienne (porte
sud de la façade principale) est d'allure
plus classique, avec un thème floral dans
les voussures de l'archivolte. Le tympan illustre
la lapidation de saint Étienne (troisième
quart du XIIIe siècle). La décoration
de cette porte a été très
mutilée au XVIIe ou au XVIIIe siècle.
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Le
portail des Libraires, sur la façade
du transept nord, a été construit
à peu près dans le même temps
que celui du transept sud (fin du XIIIe, début
du XIVe siècle). Le décor a été
conçu par Jean Davy. Sur la photo
de droite, on voit une construction architecturale
belle et équilibrée, faite de gâbles
et de rosaces, qui est en fait inspirée
du transept de la cathédrale Notre-Dame
de Paris (voir plus
bas). Le portail est entouré de bâtiments
: il s'agit de la bibliothèque des chanoines
construite par Guillaume Pontifs à
partir de 1477. Elle sera reliée à
la cathédrale, dès 1479, par le
bel escalier,
bâti par le même architecte, et que
l'on voit dans le transept nord de l'édifice.
La cour abrita d'abord des changeurs, puis des libraires.
Les chanoines percevaient ainsi des droits sur les emplacements
qu'ils louaient. Ils finirent par y édifier des
petites maisons de rapport.
Source : La cathédrale
Notre-Dame de Rouen,
éditions du Patrimoine.
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Le portail sud de la façade occidentale est dédié
à saint Étienne. |
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LE PORTAIL
DES LIBRAIRES (BRAS NORD DU TRANSEPT) |
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Bras nord du transept : le très élégant
portail des Libraires et la cour des Libraires. |
«««---À
GAUCHE
La Lapidation de saint Étienne dans le tympan
du portail sud de la façade occidentale.
Le registre supérieur représente un Christ en
majesté dans une mandorle. |
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Le bas du tympan du portail des Libraires (fin du XIIIe, début
du XIVe siècle). |
Le registre du bas illustre la
résurrection des morts qui sortent de leurs tombeaux
par milliers. Au-dessus, les justes sont séparés
des damnés. Un chaudron infernal est sculpté
sur la droite. La partie supérieure, qui n'a jamais
été sculptée, aurait dû représenter
un Christ en majesté.
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La cour d'Albane et son jardin (vue en juillet 2015, à la fin
de la restauration). |
LE PORTAIL DE
LA CALENDE (TRANSEPT SUD) |
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Le portail sud de la Calende (fin du XIIIe - début du XIVe
siècle). |
Le Couronnement de la Vierge au-dessus de la rosace. |
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LE PORTAIL DE
LA CALENDE (TRANSEPT SUD) |
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Le portail de la Calende et le transept sud.
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Statue d'un apôtre dans un
contrefort du portail de la Calende. |
Le
portail de la Calende obéit au même
principe architectural que celui des Libraires : une
porte avec tympan et archivolte surmontée d'un
gâble ajouré, assez pentu ; derrière
le gâble se tient une grande fenêtre à
claire-voie portant une rose, surmontée elle
aussi d'un gâble. C'est le profil créé
à la cathédrale de Paris. On notera toutefois
une différence entre les deux portails des transepts
: dans le portail de la Calende, le dessus de la grande
rose est orné d'un groupe sculpté représentant
le Couronnement de la Vierge. Cette uvre, donnée
ci-dessous à gauche, est très élimée.
Sur le trumeau se tient le Christ qui est accompagné,
dans les ébrasements et les contreforts de droite
et de gauche, des apôtres et des premiers diacres.
Les voussures sont peuplées d'anges, de prophètes
et de martyrs.
Le magnifique tympan, intact, mais très usé
par les ans, illustre le Mystère pascal. Le registre
médian comprend les scènes de la Passion
: baiser de Judas, Christ aux outrages, retrait des
vêtements et Mise au tombeau. Celui du bas accueille
une Résurrection et une Ascension. Enfin, le
registre supérieur couronne le tout avec une
Crucifixion très riche en personnages.
Source : La cathédrale
Notre-Dame de Rouen, éditions du Patrimoine.
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Le tympan du portail de la Calende.
En haut, la Crucifixion. Au milieu : des scènes de la Passion.
En bas, Résurrection et Ascension. |
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La cathédrale
dans la seconde guerre mondiale. En 1938, dès
la crise de Munich, un plan global de protection fut mis au
point. Les échafaudages garnis de sacs de sables s'élevèrent
à l'extérieur et dans la chapelle de la Vierge.
Les vitraux anciens (c'est-à-dire à l'exclusion
de ceux du XIXe siècle) furent mis en caisse et expédiés
au donjon de Niort.
Les Allemands entrent dans la ville le 9 juin 1940. Un bref combat
de chars entraîne un incendie entre la cathédrale et
les quais de la Seine. Le feu gagne l'échafaudage de bois
installé autour de la tour
de Beurre et se propage aux combles du collatéral sud.
Charpentes et toitures sont détruites. Il faut réparer
et restaurer. L'entreprise Lanfry, chargée de la tâche,
achève l'ouvrage à la fin de 1941.
En avril 1944, en préparation du débarquement
de Normandie, la RAF veut détruire le nud ferroviaire
et la gare de triage près de Sotteville-les-Rouen.
Comme à Nevers au mois de juin suivant (ce qui sera
fatal à la cathédrale Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte),
l'aviation anglaise va largement déborder de son objectif
et bombarder des zones situées à plusieurs kilomètres
de sa cible. Dans la nuit du 18 au 19 avril, le cur
historique de Rouen est gravement touché lors d'un
raid des bombardiers alliés. Cinq bombes et torpilles
frappent presque à mort la cathédrale. C'est
d'abord le collatéral sud qui reçoit deux engins
explosifs : toutes les chapelles latérales sud sont
détruites à l'exception de la chapelle Sainte-Catherine.
Ses arcs-boutants ont résisté et, par chance,
ils vont réussir à contenir la poussée
des voûtes de la nef et empêcher la chute du mur
gouttereau dont les piliers ont pourtant été
fragilisés par les explosions. Plus grave encore, une
torpille vient frapper la pile sud-est de la croisée
du transept. Ce qui endommage la pile voisine et projette
des milliers d'éclats alentour. L'effet de souffle
pulvérise la rose nord du transept et déforme
la rose sud. Une autre torpille vient frapper le déambulatoire
et détruit une partie des stalles. Spectacle de désolation
: des morceaux de piliers et de murs jonchent le sol par milliers,
le mobilier est détruit, la vitrerie réduite
en miettes, les murs sont troués, les remplages soufflés.
Les tours de la façade ne sont pas atteintes. Pour
l'instant...
Il y a pis : la structure elle-même du bâtiment est
menacée car la pile sud-est de la croisée, atteinte
de plein fouet par une torpille, peut s'effondrer sous les huit
mille tonnes de la tour-lanterne et de sa flèche. Il faut
étayer sous la croisée de toute urgence. Jean-Pierre
Chaline [cf source] nous apprend que, faute de madriers disponibles,
les ouvriers de l'entreprise Lanfry s'en vont en pleine nuit (!)
dans la forêt du Rouvray abattre les arbres nécessaires.
Des cintres en bois, renforcés d'une maçonnerie de
briques, soutiennent enfin les piles endommagées de la croisée.
Sur le côté sud de la nef, le collatéral a été
détruit. On implante des tirants métalliques dans
les élévations pour soulager la pression de la voûte
sur les arcs-boutants de la chapelle Sainte-Catherine,
seule chapelle sud à être encore debout. --»»
2/2
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L'archange Saint Michel pèse les âmes
dans le gâble au-dessus de l'archivolte du portail. |
2/2 --»» Puis
vient la «semaine rouge». Du 30 mai au 5
juin 1944, une série de bombardements frappe
Rouen et sa périphérie. Le soir du 1er
juin, c'est le feu qui embrase la ville. La tour Saint-Romain
est atteinte dans ses parties hautes. Charpente et toiture
s'effondrent. Les cloches du beffroi tombent sur la
voûte... qui ne cède pas. Le feu, attisé
par un vent violent, gagne les combles du collatéral
nord et ceux de la nef. Mais à une hauteur que
les lances des pompiers ne peuvent atteindre. Alors,
c'est une chaîne humaine qui les remplace avec
des seaux d'eau montés jusqu'au bas de la flèche.
Dans la nuit, le vent se calme, ce qui permet enfin
d'éteindre l'incendie. À nouveau, en toute
hâte, il faut consolider et étayer toutes
les parties fragilisées. L'entreprise Lanfry
est au four et au moulin, nous disent les sources. Après
la guerre, c'est elle qui sera chargée des très
nombreux travaux de réparation et de restauration.
La cathédrale ne sera rendue au culte qu'en 1956.
La restauration de certaines parties de l'édifice exigera
encore plus de temps. Ainsi, le toit de la tour Saint-Romain
ne sera achevé qu'en 1987.
Que se serait-il passé si...? Si les secours n'avaient
pas été aussi rapides, si les arcs-boutants
de la chapelle Sainte-Catherine
n'avaient pas été assez robustes, il est vraisemblable
que toute la voûte de la nef se serait écroulée
et, avec elle, le collatéral nord. La pile sud-est
cédant sous le poids, la tour-lanterne
se serait effondrée en détruisant le chur
et le transept. N'auraient sans doute subsisté de la
cathédrale de Rouen que la façade, ses deux
tours et la chapelle
de la Vierge...
Notons, pour terminer, que la «semaine rouge»
vit la destruction de quelques grands édifices publics
rouennais, comme la bourse, le théâtre des Arts
et l'hôtel des douanes. L'église Saint-Vincent
a, elle aussi, été totalement détruite.
Ses vitraux Renaissance, heureusement mis en caisse avant
la guerre, ont été remontés dans la nouvelle
église Sainte-Jeanne d'Arc.
Ils n'y sont pas tous. L'abside de la chapelle d'axe de la
cathédrale, dite chapelle
de la Vierge, abrite quelques vitraux de Guillaume Barbe
(vers 1470) issus de Saint-Vincent.
Sources : 1) Rouen, Primatiale
de Normandie, éditions La Nuée Bleue,
collection «La Grâce d'une cathédrale»,
article «La cathédrale à l'épreuve
de la Seconde Guerre mondiale» de Jean-Pierre
Chaline ; 2) Rouen, La reconstruction, Itinéraire
du Patrimoine.
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Flagellation, Passion et Mise au tombeau dans le tympan du portail
de la Calende. |
LES TOURS DE LA FAÇADE
OCCIDENTALE |
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LA TOUR SAINT-ROMAIN
(NORD) |
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La tour
Saint-Romain (82 mètres de haut )
est la partie la plus ancienne de la cathédrale.
Son aspect la rapproche plus d'un beffroi que d'une
tour d'un édifice religieux. À l'origine,
sa partie inférieure fut conçue comme
partie intégrante de l'enclos canonial. Les historiens
la datent des années 1150-1160. Sa succession
de baies géminées, qui s'agrandissent
à mesure que l'étage s'élève,
conserve un petit air roman. Enfin, la partie supérieure,
que l'on distingue très facilement grâce
au changement de couleurs (elle n'a pas été
restaurée récemment), a été
élevée de 1469 à 1477 par Guillaume
Pontifs (qui construira juste après la bibliothèque
des chanoines). Cet étage, en gothique flamboyant,
est surmonté d'un toit en pavillon (détruit
en 1944 et reconstruit). Le dernier étage «roman»
accueille les cloches. Le carillon de la cathédrale
de Rouen est l'un des plus importants de France. Dans
la salle basse de la tour Saint-Romain se trouve le
baptistère
de la cathédrale.
Initialement, la tour Saint-Romain ne devait être réunie
à la cathédrale que par un pont de pierre, construit
à plus de douze mètres au-dessus du sol. Ce
pont donnait directement dans les tribunes de la nef nord.
Comme les tribunes n'ont jamais été construites
(voir l'encadré),
la porte qui reliait les deux bâtiments a été
bouchée, le passage transformé en chapelle.
Le vide entre les deux bâtiments a, quant à elle,
été bouché dès la fin du XIIIe
siècle.
Sources : 1) Congrès
archéologique de France, 89e session tenue
à Rouen en 1926, article La cathédrale
de Rouen par Marcel Aubert ; 2) La cathédrale
Notre-Dame de Rouen, éditions du Patrimoine.
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La tour Saint-Romain.
Le niveau du bas (en gris clair) est du XIIe siècle.
Le niveau supérieur, en gothique flamboyant, a été
ajouté au XVe siècle.
Le toit qui domine l'étage flamboyant a été détruit
en juin 1944 et rebâti. |
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La tour de Beurre et son gothique flamboyant (fin du XVe siècle).
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Statues d'Adam et Ève
sur la tour de Beurre
Côté ouest.
(Fin du XVe siècle) . |
La tour
de Beurre (75 mètres de haut). Comme
la tour nord de la cathédrale
de Bourges, elle doit son nom à l'argent
collecté par le chapitre auprès des paroissiens
qui devaient payer s'ils ne voulaient pas manger maigre
pendant le Carême. Cette tour, de style gothique
flamboyant, est nettement postérieure à
la tour Saint-Romain puisqu'elle a été
construite par Guillaume Pontifs à partir
de 1485.
À l'origine, dans ce qui est maintenant le rez-de-chaussée
de la tour, se trouvait la chapelle de la paroisse Saint-Étienne-la-Grande-Église
(en effet, la cathédrale n'était pas une paroisse,
mais l'église métropolitaine de Normandie).
Cette chapelle, qui semblerait remonter au Xe siècle,
occupait en fait un espace plus vaste : c'était le
bas de la tour et les deux chapelles latérales sud
attenantes, espace auquel il faut encore ajouter les deux
travées du collatéral sud qui bordent ces chapelles.
En 1496, un accord eut lieu entre les trésoriers de
la paroisse Saint-Étienne et le chapitre de la cathédrale
: le rez-de-chaussée de la tour fut canoniquement déclaré
paroisse. Henri Potin, supérieur des Carmes de Rouen
et collaborateur de l'archevêque Georges Ier d'Amboise,
vint bénir sa base architecturale afin d'en concrétiser
la dédicace. À la Révolution, cette paroisse
fut supprimée et la cathédrale prit le relais
en une vaste paroisse, Notre-Dame-la-Grande-Église.
Revenons à la construction de la tour de Beurre et
suivons ce qu'en dit le Congrès archéologique
de France tenu à Rouen en 1926. On savait que la
chapelle Saint-Étienne reposait sur un sol de mauvaise
qualité et l'on hésitait à construire
une tour au-dessus. Toutefois, en 1485, Guillaume Pontifs
fit des sondages et informa le chapitre que l'on pouvait élever
la tour sur de simples fondations. La construction commença,
mais rapidement des tassements se produisirent, qui firent
pencher vers le sud l'élévation déjà
construite. Pontifs dut reprendre d'aplomb la construction.
C'est son successeur, Jacques Leroux, qui termina les
parties hautes. Ce qui donna d'ailleurs lieu à d'âpres
discussions avec le chapitre. En 1507, Leroux commença
à élever une flèche, mais dut arrêter
au profit d'une couronne octogonale.
Sur le plan ornemental, cette tour soulève l'intérêt
par la présence de grands contreforts enrichis de niches
contenant de remarquables statues. Au deuxième étage,
sur la face est, se trouve notamment illustrée la
légende de l'ara cli (l'autel céleste)
: une sibylle est interrogée par l'empereur Octavien
pour savoir s'il doit être adoré comme un dieu
et si rien n'est plus puissant que lui dans le monde. La sibylle
lui montre alors une vision céleste où l'on
voit la Vierge tenant un nouveau-né. Ce qui veut dire
que ce nouveau-né est plus puissant que l'empereur.
Et Octavien s'agenouille pour l'adorer. On retrouve, dans
la pierre de la tour de Beurre, les personnages de cette légende
: Octavien, deux de ses officiers, son fauconnier, son connétable,
la sibylle et sa servante. Les statues, groupées par
deux dans leur niche, sont dominées par la Vierge et
l'Enfant adossés à un remplage. La photo ci-dessous
à gauche en donne une illustration globale.
Sources : 1) Congrès
archéologique de France, 89e session tenue
à Rouen en 1926, article La cathédrale
de Rouen par Marcel Aubert ; 2) Rouen aux cent
clochers de François Lemoine et Jacques Tanguy,
éditions PTC.
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Les statues du deuxième étage, côté est, de la
tour de Beurre.
Elles illustrent la légende de l'ara cli et de la sibylle
de Tibur. |
Statues sur le côté ouest de la tour de Beurre.
(Fin du XVe siècle). |
LA TOUR-LANTERNE À
LA CROISÉE |
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La tour-lanterne
comporte trois niveaux. Le premier, qui n'est pas visible
sur les photos de cette page, remonte au XIIIe siècle
: c'est le niveau initial, celui par lequel les maçons
ont commencé pour édifier la lanterne
de la croisée. Ses ouvertures sont aveugles.
L'étage au-dessus (étage du bas dans la
photo ci-dessous) est de la même époque.
Il a été consolidé par Roulland
le Roux au début du XVIe siècle. Sur
ces deux niveaux subsistent encore des traces de l'incendie
de 1514.
Le dernier étage gothique est l'uvre de ce même
Leroux au début du XVIe siècle. Dans l'étage
du XIIIe siècle (voir ci-dessous), on a deux arcades
en tiers-point ; dans celui du XVIe, quatre arcades aux gâbles
flamboyants, séparées par des piles, elles-mêmes
surmontées de pinacles. Le style Renaissance est déjà
présent : les statues des angles sont nichées
sous des dais décorés de coquilles (ornementation
typique de la Renaissance que l'on voit bien dans la photo
ci-contre).
En 1523, une première flèche en bois fut élevée
sur le troisième niveau. Elle disparut dans l'incendie
de 1822. À la suite de quoi, elle fut remplacée
par la flèche en fonte d'Alavoine.
Sources : 1) Congrès
archéologique de France, 89e session tenue
à Rouen en 1926, article La cathédrale
de Rouen par Marcel Aubert ; 2) Haute-Normandie
gothique par Yves Bottineau-Fuchs aux éditions
Picard.
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Les niveaux 2 et 3 de la tour lanterne
et leurs sculptures flamboyantes. |
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Troisième niveau de la tour-lanterne élevé par
Roulland Leroux au XVIe siècle.
Sculptures flamboyantes avec détails Renaissance. |
Statue d'un prophète au troisième niveau de la tour-lanterne.
Le dais, avec ses coquilles, porte déjà la marque de
la Renaissance.
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La partie terminale de la flèche de la tour-lanterne
élevée par l'architecte Alavoine au XIXe siècle.
Elle culmine à 151 mètres.
(Plus haute flèche de cathédrale de France.) |
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PARTIE EXTÉRIEURE
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TRANSEPT ET CHUR
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BAPTISTÈRE ET CHAPELLES LATÉRALES
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DÉAMBULATOIRE ET CHAPELLE DE LA VIERGE
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